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Si vous vivez au Liban-Sud, vous avez peut-être reçu un message glaçant d’un numéro inconnu: "Il semblerait que vous soyez un fervent partisan de Hassan Nasrallah. Vous serez donc récompensé en le rencontrant en enfer."

Ces messages ne sont pas anodins. Bien que l’identité de leurs auteurs reste inconnue, tout laisse penser qu’il s’agit d’une guerre psychologique fomentée par Israël, visant à semer la peur parmi les Libanais.

C’est la seconde fois que de telles tactiques sont employées dans un contexte d’escalade tant cybernétique que militaire.

Récemment, un autre message a mis en garde contre des liens contenant des logiciels malveillants, avertissant les destinataires des risques de virus de type Trojan.

Fait intéressant, Israël accuse le Hezbollah d’utiliser des tactiques similaires. En effet, de nombreux citoyens israéliens ont reçu, durant la nuit, des messages alarmants, certains comportant des liens malveillants.

Selon la Direction nationale israélienne de la cybersécurité, près de cinq millions d’Israéliens auraient été visés.

Qui peut envoyer de tels messages?

Alors que la guerre cybernétique s’intensifie, une question clé émerge: ces messages proviennent-ils d’acteurs étatiques sophistiqués, ou bien des entités non étatiques, dotées d’outils numériques et d’intelligence artificielle, en seraient-elles responsables?

L’expert en technologie Omar Kaskas explique à Ici Beyrouth que ces envois massifs de SMS peuvent être effectués de deux manières:

  • Messagerie par géolocalisation: les messages sont envoyés à tous les téléphones mobiles situés dans une zone géographique spécifique. Par exemple, toute personne se trouvant dans le Liban-Sud recevrait ce message, quelle que soit son affiliation politique.
  • Messagerie via une base de données: les expéditeurs utilisent une base de données de numéros de téléphone d’une région précise. Les messages sont envoyés à ces numéros, même si les destinataires ne se trouvent pas physiquement dans la zone ciblée.

Certaines applications, comme "Blindspot", permettent l’envoi de messages en masse de façon anonyme. Ainsi, toute personne ayant accès à une base de données de numéros peut utiliser ces outils pour envoyer des SMS, vidéos ou fichiers audio sans dévoiler l’identité de l’expéditeu

Les données des Libanais sont-elles compromises?

D’après M. Kaskas, les numéros de téléphone au Liban sont souvent "compromis". Les plateformes de réseaux sociaux et les entreprises de marketing mondiales, qui collectent des informations personnelles lors de la souscription, exposent fréquemment les numéros de téléphone. Ces données peuvent ennsuite être vendues à des courtiers ou piratées, puis diffusées sur le dark web.

De plus, des équipements de surveillance, des antennes et des stations de transmission peuvent intercepter les numéros, parfois sous prétexte d’activités de marketing.

Légalité de ces pratiques

La légalité de ces pratiques dépend de la manière dont les données sont obtenues et de l’emplacement des activités.

"Acheter des numéros auprès de sociétés de marketing agréées ou de courtiers peut être légal, mais les obtenir par piratage ou via le dark web constitue une violation flagrante des lois sur la vie privée", précise M. Kaskas.

Par ailleurs, l’envoi de SMS en masse sans le consentement des destinataires pourrait contrevenir aux lois locales, notamment lorsque le but est de manipuler psychologiquement ou de mener des attaques de guerre cybernétique.

Se protéger des messages malveillants

Pour se protéger, M. Kaskas recommande de ne pas ouvrir les messages ou liens provenant de sources inconnues.

"Ne partagez jamais vos informations personnelles en réponse à des messages non sollicités. Si vous recevez un message suspect via WhatsApp ou Telegram, ou même un appel téléphonique, ne répondez pas et ne cliquez jamais sur des liens non vérifiés, car ceux-ci pourraient contenir des virus capables de compromettre vos données, localiser votre appareil ou accéder à d’autres informations sensibles", conclut-il.

Les gouvernements devraient également mettre en place des mesures de sécurité pour filtrer ces messages avant qu’ils n’atteignent les appareils des utilisateurs libanais. Des actions proactives sont nécessaires afin d’identifier et bloquer les entités à l’origine de ces envois massifs avant que les SMS n’atteignent leurs destinataires.