"Si le Liban est interdit d’exploiter ses ressources gazières, nous ne permettrons à personne d’extraire et de vendre du gaz, quelles que soient les conséquences", a menacé le numéro un du Hezbollah.

C’est un discours chargé de menaces que le secrétaire général du Hezbollah, Hassan Nasrallah, a prononcé mercredi soir à l’occasion du seizième anniversaire du début de la guerre de juillet 2006, entre Israël et le parti chiite.

Au cœur de ce discours, le dossier de la prospection gazière et pétrolière offshore et celui des négociations indirectes avec Israël sur la délimitation de la frontière maritime, menées notamment grâce à une médiation américaine, sous la houlette des Nations unies. Ces menaces semblaient d’ailleurs s’adresser aussi bien aux Israéliens qu’aux Américains qu’il n’a pas épargnés de ses critiques.

Le chef du Hezbollah a commencé par exposer la situation "extrêmement difficile" dans laquelle le Liban se trouve, jugeant que les fonds promis par le Fonds monétaire international ainsi que ceux qui seraient éventuellement débloqués plus tard par les bailleurs de fonds, ne sont pas suffisants pour une sortie de crise. Pour lui, la "seule planche de salut" se trouve enfouie dans les fonds sous-marins au large des côtes libanaises. Il a dans ce contexte mis l’accent sur "l’importance existentielle" pour le Liban de faire valoir ses droits sur ses ressources gazières en Méditerranée, "au cours des deux prochains mois, soit en août et en septembre" parce que, selon lui, Israël aura d’ici là "extrait son gaz qu’il envisage de vendre aux Européens".  "Deux mois, c’est le temps dont a besoin la compagnie (grecque) Energean pour extraire le gaz du champ de Karish. Passé septembre, le Liban se retrouvera de ce fait dans une situation de faiblesse si les négociations reprennent et s’il n’a pas entre-temps imposé sa volonté. Le prix qu’il aura à payer sera lourd. La frontière maritime doit être délimitée avant septembre et les États-Unis doivent reconnaître ses droits du Liban", a averti Hassan Nasrallah, qui a accusé Washington "de tergiverser exprès pour que Beyrouth rate cette occasion". S’adressant aux autorités libanaises, il leur a demandé de "ne pas écouter les discours mielleux des Américains qui n’ont fait que bercer les Libanais avec des promesses jamais tenues, et de profiter de l’atout que représente pour eux la Résistance".

Le chef du Hezbollah s’est étendu longuement sur ce dernier point, exposant à coups de détails "la puissance militaire rédhibitoire" de sa milice et invitant les responsables libanais à "en profiter, d’autant que les Américains cherchent à obtenir des acquis pour Israël au détriment du Liban". "Nous pouvons cependant causer un sérieux problème à Israël si nous entravons ses projets de vente de gaz en Europe", a-t-il estimé en situant la tournée du président américain Joe Biden dans la région dans le cadre des efforts menés par l’Occident pour s’assurer de nouvelles sources d’énergie, à cause de la guerre en Ukraine.

Évoquant l’affaire des drones envoyés par sa formation en reconnaissance en direction du camp de Karish, il y a une dizaine de jours, il a expliqué que le Hezbollah a fait exprès d’en envoyer trois "pour que les Israéliens activent leur système de défense et que la compagnie grecque et ses ingénieurs réalisent qu’ils sont en train d’opérer dans un secteur instable". "Le but était de montrer que nous sommes capables d’intervenir à n’importe quel moment et par n’importe quel moyen", a expliqué le chef du Hezbollah.

"L’envoi de drones n’est que le début, a insisté Hassan Nasrallah, parce que si les résultats de la médiation américaine sont négatifs, nous irons au-delà de Karish et bien au-delà". "Si le Liban est empêché d’exploiter ses ressources gazières, nous ne permettrons à personne d’extraire et de vendre du gaz, quelles que soient les conséquences", a-t-il encore menacé en expliquant que sa formation "suit de très près tout ce qui se passe au large des côtes palestiniennes". "Nous avons toutes les données qu’il faut", s’est vanté le chef du Hezbollah qui, réagissant aux critiques libanaises à l’affaire des drones, a dit "n’avoir promis à personne que nous n’entreprendrons aucune action tant que les négociations avec Israël sont en cours". "Au lieu de rassurer les Américains, il faut leur faire peur", a-t-il soutenu, avant d’ajouter: "Nous soutenons l’État au sujet des négociations, mais jamais nous n’entreprendrons une action pour les faciliter". Et d’insister: "Nous nous réservons le droit d’intervenir pour améliorer les conditions de négociations avec Israël au sujet de la délimitation des frontières maritimes". "Notre seule option est d’user de pressions. Il s’agit d’une question cruciale. Ce n’est pas une guerre des nerfs que nous lançons. Nous sommes sérieux parce que le dossier du gaz est notre seule voie de salut", a promis le chef du Hezbollah qui a minimisé l’importance des menaces israéliennes contre le Liban, en mettant en avant "les capacités militaires de la résistance" et "le soutien populaire dont elle bénéficie".