François a célébré jeudi une messe de réconciliation avec les Peuples premiers d’Amérique dans le plus ancien sanctuaire catholique d’Amérique du Nord, celui de Sainte-Anne-de-Beaupré. Le pape a dit " ressentir le poids de l’échec " face " au scandale du mal et au Corps du Christ blessé dans la chair de nos frères autochtones ". Certains descendants de familles autochtones ont réclamé au souverain pontife d’aller plus loin en abrogeant des décrets papaux à l’origine de la " doctrine de la découverte ". Ces bulles avaient servi, à l’époque coloniale, à légitimer la confiscation des terres et des ressources autochtones.

Des fidèles d’origine autochtone pendant la messe du pape en la cathédrale Sainte-Anne de Beaupré

Le pape François a célébré jeudi une nouvelle messe de réconciliation au Québec pour les autochtones de l’est du Canada, perturbée quelques instants par le déploiement d’une banderole revendicative.

A l’intérieur du sanctuaire, juste devant l’autel et à quelques mètres de François au début de la messe, des autochtones ont déployé une banderole sur laquelle on pouvait lire: " Révoquez la doctrine ", en référence aux édits papaux du XVe siècle qui autorisaient les puissances européennes à coloniser les terres et les peuples non chrétiens.

Au-delà des excuses prononcées par le pape en début de semaine et qui étaient attendues par de nombreux autochtones, certains demandent en effet au pape d’aller plus loin et notamment d’abroger des décrets papaux à l’origine de la " doctrine de la découverte ".

Ces bulles ont servi à légitimer la confiscation des terres et des ressources autochtones à l’époque coloniale, estiment les experts.

L’inscription n’était toutefois présente que sur le côté de la banderole opposé au pape, et celle-ci a été calmement retirée peu après pour être placée à l’extérieur.

Aucun autre incident n’est venu perturber la messe durant laquelle le pape a expliqué " être plongé dans l’amertume " et " ressentir le poids de l’échec " face " au scandale du mal et au Corps du Christ blessé dans la chair de nos frères autochtones ".

" Pourquoi tout cela est-il arrivé? Comment cela a-t-il pu se produire dans la communauté de ceux qui suivent Jésus? ", s’est encore interrogé le souverain pontife, qui avait salué la foule quelques minutes plus tôt à bord de sa papamobile.

Pour Desneiges Petiquay, 54 ans, qui porte autour du cou un foulard orange en hommage aux enfants autochtones disparus, cette visite est " un message d’espoir ". Elle s’est levée à 04H00 du matin pour arriver tôt de sa réserve de Manawan et être au premier rang devant l’église, où sont disposés des écrans géants.

" Ce pape sait qu’on existe ici, il nous reconnaît. J’ai lu sa biographie, pour moi c’est un bon pape. Hier, je l’ai vu de près, ça m’a touché ici ", dit-elle en mettant la main sur le coeur.

Selon le diocèse de Québec, 70% des billets distribués gratuitement pour assister à l’événement ont été réservés aux communautés autochtones (Premières Nations, Métis et Inuits), auxquelles le pape a renouvelé sa demande de pardon pour le drame des pensionnats pour enfants entre la fin du XIXe siècle et les années 1990.

Parmi les fidèles, certains tiennent entre leurs mains une photo d’un proche disparu. Beaucoup portent des habits orange, symbole de la souffrance des autochtones.

" Personnellement, ce n’était pas suffisant ", estime pour sa part Abigail Brooks, 23 ans, membre de la Saint Mary’s First Nation de la province du Nouveau-Brunswick. Elle espère d’autres actions pour montrer que l’Eglise veut une vraie réconciliation.

Des pèlerins prenant le bus pour se rendre à la messe papale à Québec

Mercredi, le pape François avait renouvelé ses excuses devant les autorités pour le mal fait aux autochtones notamment dans les pensionnats mis en place pour " tuer l’indien dans le coeur de l’enfant ".

Nombre d’entre eux ont subi des abus physiques ou sexuels, et des milliers n’en sont jamais revenus, victimes de maladie, de malnutrition ou de négligence.

La province francophone de Québec compte le plus grand nombre de catholiques au Canada, mais l’affluence est malgré tout inférieure aux attentes depuis le début de la visite, dans un contexte d’une Eglise en perte de vitesse.

Dans l’après-midi, le pape, âgé de 85 ans, a prononcé une homélie à la cathédrale Notre-Dame de Québec, en présence de représentants religieux. Vendredi, pour sa dernière étape, il s’arrêtera quelques heures à Iqaluit (Nunavut), dans l’archipel arctique.

Avec AFP