Il aura fallu 18 mois de négociations pour que le Sénat américain adopte, finalement, le plan Biden sur le climat et la santé. Ce dernier promet notamment des investissements de 430 milliards de dollars, dont la majeure partie servira à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40 % d’ici à 2030. Sans surprise, tous les sénateurs républicains ont voté contre le texte, baptisé " Inflation Reduction Act ", alors qu’il fallait toutes les voix de la très fine majorité démocrate au Sénat.

Les sénateurs ayant travaillé les deux nuits de samedi et de dimanche avaient besoin d’une quantité conséquente de pizzas pour éviter la fatigue…

Après 18 mois de négociations et une nuit marathon de débats, le Sénat américain a adopté dimanche le grand plan de Joe Biden sur le climat et la santé, offrant une victoire d’étape significative au président, à moins de 100 jours d’élections cruciales.

Par leurs seules voix, les démocrates ont approuvé ce plan de plus de 430 milliards de dollars d’investissements, qui prend la route de la Chambre des représentants pour un vote final la semaine prochaine, avant d’être promulgué par Joe Biden.

" Ce projet de loi va changer l’Amérique pour les décennies à venir ", a assuré le chef des démocrates au Sénat Chuck Schumer, la voix chevrotante juste après le vote, accueilli par un tonnerre d’applaudissements dans son camp.

Tous les sénateurs républicains ont voté contre le texte, baptisé " Inflation Reduction Act ", et qu’ils accusent au contraire de générer des dépenses publiques inutiles.

Financer la transition énergétique

Fruit de difficiles tractations avec l’aile droite du parti démocrate, cette enveloppe comprend le plus grand investissement jamais engagé aux Etats-Unis pour le climat — 370 milliards de dollars pour réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% d’ici à 2030.

Deux sénateurs situés aux deux extrêmes de l’échiquier politique américain: Bernie Sanders (avant plan) qualifié de socialiste par les républicains, un terme qui frôle l’insulte au pays de l’oncle Sam, et Ted Cruz, le très texan républicain trumpiste, pro-armes à feu, farouche partisan du " Drill baby drill " et toute la panoplie de l’aile droite de la droite américaine.

 

" Il a fallu faire de nombreux compromis. Faire des choses importantes en exige presque toujours ", a souligné Joe Biden dans un communiqué, saluant le passage du projet de loi au Sénat et exhortant la Chambre des représentants à adopter le texte sans attendre.

Avec cette réforme, un Américain recevra jusqu’à 7.500 dollars en crédits d’impôts pour l’achat d’une voiture électrique. L’installation de panneaux solaires sur son toit sera prise en charge à 30%.

Cette réforme doit aussi permettre de renforcer la résilience des forêts face aux incendies monstres qui ravagent l’Ouest américain et dont la multiplication a été directement attribuée au réchauffement de la planète.

Plusieurs milliards de dollars de crédits d’impôts seront également proposés aux industries les plus polluantes afin de les assister dans leur transition énergétique, une mesure vivement critiquée par l’aile gauche du parti, qui a dû se ranger derrière ce texte, faute d’être parvenue à un accord plus ambitieux.

 

Arrivé au pouvoir avec d’immenses projets de réformes, Joe Biden les a vues être enterrés, ressuscités, puis enterrés à nouveau par un sénateur très modéré de son camp, Joe Manchin. Au vu de la très fine majorité démocrate au Sénat, l’élu de Virginie-Occidentale, Etat connu pour ses mines à charbon, possède virtuellement un droit de veto sur ses projets.

" Vote-a-rama "

Fin juillet, le chef des démocrates au Sénat a finalement réussi à arracher un compromis à M. Manchin.

Samedi, les sénateurs ont enfin commencé à débattre du texte dans l’hémicycle.

Dans la soirée, ils sont entrés dans une procédure-marathon baptisée " vote-a-rama ", lors de laquelle les élus, les traits tirés, ont durant quinze heures d’affilée proposé des dizaines d’amendements et exigé un vote sur chacun.

L’occasion pour l’opposition républicaine, qui juge le plan Biden trop coûteux et l’aile gauche démocrate, qui le voulait plus large, de présenter leurs doléances.

Influent sénateur de gauche, Bernie Sanders a présenté au cours de la nuit plusieurs amendements censés renforcer le volet social du texte, qui au cours des derniers mois, a été considérablement rogné.

Le texte prévoit 64 milliards de dollars d’investissements dans la santé et la baisse progressive du prix de certains médicaments, qui peuvent être jusqu’à dix fois plus chers que dans d’autres pays riches.

Mais les progressistes ont dû abandonner leurs ambitions de maternelles et universités publiques gratuites et de meilleurs soins pour les personnes âgées.

 

" Des millions de retraités vont continuer à avoir des dents pourries et à ne pas recevoir les prothèses dentaires, auditives ou les lunettes qu’ils méritent ", a critiqué M. Sanders depuis l’hémicycle. " Ce projet de loi ne fait rien pour résoudre ce problème ", a assuré l’ancien candidat à la présidentielle.

Mais le camp démocrate, soucieux de mettre en oeuvre ce plan avant les périlleuses élections législatives de novembre et offrir une victoire à un président à la cote de popularité anémique, a fait bloc et rejeté l’immense majorité des amendements.

En parallèle de ces investissements massifs, le projet de loi entend réduire le déficit public avec un nouvel impôt minimal de 15% pour toutes les sociétés dont les bénéfices dépassent le milliard de dollars. Il vise à empêcher certaines grosses sociétés d’utiliser les niches fiscales qui leur permettaient jusqu’ici de payer beaucoup moins que le taux théorique.

Selon les estimations, cette mesure pourrait générer plus de 258 milliards de dollars en recettes pour l’Etat fédéral américain au cours des 10 prochaines années.

Avec AFP