Alors que les élèves français et américains ont repris le chemin de l’école, la pénurie d’enseignants menace le bon déroulement des classes. Salaires faibles, précarité, faible considération constituent parmi les facteurs explicatifs de la difficulté à recruter de nouveaux enseignants dans les deux pays, forçant l’exécutif à recourir à des aides financières exceptionnelles et au recrutement de contractuels sans expérience.

Les 12 millions d’élèves français ont repris jeudi le chemin de l’école. (AFP)

 

Les quelque 12 millions d’élèves français ont repris jeudi le chemin de l’école, dans un climat d’inquiétude face à la crise inédite de recrutement des enseignants, même si le gouvernement a promis que la rentrée allait " bien se passer " et qu’il y aurait " un professeur devant chaque classe ".

La rentrée avait eu lieu l’an dernier sous le sceau de la crise sanitaire. Cette année, c’est sous celui de la crise du recrutement des enseignants qu’elle se déroule. Un phénomène qui n’est pas nouveau mais qui s’est encore aggravé cette année, avec plus de 4.000 postes non pourvus aux concours dans le pays, sur 27.300 postes ouverts dans le public et le privé (et 850.000 enseignants au total).

" On a évidemment voulu qu’il puisse y avoir un enseignant devant chaque élève pour cette rentrée. Et c’est forcément une angoisse pour les parents de se poser la question de savoir si ce sera le cas ", a déclaré jeudi la Première ministre Elisabeth Borne sur France Inter.

Le ministre de l’Education Pap Ndiaye a promis, ces derniers jours, que même si les conditions " ne sont pas optimales ", la rentrée serait " comparable à celle de l’année dernière ", " avec un professeur devant chaque classe ".

Une rentrée dans des conditions non-optimales 
Les enseignants réclament depuis des années un recrutement de masse, une augmentation salariale et une amélioration de leurs conditions de travail. (AFP)

 

Pour pallier la pénurie d’enseignants, l’Éducation nationale a recruté des enseignants contractuels – 3.000 selon Pap Ndiaye – formés en quelques jours avant de se retrouver face à une classe. Afin de rassurer, encore, le ministre de l’Éducation, qui effectue sa première rentrée à ce poste, a répété que " plus de 80% des contractuels ont déjà enseigné ".

Mais les inquiétudes sont vives du côté des parents d’élèves comme des syndicats.

" L’année dernière mon fils était dans une classe double niveau CE1-CE2. Ils étaient 28, l’institutrice était un peu surchargée. Elle était souvent absente, elle n’a pas été remplacée pendant une semaine, ils n’avaient trouvé personne. On a passé une semaine à garder nos enfants ", raconte à l’AFP Bénédicte Candir 45 ans, devant l’école élémentaire Charles-Péguy de Créteil.

Les parents d’élèves redoutent " une rentrée explosive ", indique à l’AFP Nageate Belahcen, co-présidente de la FCPE, première fédération de parents d’élèves. " Les enseignants absents non remplacés, les contractuels pas assez formés ou les maths au lycée… Les familles sont angoissées ", dit-elle.

Les syndicats, eux, dénoncent " un bricolage " face aux recrutements des contractuels durant l’été. "On aura des adultes devant les classes, pas des enseignants ", déclare le Snuipp-FSU, premier syndicat du primaire, qui craint déjà que le manque de remplaçants se fasse sentir dès les premiers congés de maladie ou de maternité.

Pour redresser l’attractivité du métier d’enseignants, le gouvernement a posé quelques jalons côté rémunérations. Pap Ndiaye a promis que " aucun enseignant ne commencerait sa carrière à moins de 2.000 euros net par mois à partir de la rentrée scolaire 2023 ". Cela sera " un salaire de départ, hors primes ". Et des augmentations " significatives " auront lieu, a-t-il dit, sans donner de calendrier.

Aux États-Unis, la pénurie d’enseignants menace la rentrée
Aux États-Unis, l’exécutif a sorti les grands moyens financiers pour remédier à la pénurie d’enseignants. (AFP)

 

Aux États-Unis, l’administration Biden a annoncé mercredi une série d’initiatives pour faire face aux problèmes de recrutement d’enseignants, dus selon elle notamment à des rémunérations trop faibles, en collaboration notamment avec des sites internet de recherche d’emploi et des syndicats.

" En moyenne, les enseignants gagnent 33% de moins que d’autres actifs dotés d’un diplôme de l’enseignement supérieur ", déplore la Maison Blanche, qui souligne que le salaire hebdomadaire des enseignants dans les écoles américaines, corrigé de l’inflation, n’a en moyenne augmenté que de 29 dollars entre 1996 et 2021.

Si l’exécutif américain ne contrôle pas directement au niveau fédéral le recrutement et la rémunération des enseignants, des compétences dévolues aux États et collectivités locales, il assure néanmoins pouvoir agir de manière plus indirecte.

Les ministères de l’Éducation et de l’Emploi ont ainsi écrit aux collectivités locales pour les encourager à puiser dans les fonds publics disponibles, à savoir plusieurs centaines de milliards de dollars de dépenses votées pour relancer l’économie américaine après la pandémie de Covid-19.

L’exécutif américain fait également savoir que plusieurs organisations syndicales vont travailler ensemble sur le recrutement par la voie de l’apprentissage.

La Maison Blanche encourage enfin les enseignants dans le pays à exploiter les mécanismes d’effacement de dette étudiante qui leur sont réservés.

Avec AFP