Dans l’Afghanistan des Talibans, les étudiantes ont été une nouvelle fois victimes d’un attentat suicide non revendiqué ayant fait au moins 19 tués. La plupart des victimes sont des femmes. L’attentat a visé un centre de formation pour étudiants de la capitale afghane situé dans un quartier peuplé par la communauté hazara. Cette minorité chiite est particulièrement visée par des attaques de l’État Islamique qui les considère comme des hérétiques. 

Au moins 19 personnes, en majorité des filles, ont été tuées vendredi à Kaboul dans un attentat suicide contre un centre de formation d’étudiants situé dans un quartier abritant la communauté minoritaire hazara.

" Les étudiants se préparaient à un examen lorsqu’un kamikaze s’est fait exploser ", a expliqué Khalid Zadran, porte-parole de la police afghane. Selon cette même source, 19 personnes sont décédées et 27 autres ont été blessées.

" La plupart des victimes sont des filles ", a témoigné auprès de l’AFP un étudiant sur place au moment de l’explosion, sans pouvoir préciser si ces victimes avaient été tuées ou blessées.

 

Les Hazaras parlent le Hazaragi, un dialecte du dari, lui-même dialecte du persan. La majorité d’entre eux sont des chiites duodécimains. (AFP)

Environ 600 personnes, selon lui, se trouvaient dans la classe de ce centre de formation pour les examens universitaires.

L’ONG Emergency qui a reçu dans son hôpital 22 victimes, dont 20 femmes, a indiqué qu’elles avaient entre 18 et 25 ans.

" Peu de garçons ont été touchés car ils se trouvaient à l’arrière de la classe et le kamikaze est entré par la porte avant où les filles étaient assises ", a déclaré un autre étudiant Ali Irfani.

Ce rescapé a dit avoir d’abord entendu des coups de feu. Le kamikaze a abattu deux gardiens avant de pénétrer dans la classe, a-t-il précisé.

" Il y a eu une forte explosion puis le chaos, de nombreux étudiants, garçons et filles, ont essayé de s’échapper du bâtiment ", a raconté à l’AFP un commerçant requérant l’anonymat. " C’était une scène horrible. Tout le monde était si effrayé ".

L’éducation des filles visée

" De nombreux élèves ont reçu des éclats à la tête, au cou et dans les yeux ", a également raconté un habitant Asadullah Jahangir, qui a aidé à transporter les victimes vers les hôpitaux.

Le toit de la salle de la classe s’est effondré, les portes et les fenêtres ont été brisées par le souffle de l’explosion.

Cet attentat qui vise une nouvelle fois le secteur de l’éducation s’est produit dans le quartier de Dasht-e-Barchi, (ouest de Kaboul), une zone à prédominance musulmane chiite où vit la communauté minoritaire hazara.

L’éducation est une question extrêmement sensible dans ce pays à majorité sunnite, les talibans empêchant de nombreuses filles de reprendre l’enseignement secondaire (collège et lycée). Les étudiantes sont en revanche admises à l’université, mais leur nombre devrait se réduire avec les années, faute d’avoir été au collège et lycée.

Le groupe État islamique (EI) –autre groupe sunnite opposé également à l’éducation des filles et principale menace du régime taliban– , a revendiqué plusieurs attentats ces derniers mois. Celui de vendredi n’a pas été revendiqué.

Dans la matinée les familles ont afflué dans les différents hôpitaux en pleurs, à la recherche de leurs proches. Des listes des personnes décédées ou blessées ont été accrochées à l’entrée des établissements.

 

Des victimes sont amenées dans un centre médical de la capitale afghane, Kaboul, après un attentat suicide, qui à fait au moins 19 morts dont la plupart sont des femmes, contre un centre de formation pour étudiants de la capitale afghane situé dans un quartier peuplé par la communauté minoritaire hazara. (AFP)

 

" Cruauté inhumaine "

" Nous ne l’avons pas trouvée ici ", s’est inquiétée une jeune femme cherchant sa sœur de 19 ans dans l’un d’eux. " Nous l’appelons mais elle ne répond pas ", se désespérait-elle.

" Attaquer des cibles civiles prouve la cruauté inhumaine de l’ennemi et son absence de normes morales ", a déclaré le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Abdul Nafy Takor.

Le 20 avril dernier, au moins six personnes avaient été tuées et 24 blessées dans deux explosions ayant frappé une école pour garçons dans ce même quartier de l’ouest de la capitale.

Dasht-e-Barchi a été lourdement frappé ces dernières années et depuis le retour au pouvoir des talibans en août 2021. Plusieurs attaques ont été revendiquées par l’EI-K, la branche régionale du groupe jihadiste Etat islamique, qui considère les hazaras comme hérétiques.

En mai 2021, une série d’explosions s’était également produite devant un établissement scolaire pour filles de ce même quartier, faisant 85 morts, en majorité des lycéennes, et plus de 300 blessés.

L’EI, qui avait déjà revendiqué un attentat en octobre 2020 contre un centre de formation (24 morts) dans la même zone, est fortement soupçonné d’avoir mené cette attaque.

 

 

Les talibans sont également accusés de s’en prendre aux hazaras comme lors de leur première gouvernance (1996 à 2001). Leur retour au pouvoir a mis fin à 20 ans de guerre et a entraîné une réduction significative de la violence, mais la sécurité a commencé à se détériorer au cours des derniers mois.

" L’attaque contre l’éducation des Hazaras et des chiites doit cesser. Arrêtez les attaques contre l’avenir de l’Afghanistan, arrêtez les crimes internationaux ", a tweeté le rapporteur spécial de l’ONU sur l’Afghanistan, Richard Bennett.

L’attentat est " un rappel honteux de l’inaptitude et de l’échec total des talibans " à protéger la population afghane, s’est indignée l’ONG Amnesty international.

" Une fois de plus, les terroristes prennent pour cible des civils innocents " a tweeté l’Union européenne condamnant " un nouveau crime odieux ".

Avec AFP