Washington a livré jeudi un sérieux avertissement contre le danger grandissant du groupe paramilitaire russe Wagner qui reçoit désormais de l’armement de Corée du Nord. Les États-Unis ont également annoncé vouloir renforcer les sanctions contre ce groupe. L’administration Biden dénonce en outre l’influence grandissante au Kremlin du chef du groupe, Evguéni Prigojine, qui recrute des prisonniers inexpérimentés pour combattre en Ukraine où ils périssent par milliers.

La Maison-Blanche s’alarme de la montée en puissance du groupe paramilitaire russe Wagner qui, selon elle, devient un " rival " de l’armée régulière russe en Ukraine, et qui reçoit désormais de l’armement de Corée du Nord.

" La Corée du Nord a fait une première livraison à Wagner, qui a payé pour ces équipements. Le mois dernier, (elle) a livré en Russie des obus et des missiles destinés à Wagner ", a dit John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale de l’exécutif américain.

" Dans certains cas, les officiers russes sont en réalité soumis aux ordres de Wagner ", a détaillé John Kirby, porte-parole du Conseil de sécurité nationale US. Il a assuré que les forces de Wagner " mal équipées et mal entraînées ", souffraient de " lourdes pertes " sur le champ de bataille.

Les Etats-Unis estiment que Pyongyang " envisage de livrer plus d’équipement ", a-t-il dit lors d’un entretien avec des journalistes.

" C’est une claire violation des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies. Le fait que le président Poutine demande l’aide de la Corée du Nord montre que la Russie est seule et désespérée ", a commenté pour sa part le chef de la diplomatie britannique James Cleverly.

Le porte-parole de la Maison-Blanche a par ailleurs estimé qu’à l’heure actuelle Wagner comptait 50.000 hommes déployés en Ukraine – 10.000 mercenaires et 40.000 recrutés dans les prisons russes. Et que l’organisation dépensait 100 millions de dollars par mois pour ses opérations dans le pays.

Réputé proche de Vladimir Poutine, Evguéni Prigojine a été un temps l’un des fournisseurs des cuisines du Kremlin, ce qui lui vaut le surnom de " cuisinier de Poutine ".

Washington, qui a déjà pris des sanctions contre cette organisation de mercenaires présente sur plusieurs théâtres de conflit dans le monde, va prendre " dans les prochaines semaines " des mesures supplémentaires, a indiqué John Kirby.

Le groupe paramilitaire est actif en Syrie, en Libye, au Soudan, et en République centrafricaine. Il a été accusé de participer à des exactions à plusieurs endroits.

Les mercenaires du groupe Wagner sont actuellement présents notamment en Centrafrique et au Mali (AFP)

" Il est évident pour nous que Wagner est en voie de devenir une puissance rivale de l’armée russe régulière et d’autres ministères russes ", a encore indiqué le porte-parole, en assurant que l’influence au Kremlin du chef du groupe, Evguéni Prigojine, ne faisait qu' "augmenter ".

" Depuis des mois, l’armée russe compte sur Wagner pour mener le combat dans certaines zones du Donbass et dans certains cas, les officiers russes sont en réalité soumis aux ordres de Wagner ", a détaillé John Kirby.

Il a assuré que les forces de Wagner " mal équipées et mal entraînées ", souffraient de " lourdes pertes " sur le champ de bataille.

Marat Gabidullin est le premier membre de ce groupe paramilitaire à avoir pris la parole à visage découvert, en 2022. (AFP)

Le porte-parole américain a ainsi estimé que Wagner avait perdu 1.000 hommes récemment en Ukraine.

Evguéni Prigojine, qui n’a " aucune considération pour la vie humaine ", " envoie des hommes russes à la boucherie à Bakhmout ", ville du front où les combats font rage, a déclaré John Kirby.

" Il semble s’intéresser beaucoup plus à son influence au Kremlin qu’aux hommes qu’il recrute pour se battre en Ukraine. Tout ce qui compte pour lui est de faire bonne figure auprès (du président russe Vladimir) Poutine ", a-t-il encore asséné.

Recrutement de femmes

Prigojine a déclaré de son côté mercredi que son organisation envisage de recruter des femmes détenues dans les prisons russes et de les envoyer combattre en Ukraine, après avoir fait la même chose avec des hommes.

Le groupe Wagner aurait été créé par le ministère de la Défense, et plus précisément par les services de renseignements militaires. (AFP)

" Pas seulement comme infirmières ou opératrices, mais aussi dans des groupes de saboteurs ou dans des équipes de snipers. On sait tous que cela s’est déjà fait massivement ", a dit M. Prigojine.

Le chef des Wagner faisait manifestement allusion aux femmes tireurs d’élite et à celles présentes dans les groupes de partisans qui ont combattu pendant la Seconde Guerre mondiale et qui étaient mises en avant par la propagande soviétique.

" Nous travaillons en ce sens. Il y a des résistances, mais je pense qu’on en viendra à bout ", a ajouté Evguéni Prigojine, cité par son service de presse sur Telegram.

Il réagissait à un message d’un élu russe de l’Oural qui affirme que des femmes détenues dans une prison de la ville de Nijni Taguil lui ont demandé d’être envoyées sur le front ukrainien pour aider l’armée russe.

Evguéni Prigojine dans le Donbass.

Ces derniers mois, Wagner est soupçonné d’avoir recruté en masse des hommes détenus dans les prisons de Russie et de les avoir ensuite envoyés combattre en première ligne en Ukraine contre la promesse d’une remise de peine et d’émoluments attractifs.

Depuis 2014, ce groupe est accusé de servir dans l’ombre les intérêts du régime du président russe Vladimir Poutine et de commettre des exactions dans de nombreuses zones de conflit, notamment en Syrie et dans des pays africains.

En septembre, Evguéni Prigojine, 61 ans, a reconnu avoir fondé cette organisation après des années de déni et opère désormais en Russie à visage découvert, signe d’une certaine montée en puissance.

Avec AFP