" Nous savions ": un an après le début de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg a raconté, dans une interview à l’AFP, comment il avait acquis la certitude que l’offensive serait déclenchée le 24 février 2022.

" Je suis allé me coucher. Mais la nuit a été très courte, car je savais qu’à un moment donné, dans les heures qui suivraient, quelqu’un allait me réveiller et c’est exactement ce qui s’est passé ", a-t-il confié dans un entretien accordé à l’AFP, une semaine avant le premier anniversaire du début de la guerre déclenchée par Vladimir Poutine.

La réunion de mercredi des ministres de la Défense des pays membres de l’Otan avait traité essentiellement de l’aide militaire à l’Ukraine.

" Vers 4H00 du matin, j’ai été appelé par mon chef d’état-major. Il m’a juste dit brièvement: ils sont là, ce qui signifiait que l’invasion avait commencé. Ce ne fut pas une surprise pour nous, car nous l’attendions ".

De nombreux dirigeants dans le monde ont ignoré les avertissements de l’Otan et gardé l’espoir jusqu’au bout que Moscou ne se risquerait pas à un assaut total. Mais pour le patron de l’Otan, il ne faisait aucun doute que Poutine était prêt à agir.

Une guerre " de très nombreuses années "

L’Otan doit se préparer à une longue confrontation dans sa relation avec la Russie, car Vladimir Poutine ne montre aucune volonté de paix, a-t-il averti. " Le président Poutine veut une Europe différente, une Europe où il peut contrôler ses voisins, où il peut décider ce que les pays peuvent faire ", a déploré M. Stoltenberg, 63 ans.

Le secrétaire US à la Défense Lloyd Austin (gauche) en compagnie du chef d’état-major de l’armée américaine, le général Mark Milley.

" Nous devons être prêts pour le long terme. Cela peut durer de très nombreuses années ", a-t-il estimé. " L’Otan cherchera toujours une meilleure relation. Mais avec le comportement actuel du régime (russe), il n’y a aucun moyen ", a-t-il affirmé.

Le monde a déjà connu une Guerre froide entre Moscou et Washington. La confrontation a duré 42 années, de 1947 à 1989, et s’est terminée avec la chute du mur de Berlin et la dislocation de l’URSS.

La guerre menée par Moscou contre son voisin prooccidental a conduit l’Otan à la plus grande révision de ses défenses depuis l’effondrement de l’Union soviétique.

Depuis l’invasion russe, des dizaines de milliers de soldats de l’Otan ont été déployés dans les pays de son flanc est, et de nombreux alliés européens ont augmenté leurs dépenses de défense.

Une unité mécanisée de l’armée allemande lors d’exercices conjoints avec d’autres pays de l’Otan.

Les alliés ont envoyé des armements pour une valeur de plusieurs dizaines de milliards de dollars en Ukraine, afin de l’aider à résister et à riposter face à la Russie. Ils ont également adopté des sanctions économiques pour couper les financements de la guerre du Kremlin.

Décourager les dirigeants autoritaires

L’agression de l’Ukraine a donné à l’Alliance une nouvelle orientation après le désastreux retrait d’Afghanistan en 2021. " Elle a montré la pertinence et l’importance de l’Otan ", soutient son secrétaire général, en charge depuis neuf ans. Son mandat se termine en octobre 2023.

L’ancien Premier ministre norvégien a réfuté les critiques, accusant l’Otan de n’avoir pas fait davantage pour empêcher l’invasion.

La frontière polonaise avec l’ex-URSS, actuellement au niveau du Bélarus, est un point chaud historique de l’Europe.

" C’est une guerre choisie par le président Poutine. Nous pouvons analyser, nous pouvons discuter, nous pouvons envisager différentes décisions, mais cela n’enlève rien à la responsabilité du président Poutine dans cette guerre ". " Parfois, dans l’histoire, c’est noir et blanc. Parfois, c’est vraiment le bien et le mal ", a-t-il ajouté.

Après une année de combats qui ont fait des dizaines de milliers de victimes dans les deux camps, l’Otan appréhende une nouvelle offensive russe.

" Nous sommes là pour nous assurer que l’Ukraine gagne cette guerre et pour lui fournir des armes, des munitions et le soutien dont elle a besoin ", a-t-il déclaré.

" Si le président Poutine gagne en Ukraine, ce sera une tragédie pour les Ukrainiens. Mais ce sera aussi dangereux pour nous tous, car lui et les autres dirigeants autoritaires seront convaincus que lorsqu’ils utilisent la force militaire, ils peuvent atteindre leurs objectifs ".

Georges Haddad, avec AFP