Ce jeudi 9 mars, des dizaines de milliers d’Israéliens manifestent contre la réforme de la justice qui a fait scandale, accusée de signer la fin de la démocratie en Israël. Des mouvements condamnés par le ministre de la Sécurité nationale pour qui la liberté d’expression ne doit pas troubler l’ordre public.

Aéroport international bloqué, visite officielle perturbée, centre de Tel-Aviv envahi par les manifestants: la mobilisation contre la réforme judiciaire en Israël ne faiblit pas, avec jeudi une nouvelle " journée nationale de résistance contre la dictature ".

Plus de 65.000 personnes manifestent dans l’ensemble du pays à la mi-journée selon une estimation de la chaîne 13 (privée) de la télévision israélienne. Ce chiffre témoigne d’une forte mobilisation à l’échelle de la population israélienne (plus de 9 millions d’habitants).

Les Israéliens manifestent en brandissant le drapeau national contre la réforme judiciaire à Tel Aviv (Photo de Jack GUEZ / AFP)

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, en partance pour une visite officielle à Rome, a dû rallier l’aéroport à bord d’un hélicoptère. Les manifestations ont également contraint le ministre de la Défense américain, Lloyd Austin, à écourter sa visite en Israël.

Arrivé à la mi-journée dans le cadre d’une tournée régionale, M. Austin a rencontré son homologue Yoav Gallant tout près de l’aéroport Ben-Gourion dont l’accès est bloqué depuis plusieurs heures par des centaines de voitures arborant des drapeaux israéliens.

Les passagers voulant accéder aux aérogares ou en sortir sont contraints de marcher avec leurs valises, selon un photographe de l’AFP sur place.

Dans un concert de klaxons, les manifestants scandent " Démocratie ! " et " Liberté ! " face à un important dispositif policier.

A Tel-Aviv, des milliers de personnes arborant également le drapeau israélien manifestent dans le centre de la ville, encadrés par des policiers à pied et à cheval. Les manifestants ont notamment bloqué la principale autoroute urbaine.

Le cri du peuple

" Nous sommes ici aussi pour vous ", chantent les manifestants, certains faisant un cœur avec leurs mains en direction des policiers, selon des journalistes de l’AFP sur place.

Des centaines de rassemblements sont prévus dans tout le pays à l’appel des organisateurs du mouvement de protestation contre la réforme judiciaire qui ont appelé à manifester et bloquer les routes.

" Le droit d’expression n’est pas la porte ouverte à l’anarchie et ne doit pas perturber la vie des citoyens ", a déclaré le ministre de la Sécurité nationale, Itamar Ben Gvir. " Il est interdit de bloquer les axes de circulation principaux ", a-t-il prévenu.

Un manifestant se fait embarquer par les autorités israéliennes (Photo de JACK GUEZ / AFP)

Parmi les plus à droite de l’histoire d’Israël, la coalition mise en place en décembre par M. Netanyahu tente de faire passer une législation qui lui donnerait de fait le pouvoir de nommer les juges et limiterait considérablement les prérogatives de la Cour suprême, notamment dans sa capacité à invalider des lois.

Depuis l’annonce du texte début janvier, des manifestations massives ont eu lieu dans le pays.

Selon ses détracteurs, le texte menace le caractère démocratique de l’Etat d’Israël. Le gouvernement affirme lui que la réforme est nécessaire pour rétablir un rapport de force équilibré entre les élus et une justice " indépendante ", mais pas " omnipotente ", selon les mots de M. Netanyahu, qui accuse la Cour suprême d’être politisée.

Un climat de montée des violences

Sur le front du conflit israélo-palestinien, trois Palestiniens armés parmi lesquels deux combattants du Jihad islamique ont été tués jeudi matin lors d’un échange de tirs avec des forces israéliennes dans le nord de la Cisjordanie occupée.

Selon les forces de sécurité israéliennes, les trois Palestiniens, dont deux recherchés pour des attaques armés contre des Israéliens, ont été tués lors d’une " opération antiterroriste " à laquelle a pris part une unité spéciale.

Le Jihad islamique et le Hamas, autre mouvement islamiste palestinien, ont promis une vengeance.

Ce nouvel épisode survient dans un climat de montée des violences depuis l’entrée en fonctions du gouvernement Netanyahu, et alors que les appels au calme à répétition de l’ONU retentissent dans le désert.

Pancarte pour la sauvegarde de la démocratie israélienne (Photo de JACK GUEZ / AFP)

Le conflit israélo-palestinien a coûté la vie à 75 adultes et enfants palestiniens, combattants et civils, ainsi qu’à treize adultes et enfants israéliens et une Ukrainienne depuis le début de l’année, selon un décompte de l’AFP basé sur des sources officielles des deux parties.

Mardi, l’auteur d’une attaque ayant coûté la vie à deux jeunes colons israéliens le 26 février, a été tué avec cinq autres Palestiniens, lors d’un nouveau raid de l’armée israélienne dans le camp de réfugiés de Jénine, autre ville palestinienne de Cisjordanie.

Touché par des tirs lors de cette opération, un adolescent de 14 ans est mort, a annoncé jeudi le ministère palestinien de la Santé.

Maureen Décor, avec AFP