Tandis que le scrutin du 28 mai se rapproche, le camp de Kemal Kiliçdaroglu, candidat de l’opposition, met tout en œuvre pour convaincre l’électorat féminin de voter pour lui. Sont notamment visées les femmes au foyer, votant traditionnellement pour Recep Tayyip Erdogan.

Dans le bazar de Besiktas à Istanbul, entre les pyramides de fraises et d’olives, les vendeurs à grosse voix et les Stambouliotes en quête de bon prix, une militante s’égosille: " Débarrassons-nous d’Erdogan! "

A l’approche du second tour, l’opposition turque courtise plus que jamais l’électorat féminin, en particulier les femmes au foyer, traditionnellement acquises au chef de l’État.

Au fil des scrutins, les ménagères ont plébiscité celui sous le règne duquel ont été levées les restrictions au port du voile dans la fonction publique et à l’université, à hauteur de 60% lors de la présidentielle de 2018, selon une enquête.

Avec leurs porte-monnaie gonflés de billets dépréciés, toutes connaissent pourtant le prix envolé des oignons et le poids de l’inflation.

Le candidat de l’opposition et chef du CHP social-démocrate et laïc, Kemal Kiliçdaroglu, avec ses vidéos de campagne le montrant assis dans sa cuisine, n’a séduit que 44,9% des électeurs au premier tour et Çigdem Ener, 50 ans et chignon haut, n’en fait pas partie. Son cœur est allé au troisième homme, l’ultranationaliste Sinan Ogan.

" Nous sommes conscients qu’il y a des masses que nous n’arrivons pas à atteindre, notamment les femmes au foyer ", a reconnu la semaine dernière le maire CHP d’Istanbul, Ekrem Imamoglu.

De Van (est) à Eskisehir (centre), des militants et militantes de Kiliçdaroglu tentent de convaincre les électrices, profondément polarisées.

A l’inverse, l’AKP depuis deux décennies a dépêché des femmes frapper aux portes des foyers.

L’ambitieux Recep Tayyip Erdogan, avant d’accéder à la mairie d’Istanbul en 1994, en a fait sa botte secrète et une vitrine pour l’islam politique qu’il prône, malgré les réticences de son parti d’alors (le Refah).

Emine Erdogan, son épouse, fut l’une des cheffes de file de ce militantisme de proximité.

Le contingent d’adhérentes à l’AKP dépasse aujourd’hui les cinq millions.

Malo Pinatel, avec AFP