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La nouvelle loi adoptée mercredi par l’Union européenne sur la restauration de la nature vise à enrayer le déclin de la biodiversité et à mieux contrer le changement climatique, en imposant aux États membres de réparer les écosystèmes abîmés. Un modèle que plusieurs pays devraient suivre pour sauver ce qui reste de l’humanité…

Le déclin de la biodiversité et la perte des écosystèmes sont aussi bien une cause qu’une conséquence du changement climatique. Leur restauration est donc une priorité absolue pour l’avenir de notre planète. Un impératif qui a poussé l’Union européenne à adopter, le mercredi 12 juillet, une loi pour la restauration de la biodiversité dans le cadre des différentes actions qu’elle mène en faveur du climat.

L’objectif de cette législation est de stopper le déclin de la biodiversité et de lutter plus efficacement contre le changement climatique en restaurant les écosystèmes endommagés. Et pour cause: plus de 80% des habitats naturels de l’UE sont dans un état de conservation médiocre ou mauvais, et jusqu’à 70% des sols sont en mauvaise santé en raison de la pollution, de l’urbanisation et de l’exploitation intensive, selon la Commission européenne.

Des normes draconiennes

La loi impose ainsi aux États membres d’instaurer des mesures pour restaurer 20% des terres et espaces marins d’ici à 2030, puis l’ensemble des zones nécessitant une restauration d’ici à 2050. De même, elle interdit toute perte nette d’espaces verts urbains d’ici à 2030. Plus encore, elle stipule que ces espaces soient augmentés d’au moins 5% d’ici à 2050. L’objectif est que chaque agglomération puisse compter 10% d’espaces verts d’ici à cette date. Une condition qui va dans l’optique de la nouvelle stratégie de construction des villes de l’UE: les biocités.

Conformément à cette loi, les tourbières, ces écosystèmes caractérisés par des sols gorgés d’eau et riches en matière organique, doivent également être restaurées, puisque ce sont des puits de carbone naturels précieux. D’ici à 2030, 30% des tourbières drainées utilisées en agriculture devraient donc être restaurées, dont au moins un quart devrait être humidifié à nouveau.

Améliorer l’état des forêts

Bruxelles établit une série de critères pour améliorer l’état des forêts, définissant ainsi la quantité de bois mort nécessaire à ces forêts, le stockage de carbone minimal et les populations d’oiseaux qui doivent y être présentes.

Crédit: Frederick Florin / AFP

En ce qui concerne les cours d’eau, la Commission européenne propose de supprimer certains obstacles, tels que de petits barrages obsolètes, afin d’atteindre "au moins 25.000 km" de cours d’eau "libres" d’ici à 2030, ce qui représente moins de 2% de tous les cours d’eau européens. Ces pratiques permettraient donc d’établir une trame verte et bleue en Europe pour assurer une continuité écologique au sein du continent. La trame verte et bleue est un réseau d’espaces naturels et aquatiques qui vise à préserver la biodiversité et à favoriser la circulation des espèces. Elle comprend des corridors écologiques terrestres (trame verte) et aquatiques (trame bleue) pour maintenir les habitats et assurer la connectivité écologique. Cette approche contribue à protéger la diversité biologique, à renforcer la résilience des écosystèmes et à offrir des espaces de loisirs pour les populations.

Les États membres seraient également tenus d’inverser le déclin des populations de pollinisateurs d’ici à 2030 et de les accroître. Des critères seraient ainsi établis pour évaluer les populations de papillons ou d’oiseaux des champs.

La loi prévoit également l’extension de zones "à haute diversité" avec pour objectif indicatif qu’elles représentent 10% des terres agricoles de l’UE, englobant des éléments tels que les haies, les fossés, les étangs, les arbres fruitiers et la rotation des cultures. Il convient de souligner qu’il s’agit des principes fondamentaux de l’agroforesterie, une pratique agricole qui consiste à intégrer des arbres et des animaux dans les exploitations pour diversifier les revenus agricoles, favoriser la biodiversité et améliorer la résilience des écosystèmes face aux changements climatiques. Elle combine ainsi production agricole et gestion durable des ressources forestières.

Un investissement considérable

D’après l’UE, la biodiversité bénéficiera d’un financement conséquent grâce à la disponibilité d’environ 100 milliards d’euros du budget pluriannuel européen. Ces fonds seront spécifiquement alloués aux plans de restauration. Selon les estimations de Bruxelles, chaque euro investi pourrait générer un retour économique compris entre 8 et 38 euros, grâce aux multiples avantages des écosystèmes sains tels que l’amélioration de la santé humaine, la pollinisation et la qualité des sols, la réduction des risques d’inondations, l’atténuation du changement climatique en capturant le CO2, ainsi que la préservation des populations de poissons. Il est donc clair que ces investissements dans la biodiversité offrent des opportunités économiques considérables tout en préservant notre environnement.

Des avis mitigés

Bien que les conservateurs et l’extrême droite se soient opposés à cette loi, estimant qu’elle nuirait aux agriculteurs et à l’énergie renouvelable, celle-ci a finalement été adoptée par le Parlement européen à une courte majorité: 336 voix pour, 300 voix contre et 13 abstentions. Le texte final est toutefois moins ambitieux que le document initial. Des flexibilités et des exemptions ont de fait été introduites dans la loi, permettant aux États membres de ne pas atteindre, dans certaines situations, les objectifs fixés. De plus, une clause autorisant le report de la réalisation des objectifs en cas de circonstances exceptionnelles a été ajoutée.

Malgré les compromis apportés au texte, les défenseurs de cette loi, qui soulignent l’importance de préserver la biodiversité et de respecter les objectifs environnementaux de l’UE, considèrent que son adoption constitue une étape positive, bien que limitée. Ils espèrent que la législation finale permettra de préserver la biodiversité et d’améliorer les écosystèmes de manière significative.

En effet, des négociations devront encore avoir lieu entre le Parlement européen, la Commission européenne et les États membres pour finaliser cette loi. Les responsables politiques espèrent parvenir à un accord d’ici la fin de l’année afin de répondre aux obligations de l’Union européenne en matière de biodiversité.

Malgré son importance, cette nouvelle loi suscite des interrogations quant à son efficacité. En effet, il est essentiel d’évaluer attentivement les mesures mises en place et de s’assurer qu’elles sont à la hauteur des enjeux environnementaux actuels. La préservation de la biodiversité ne peut pas être sacrifiée sur l’autel de la politique. Cela reste un défi complexe qui nécessite une action ambitieuse et concertée de la part de toutes les parties prenantes.

Au Liban, la biodiversité en déclin

Alors que les débats internationaux se concentrent sur les moyens de préserver la biodiversité mondiale, les responsables libanais sont aux abonnés absents, alors que les écosystèmes du pays se dégradent à vue d’œil au gré des intérêts politiques. Les forêts du Akkar brûlées et braconnées, les arbres séculaires de Deir al-Ahmar abattus, la vallée de Bisri saccagée, les cèdres du Liban meurtris… autant de crimes environnementaux qui continuent d’être commis dans l’indifférence générale des responsables. Aucun redressement économique ne saurait compenser les pertes écosystémiques. Il est temps d’agir pour sauver notre biodiversité, qui est l’essence même de l’ADN des Libanais!

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