L’Ukraine a été au centre des discussions du sommet de l’Union européenne et de l’Amérique latine, provoquant des divergences entre les deux parties. Plusieurs pays d’Amérique latine se sont montrés réticents à condamner fermement la Russie.

Le sommet des dirigeants des pays de l’Union européenne et d’Amérique latine à Bruxelles devait être une occasion de rapprochement, mais des divergences sur la guerre déclenchée par la Russie en Ukraine ont plombé les discussions.

Dans leur déclaration finale, les leaders ont exprimé leur " profonde préoccupation sur la guerre en cours contre l’Ukraine ", sans toutefois mentionner Moscou. Même cette formulation a minima n’a pu être endossée à l’unanimité, le Nicaragua refusant de s’y associer.

La rédaction de ce communiqué, dans lequel les Européens tenaient à inclure une référence à l’agression russe, a suscité de longs pourparlers, avant et pendant ce sommet de chefs d’État et de gouvernement de l’UE et de la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes (CELAC) qui s’est tenu lundi et mardi dans la capitale belge.

" Ce sommet UE-CELAC a ressemblé à un nouveau départ entre de vieux amis ", s’est félicitée la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. " Nous vivons une période de grands changements géopolitiques et des amis comme l’UE et ses partenaires d’Amérique latine et des Caraïbes doivent se rapprocher ", a-t-elle dit.

Le président du Conseil européen Charles Michel a reconnu qu’il n’était " pas chose aisée " de mettre d’accord 60 pays sur des sujets comme la guerre en Ukraine. Mais " on a constaté que ce qui nous unit est probablement beaucoup plus fort que ce qui nous sépare ", a-t-il assuré.

Seul le Nicaragua était " réticent " à la dernière version du texte, a indiqué le président français Emmanuel Macron lors de la seconde journée de ce sommet réunissant une cinquantaine de chefs d’État et de gouvernement de l’UE et de la Communauté des États latino-américains et des Caraïbes (CELAC).

Plusieurs sources diplomatiques avaient aussi évoqué pendant les discussions des réserves du Venezuela et de Cuba, autres soutiens de Moscou.

Emmanuel Macron a souligné le rôle joué par le président brésilien Luiz Inacio Lula da Silva dans ces pourparlers, estimant qu’il faisait " partie de ceux qui permettent de bâtir des ponts ".

Le dirigeant brésilien a dans le passé essuyé des critiques au sein de la communauté internationale en affirmant à plusieurs reprises que les responsabilités du conflit étaient partagées, même s’il a récemment condamné l’invasion russe. Son idée de former un " groupe de la paix " de pays neutres médiateurs du conflit avait été accueillie fraîchement.

Le Brésil s’est refusé à imposer des sanctions contre la Russie de Vladimir Poutine, des mesures qui selon Lula " pénalisent les plus vulnérables ".

" Je pense qu’il est maintenant parfaitement lucide sur la nature de cette guerre et ses conséquences alimentaires ou autres ", a déclaré Emmanuel Macron en évoquant son homologue brésilien.

Les pays latino-américains avaient indiqué avant le sommet qu’ils ne souhaitaient pas voir le sujet de l’Ukraine monopoliser les discussions au détriment d’autres priorités, espérant notamment faire avancer l’accord entre l’UE et le Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay). Certains pays caribéens voulaient pour leur part discuter de réparations pour la traite des esclaves.

Espérant une déclaration " claire " sur l’Ukraine, le Premier ministre irlandais Leo Varadkar avait estimé plus tôt qu’il valait " parfois mieux ne pas avoir de conclusions du tout qu’une formulation qui ne veut rien dire ".

De nombreux pays du Sud " font valoir qu’il existe d’autres conflits dans le monde et j’entends cela. Et ils disent que d’autres conflits dans le monde n’ont sans doute pas le même niveau d’attention que l’Ukraine, ou que certains pays ne sont pas cohérents dans leur approche des conflits ", avait-il commenté.

Le président colombien Gustavo Petro a concédé qu' "il ne fait (sait) aucun doute qu’il s’agit d’une invasion impérialiste de l’Ukraine ". " Mais comment appelez-vous celle de l’Irak, de la Libye ou de la Syrie ? Pourquoi celle-ci suscite-t-elle cette réaction, alors que les précédentes au cours de ce siècle ne l’ont pas fait ? ", a-t-il poursuivi.

Marie de La roche Saint-André, avec AFP