Le régime militaire en place à Niamey continuait à envoyé des signaux contradictoires en annonçant vouloir poursuivre pour le président renversé Mohamed Bazoum, dimanche 13 août. Cette annonce intervenait dans la foulée d’une autre, où les putschistes annonçaient rester ouverts à la voie des négociations.

Les auteurs du coup d’Etat au Niger soufflent le chaud et le froid, en annonçant ce week-end d’abord être ouverts à la négociation, puis ensuite vouloir poursuivre pour " haute trahison " le président renversé Mohamed Bazoum.

Dans le même temps, la Maison de la presse du Niger, association regroupant les journalistes, s’inquiète des " pressions, menaces, intimidations " à l’encontre des journalistes. " Qu’ils s’agissent des journalistes locaux ou des correspondants étrangers, pourtant accrédités par les autorités nigériennes, ils sont nombreux à exercer leur profession dans une insécurité grandissante ", ajoute-t-elle dans un communiqué.

Dimanche soir, le régime militaire a affirmé avoir réuni les " preuves pour poursuivre devant les instances nationales et internationales compétentes le président déchu et ses complices locaux et étrangers, pour haute trahison et atteinte à la sûreté intérieure et extérieure du Niger ".

Il appuie ses accusations sur des " échanges " de M. Bazoum avec des " nationaux ", des " chefs d’Etat étrangers ", et des " responsables d’organisations internationales ".

M. Bazoum s’est entretenu plusieurs fois avec des représentants de pays alliés au Niger avant le coup d’Etat, comme les Etats-Unis, et des membres de son entourage politique.

Les militaires assurent également que M. Bazoum " reçoit régulièrement la visite de son médecin ".

Les menaces de poursuites judiciaires contre le président Bazoum pour " haute trahison " constituent une nouvelle " provocation " des autorités militaires à Niamey, a dénoncé lundi la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao) dans un communiqué.

Les États-Unis se sont élevés lundi contre les perspectives, évoquées par le régime militaire dimanche, de poursuites judiciaires visant le président déchu Mohamed Bazoum, estimant que cela ferait monter la tension.

" Nous sommes extrêmement consternés par les informations selon lesquelles on rajoute un cran à la détention injuste du président Bazoum ", a déclaré à la presse le porte-parole du département d’Etat Vedant Patel, ajoutant que cela " ne contribuera certainement pas à une résolution pacifique de cette crise ".

Le régime militaire a dénoncé " les sanctions illégales, inhumaines et humiliantes de la Cedeao (Communauté économique des Etats d’Afrique de l’Ouest) ", prises lors d’un sommet de l’organisation le 30 juillet, au cours duquel avait aussi été fixé un ultimatum de 7 jours pour rétablir l’ordre constitutionnel, sous peine d’un recours à la force, qui n’a pas appliqué.

Ces déclarations surviennent après l’accueil par le régime militaire d’une délégation de chefs religieux nigérians musulmans samedi, menée avec l’accord du président nigérian Bola Tinubu, également à la tête de la Cedeao, pour " apaiser les tensions créées par la perspective d’une intervention militaire " de l’organisation.

Jeudi dernier, lors d’un nouveau sommet, les dirigeants de la Cedeao avaient réaffirmé privilégier la voie diplomatique pour rétablir le président Bazoum dans ses fonctions, tout en ordonnant une mobilisation et un déploiement de la " force en attente " de la Cedeao.

Un des proches de M. Bazoum avait assuré que le régime militaire avait brandi " la menace " de s’en prendre à lui si une intervention armée avait lieu.

Selon le général Tiani, cité dans le communiqué de la médiation nigériane, les militaires ont renversé le président Bazoum " en raison d’une menace imminente qui aurait affecté non seulement la République du Niger, mais aussi le Nigeria ".

Abdourahamane Tiani avait justifié le coup d’Etat par " la dégradation sécuritaire " dans le pays, miné par la violence de groupes jihadistes comme le Mali et le Burkina voisins, également dirigés par des militaires et qui ont affiché leur solidarité avec Niamey.

Malo Pinatel, avec AFP