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Les accords d’Oslo ont 30 ans. Ils avaient posé les jalons de ce qui devait être un long processus de paix entre Israël et les Palestiniens ayant conduit, en 1993, à établir le principe de la création d’une Autorité palestinienne en Cisjordanie et à Gaza. Ils étaient supposés enclencher un règlement progressif, étalé sur plusieurs années, des questions fondamentales en suspens dans le conflit israélo-palestinien. Malheureusement, ces accords n’ont jamais pris leur essor.

Le processus d’Oslo, qui a conduit aux accords du même nom, puise sa source dans une initiative prise, secrètement, en janvier 1992 par le chef du département politique de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). Lors d’une visite à Oslo, il lance discrètement l’idée de discussions informelles avec Israël. Il sollicite sur ce plan la contribution d’un diplomate norvégien ayant une longue expérience, Terje Roed-Larsen, pour l’organisation de rencontres secrètes entre les deux parties.

Le processus s’accélère après l’arrivée au pouvoir en Israël du leader du Parti travailliste, Yitzhak Rabin, en juillet 1992. Les discussions bipartites informelles sont alors mises sur les rails à Oslo par le vice-ministre israélien des Affaires étrangères, Yossi Beilin, et trois hauts responsables palestiniens favorables à une ligne d’action pragmatique, Mahmoud Abbas (actuel président de l’Autorité palestinienne), Ahmed Qoreï, et Yasser Abed Rabbo (un haut responsable du Front démocratique de libération de la Palestine, FDLP, de mouvance marxiste, alors présidé par Nayef Hawatmeh). Ces discussions sont ainsi lancées alors que, dans le même temps, des négociations multilatérales de paix se tiennent publiquement à Madrid.    

Trois phases

Les premiers accords d’Oslo, signés le 13 septembre 1993, ont entériné le processus de paix israélo-palestinien sur base de l’option de deux États.

Ces accords ont vu naître l’Autorité palestinienne (AP) et ont instauré une autonomie limitée pour les Palestiniens dans la bande de Gaza et la Cisjordanie.

Les accords d’Oslo se déclinent en trois phases:

A – La Déclaration de principes du 13 septembre 1993 qui pose les bases d’un régime d’autonomie palestinienne en Cisjordanie et Gaza, et définit les principes des négociations.

La déclaration de principes négociée à Oslo se concentre essentiellement sur l’établissement d’une Palestine autonome en Cisjordanie et dans la bande de Gaza en échange de la reconnaissance par l’OLP du droit d’Israël de vivre en paix.

Le processus comprend, entre autres, les dispositions suivantes: le retrait ou le redéploiement des forces de sécurité israéliennes en Cisjordanie et dans la bande de Gaza; le transfert immédiat à l’autorité palestinienne des services de base, comme la santé et l’éducation, et le début d’une période de transition de cinq ans pour aboutir à l’autonomie.

B – Oslo I ou l’accord de Jéricho-Gaza, le 4 mai 1994, qui investit la nouvelle Autorité palestinienne de pouvoirs limités.

C – Oslo II (l’Accord intérimaire israélo-palestinien sur la Cisjordanie et la bande de Gaza), le 28 septembre 1995, signé par Yitzhak Rabin, Shimon Peres et Yasser Arafat. Cet accord négocie un découpage des territoires palestiniens en trois zones, avec des contrôles israéliens et palestiniens mis en place de façon différente.

Le règlement des questions clés

Les dispositions de cet accord sont bien plus précises que la première version et incluent: la garantie de négociations sur les questions en suspens (Jérusalem, les réfugiés, les colonies et les frontières) qui devaient commencer au plus tard le 4 mai 1996; la prévention d’actes de terrorisme et d’hostilité des deux côtés; l’approbation d’un règlement permanent à la date limite du 4 mai 1999.

Les négociateurs devaient alors mettre la dernière main au règlement de questions clés, telles que le statut de Jérusalem ou celui des réfugiés palestiniens, avec comme objectif la création d’un État palestinien vivant en paix aux côtés d’Israël.

Les accords devaient ainsi mettre en œuvre l’autonomie palestinienne dans le cadre d’un État palestinien indépendant d’Israël. Cela impliquait qu’Israël reconnaîtrait le droit des Palestiniens à bénéficier d’une souveraineté nationale dans un cadre géographique limité.

Les obstacles à ces accords

Ces accords d’Oslo ont toutefois fait face à plusieurs obstacles. Côté israélien, d’abord, l’extrême droite ne voulait pas faire de concessions à l’OLP et les colons israéliens craignaient d’être expulsés des colonies.

Dans ce contexte, le Premier ministre israélien Yitzhak Rabin a été assassiné le 4 novembre 1995 par un extrémiste israélien et les élections israéliennes de 1996 ont catapulté au pouvoir Benjamin Netanyahu, un critique acerbe des accords d’Oslo. Cela a nécessité l’intervention du président américain Bill Clinton, en 1998, aboutissant au mémorandum de Wye River subordonnant la reprise du processus d’Oslo à des mesures prises par l’Autorité palestinienne pour mettre un terme à la violence.

Cet accord a provoqué la chute du gouvernement Netanyahu. Un an plus tard, sous Ehud Barak, le processus reprend, mais la méfiance et la tension sont déjà bien ancrées des deux côtés. Les Israéliens ne font plus confiance à l’AP pour prévenir les violences et les attentats.  Et les Palestiniens, à qui on avait promis l’autonomie dans un délai de cinq ans, se sentent dupés.

Entretemps, les groupements palestiniens radicaux, tels que Hamas et le Jihad islamique, soutenaient que la solution des deux États forcerait les Palestiniens à renoncer aux terres de 1948. Pour eux, les accords étaient irrecevables, et le Hamas se présentait à ce moment-là comme la dernière ligne de défense de la résistance palestinienne face à ceux qui acceptaient de mener des négociations.

L’intifada palestinienne

La construction de colonies côté israélien ne s’arrêtait pas. À l’époque de la signature du premier document en 1993, il y avait 110.000 colons en Cisjordanie, aujourd’hui le nombre se rapproche de 700.000 (source: Haut-Commissariat des droits de l’homme). Et les attentats suicide du Hamas se sont poursuivis en territoire israélien jusqu’en 2006. C’est à cette date que le mouvement remporte les élections législatives à Gaza face à l’Autorité palestinienne et privilégie à partir de là une stratégie de tirs de roquettes sur les villes israéliennes frontalières.

La visite d’Ariel Sharon, chef de l’opposition, à la mosquée d’al Aqsa en 2000 déclenche un soulèvement et la nouvelle intifada (Intifada al-Aqsa). La violence qui s’ensuit interrompt le processus d’Oslo qui ne se remettra jamais sur les rails.

Trois décennies plus tard, et à l’aube d’une énième guerre entre le Hamas et Israël, la création d’un État palestinien est plus que jamais problématique alors que l’option des deux États, probablement irréalisable, reste malgré tout la seule voie possible à une paix durable au Proche-Orient.