Les Sénégalais se préparent pour les élections municipales du 23 janvier dans un pays où ce scrutin de mi-mandat sera le premier depuis la réélection de Macky Sall, en février 2019. Le suffrage est vu comme un premier grand test avant la présidentielle de 2024. Les législatives suivront en juillet.

Rétablissement du poste de premier ministre

Dès le 1er février, le président sénégalais Macky Sall a pris ses fonctions de leader de l’Union Africaine (UA) pour une année.  Après avoir annulé il y deux ans le poste de premier ministre afin, à ses dires, "d’accélérer la cadence des nominations et avancer en Fast Track," arguant " qu’il ne voulait pas que la personne qui se trouve à ce poste puisse penser que sa fonction serait un tremplin pour les élections présidentielles ",  Sall a rétabli le poste de premier ministre le 24 novembre et le chef du gouvernement sera désigné après les élections locales du 23 janvier.

Élus pour cinq ans au suffrage universel direct, les maires seront choisis selon deux modes : un scrutin proportionnel et un scrutin de liste majoritaire à un tour. Ainsi, la première liste qui l’emporte, d’une seule voix ou plus, donne à sa tête de liste l’assurance de devenir maire. Pour Aissatou Mbaye, comptable à Dakar, "ce  type de scrutin favorise les coalitions qui, plus elles sont grandes, plus elles assurent la victoire." Mais aussi c’est à Dakar où 7 candidats vont s’affronter que tout se joue avec 4 millions de Dakarois qui représentent à eux seuls, le quart de la population.

Au sud du Sénégal, à Casamance, dans la capitale Ziguinchor, la participation de l’ancien candidat à la présidentielle Ousmane Sonko, leader charismatique du Pastef (Parti patriote) est une première dans un scrutin local.

Problème sociaux 

Si de nouvelles perspectives s’annoncent dans le champ politique au Sénégal cette année, les problèmes sociaux continuent de s’aggraver. Pour Kor Camara, interprète et traducteur assermenté, "la vie quotidienne est devenue un cauchemar pour les Sénégalais, le décalage entre riche et pauvre s’est exacerbé ces vingt dernières années. Depuis l’accession au pouvoir d’Abdoulaye Wade en 2000, il y a eu ce capitalisme sauvage et les citoyens sénégalais ont du mal, encore plus qu’avant, à joindre les deux bouts."

Camara déplore que "le problème majeur est qu’il n’existe pas de distribution équitable des richesses et des ressources. Il n’y a pas un système social performant pour aider les classes les plus défavorisées". Le secteur informel occupe une place prépondérante dans le pays générant d’après la Banque Mondiale, 97% des créations d’emplois dans un pays où le taux de chômage atteint 54%.

Avec  l’économie grise, ces activités productrices de biens et services qui échappent au regard ou à la régulation de l’État, le gouvernement a du mal à recenser les gens qui ont vraiment besoin d’aide sociale. Une grande partie de la population sénégalaise vit de petits boulots, vendeurs à la sauvette sans autorisation dans le domaine public, sur le trottoir, les chaussées, dans les halles et les marchés. L’État est incapable de circonscrire la myriade de jeunes marchands ambulants et cette masse de gens a du mal à survivre au quotidien.

Interrogé par IciBeyrouth, Fode Babou, marchand ambulant qui circule un peu partout dans le centre de la capitale en vendant une panoplie d’objets hétéroclites allant des produits nettoyants jusqu’au café, réfute la position de "la mairie qui nous reproche d’occuper l’espace public, mon travail est respectable et honnête et je ne fais rien de mal, je gagne mon pain quotidien ".

Camara déplore que, "la détérioration des services de l’État ait lieu dans différents secteurs, " dans le domaine médical, les gens ont du mal à se soigner, le système éducatif aussi pâtit des grèves régulières, récemment c’était le tour des boulangers de se mettre en grève. Socialement, la vie est devenue très difficile. Il y a une baisse de la qualité de vie ces dernières années. Même le secteur des transports s’est mis en grève durant trois jours en décembre."

Le TER

En effet, les transports sont pénibles à Dakar où des bouchons monstres ralentissent les échanges et les déplacements des gens et des marchandises. Pour désengorger Dakar et ses monstrueux embouteillages, le train express régional (TER) de Dakar dont les travaux de construction ont démarré début 2017, a été mis en service le 27 décembre passé. Lancé pour moderniser les transports, le TER a coûté le montant exorbitant de 780 milliards de francs CFA (plus de 1 milliard d’euros) financés par l’État du Sénégal ainsi que des prêts, notamment français.

Aminata Mbaye qui travaille dans une poissonnerie à Dakar, est contente de gagner du temps, "maintenant je passe une vingtaine de minutes sur ce tronçon de 35 kilomètres de Dakar à Diamniadio, alors que ça me prenait des heures en car."

Le TER est un exutoire pour les Dakarois et les habitants de Diamniadio. Reste à savoir si la maintenance et le contrôle des usagers qui ne sont pas habitués à des restrictions de transport de viandes ou de poissons odorants dans un pays qui vient d’étrenner le transport rapide sur rail, pourront voyager en train sans changer leurs habitudes. Entre les problèmes sociaux, les perspectives électorales municipales et législatives de 2022 et un système politique qui semble chercher sa voie entre un président et un premier ministre, les Sénégalais ne voient pas le bout du tunnel.

 

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