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Depuis le déclenchement de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre dernier, la possibilité d’un règlement du conflit dans un avenir proche demeure lointaine. La proposition d’une solution à deux États, souvent présentée comme l’option idéale sur le plan théorique, se heurte à des obstacles pratiques qui rendent sa concrétisation complexe et incertaine.

Cette théorie a été évoquée par le président américain Joe Biden qui a souligné la nécessité d’amorcer "le début d’une solution à deux États". Parallèlement, la présidente de la Commission européenne, Ursula Von Der Leyen, a affirmé que la perspective d’une solution politique est impérative pour instaurer la paix, précisant que la "solution à deux États" demeure incontournable. De même pour le Premier ministre britannique Rishi Sunak. Cependant, les récentes déclarations du Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou ajoutent une couche de complexité au débat. Selon lui, les accords d’Oslo constituaient une erreur qui ne devrait pas être répétée.

Face à ces opinions divergentes et aux défis pratiques rencontrés sur le terrain, il est crucial de se demander si la solution à deux États, bien qu’idéale sur le plan théorique, est actuellement applicable dans le contexte complexe et instable de la région.

L’un des premiers obstacles majeurs entravant la recherche d’un règlement au conflit israélo-palestinien réside dans l’extrémisme politique qui caractérise les deux parties impliquées. D’une part, la société israélienne a connu un virage politique marqué vers la droite depuis l’assassinat de Yitzhak Rabin en 1995, particulièrement accentué au cours des premières années du nouveau millénaire. Ce dérapage a été alimenté par divers facteurs, dont une série de conflits avec les voisins de la région et l’importance accordée au facteur sécuritaire au sein de la population israélienne. D’ailleurs, le gouvernement israélien actuel est considéré comme le plus extrémiste de l’histoire d’Israël.

D’autre part, du côté palestinien, la diminution de l’influence de l’Autorité palestinienne (AP) au cours des dernières années, notamment sous la présidence de Mahmoud Abbas, a créé un sentiment de vide politique. Du fait de la conjonction d’intérêts communs entre le Hamas et les gouvernements israéliens de droite, la popularité de l’AP a fortement décliné. L’incertitude autour de la succession de M. Abbas, accentuée par des préoccupations quant à sa capacité à rester en fonction, a ouvert la voie à l’influence croissante du Hamas. Ce mouvement fondamentaliste, considéré comme une organisation terroriste en Occident, revendique l’intégralité de la Palestine historique, allant de "la rivière à la mer" (du Jourdain à la Méditerranée). La montée en puissance du Hamas ajoute une dimension supplémentaire d’intransigeance et de complexité à la quête d’une solution pacifique dans la région et met en difficulté l’AP qui a vu le jour à la suite des accords d’Oslo conclus sous la direction de Yasser Arafat.

Résoudre le conflit israélo-palestinien requiert une approche stratégique et réfléchie. Du côté israélien, il est crucial de trouver une issue à ce conflit qui perdure depuis de nombreuses années, semblant s’enliser dans une impasse. Maints observateurs appellent à la tenue d’élections anticipées visant à défaire, dans les urnes, la coalition du Likoud et des partis d’extrême droite. Ces analystes estiment qu’une victoire d’une coalition de gauche et de centre-gauche pourrait créer un environnement propice à la négociation avec le côté palestinien, explorant ainsi la possibilité d’une solution à deux États. Cependant, la question primordiale réside dans l’émergence d’un nouveau leadership capable d’orchestrer une telle manœuvre. Qui se profilera pour la réalisation de cette tâche, à l’instar du leadership que représentaient Yitzhak Rabin et Shimon Peres?

Du côté palestinien, les observateurs soulignent la nécessité de revitaliser l’Autorité palestinienne par le biais de nouvelles élections qui seraient enclenchées par le départ de Mahmoud Abbas au profit d’un candidat capable de remettre sur pied l’AP. Parmi les noms évoqués, celui du détenu Marwan Barghouti suscite l’attention, bien que son acceptation de cette tâche colossale et sa disposition à négocier avec la partie israélienne demeurent incertaines. Surtout qu’il est incarcéré en raison de son soutien à une résistance armée palestinienne. La question de savoir qui sera le nouveau leader palestinien ayant l’envergure de Yasser Arafat demeure ainsi entière.

Dans le cadre de ce scénario hypothétique, il faudrait envisager la cessation des hostilités ou trouver une issue à la guerre, ce qui n’est pas garanti dans un avenir proche. Sans compter qu’il est impératif de prendre en considération la question complexe de l’intervention iranienne, élément crucial dans le maintien du Hamas en tant qu’acteur central du projet d’unification des champs de bataille régionaux. La perspective de son retrait ou de son affaiblissement s’avère une entreprise délicate que le régime iranien aura du mal à accepter.

Un dernier élément crucial à prendre en considération est la présence significative des colons israéliens en Cisjordanie, dont le nombre a considérablement augmenté depuis la signature des accords d’Oslo en 1993, passant de 116.300 à 465.400 en 2021 selon les chiffres officiels – bien que certaines estimations indépendantes évoquent des chiffres oscillant entre 800.000 et 1.000.000. Ces résidents, installés depuis de nombreuses années en Cisjordanie, sont extrêmement attachés à leur terre, rendant toute tentative de les déloger en vue d’un relogement une entreprise d’une ampleur colossale. Cette réalité démographique soulève des questions complexes quant à la faisabilité et la viabilité pratique de la solution à deux États pour tourner la page du conflit israélo-palestinien.

De ce fait, bien que l’idéal théorique demeure la recherche d’une solution à deux États, la réalité pratique semble être plus complexe. Des obstacles idéologiques, politiques et démographiques entravent un règlement durable. Les défis posés par l’extrémisme politique, les considérations relatives aux colons en Cisjordanie et les tensions géopolitiques régionales confirment la nécessité d’une approche nuancée et pragmatique pour envisager toute perspective de paix globale.

Aujourd’hui, la priorité reste de cesser les hostilités entre le Hamas et Israël qui durent depuis le 7 octobre dernier, au moins pour des raisons humanitaires. Chose qui ne semble pas gagnée d’avance: Israël parle d’une guerre qui durerait jusqu’à la fin de l’année 2024…

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