Les chrétiens catholiques ont célébré le Vendredi saint à Jérusalem dans un contexte particulier, en raison du conflit en cours dans la région.

La guerre à Gaza pèse sur les célébrations du Vendredi saint à Jérusalem où les pèlerins catholiques sont moins nombreux que les années précédentes pour venir accomplir le chemin de Croix dans la Vieille Ville, sur les pas même de Jésus, selon la tradition.

La sécurité était renforcée dans les ruelles étroites de l’ancienne ville fortifiée, sacrée pour les juifs, les chrétiens et les musulmans, et située à Jérusalem-Est, occupée et annexée par Israël depuis 1967.

Hasard du calendrier, des milliers de Palestiniens observant le ramadan, mois sacré du jeûne musulman, se sont également rendus à la mosquée Al-Aqsa pour la grande prière du vendredi.

Des fidèles portent une croix en bois dans l’église du Saint-Sépulcre lors de la procession du Vendredi saint sur la Via Dolorosa (voie de la souffrance) dans la vieille ville de Jérusalem, le 29 mars 2024. (GIL COHEN-MAGEN / AFP)

" C’est très émouvant d’être ici en ce Vendredi saint. On ressent une profonde tristesse, probablement accentuée par ce qui se passe " dans la bande de Gaza, dit l’Australien John Timmons, soulignant avoir réfléchi à deux fois avant de se rendre dans la Ville sainte, vu les circonstances.

" Endroit très spécial "

À Jérusalem, la procession solennelle du chemin de Croix, le long de la Via Dolorosa, ou " chemin de la souffrance ", commence à l’endroit où, selon la tradition, Ponce Pilate a condamné à mort Jésus.

Catholiques et protestants célèbreront Pâques dimanche. Pour les orthodoxes, la fête marquant la résurrection du Christ tombe cette année le 5 mai.

Dans les ruelles étroites en pierres blanches, l’Italien Mario Tioti dit avoir ressenti que la sainteté de la ville transcendait toutes les tensions. " C’est un endroit très spécial. On peut y sentir le Christ. Il a marché ici ", a dit cet homme de 64 ans.

Des scouts portent une statue de Jésus-Christ lors de la procession du Vendredi saint dans la vieille ville de Jérusalem, le 29 mars 2024. (RONALDO SCHEMIDT / AFP)

Dans la foule, des fidèles de tous âges, des hommes en soutane, d’autres portant une croix en bois, des religieuses et des touristes en sac à dos.

Marchant pieds nus sur les pavés anciens, l’Américain James Joseph, dit " Jésus ", figure haute en couleur de Jérusalem habillé d’une tunique blanche, a comparé la guerre à Gaza à l’épisode évangélique du " massacre des Innocents ", dans lequel Hérode, roi de Judée, ordonne la mort de milliers de bébés.

" La souffrance subie par ces innocents (à Gaza et en Israël) est tragique, mais ce n’est pas pour rien ", a-t-il déclaré à l’AFP à l’église du Saint-Sépulcre, bâtie selon la tradition chrétienne sur le lieu même où Jésus a été crucifié et enterré.

Pour M. Joseph, le message de Pâques est que " Dieu transforme la souffrance (du Vendredi saint) en résurrection. C’est mystérieux (…) mais il est mort pour nous sauver ".

" Comme à Disneyland "

À l’intérieur de la basilique, des fidèles entonnent des chants, allument des cierges, embrassent la pierre de l’onction où le Christ aurait été lavé et enveloppé dans un linceul avant la mise au tombeau.

Des Palestiniens se rendant à la mosquée Al-Aqsa, troisième lieu saint de l’islam, ont par ailleurs raconté leurs difficultés pour y accéder.

Linda Al-Khatib a expliqué que le dispositif de sécurité israélien avait transformé un trajet de cinq minutes qu’elle effectuait normalement depuis son village, situé juste à l’extérieur de Jérusalem, en Cisjordanie occupée, en un calvaire de 45 minutes de contrôles et de barrières.

Des scouts et des ecclésiastiques participent à la procession du Vendredi saint dans la vieille ville de Jérusalem, le 29 mars 2024. (RONALDO SCHEMIDT / AFP)

" Je suis venue prier parce que c’est un jour très spécial, surtout pendant le ramadan. Mais je suis très triste, il n’y a pas beaucoup de visiteurs et il n’y a personne. J’ai eu peur pendant tout le trajet ", a-t-elle confié.

Une religieuse d’origine indienne vivant à Bethléem depuis 13 ans a dit à l’AFP n’avoir jamais vu de telles difficultés et ressenti de telles tensions pendant la Semaine sainte, pour entrer dans la ville.

Mais pour certains, la guerre qui se répercute sur la fréquentation touristique en baisse est un cadeau venu d’en haut. " La dernière fois que je suis venu, il y avait beaucoup, beaucoup de monde qui essayait d’entrer dans le tombeau (du Christ) ", se souvient l’Américain Timothy Curtiss, originaire du Texas: " C’était comme à Disneyland. Cette année, on entre directement ".

Safaa Kanj, avec AFP