La Cour suprême des États-Unis entendait, jeudi, des arguments sur la question de savoir si Donald Trump, en tant qu’ancien président, devrait être immunisé contre les poursuites pénales pour des actes commis pendant son mandat.

La Cour suprême américaine devrait, sauf immense surprise, rejeter l’immunité pénale invoquée par Donald Trump en tant qu’ex-président après les débats jeudi, mais la portée de sa décision dépendra essentiellement de sa célérité à statuer.

En décidant le 28 février de se saisir de cette question, la plus haute juridiction des États-Unis a encore différé la tenue du procès fédéral de l’ex-président républicain pour tentative d’inverser illégalement les résultats de l’élection de 2020 remportée par le démocrate Joe Biden.

Visé par quatre procédures pénales distinctes, Donald Trump fait feu de tout bois pour passer en jugement le plus tard possible, en tout cas après le scrutin présidentiel de novembre auquel il est candidat.

L’intéressé, jugé à New York depuis le 15 avril pour paiements suspects lors de la campagne de 2016, a déploré que le juge à ce procès ne l’ait pas dispensé de comparaître ce jour-là pour assister aux débats à la Cour suprême, les derniers de la session qui s’achève le 30 juin.

Ce procès à New York pourrait être le seul à connaître un dénouement avant le vote. L’affaire la plus lourde politiquement, le dossier fédéral pour l’élection de 2020 instruit par le procureur spécial Jack Smith, est suspendue jusqu’à ce que la Cour suprême tranche sur cette question d’immunité pénale d’un ancien président.

La défense souligne qu’aucun prédécesseur de Donald Trump n’a été poursuivi pénalement.

"Cette inculpation est une première historique à cause de la particulière gravité du comportement présumé", réplique le procureur spécial dans ses arguments écrits. "La gravité, la portée et les dégâts causés à la démocratie par les crimes allégués sont uniques dans l’Histoire américaine", insiste-t-il.

Décision unanime?

L’immense majorité des experts juridiques prédit à Donald Trump un échec cuisant, comme en première instance puis en appel, malgré la majorité conservatrice de la Cour suprême, dont il a nommé trois des neuf membres.

Steven Schwinn, professeur de droit constitutionnel à l’Université de l’Illinois à Chicago, indique à l’AFP s’attendre à "une décision majoritaire, et peut-être unanime, contre Trump".

"Mais même si la Cour administre à Trump une défaite décisive et sans appel, je pense que l’accusation aura fort à faire pour parvenir au procès avant l’élection", précise-t-il.

Car pour que le procès, initialement prévu en mars et reporté sine die en raison de la saisine de la Cour suprême, puisse se tenir, il faudrait que les neuf juges se prononcent à brève échéance.

"Il reste une fenêtre mais elle est étroite et elle se referme. Ils doivent agir rapidement, auquel cas il y a une chance que le procès puisse commencer à l’automne, fin août ou début septembre", explique à l’AFP l’ex-procureur fédéral Randall Eliason, professeur de droit pénal à l’université George Washington.

"La Cour doit vraiment tenir compte du fait qu’il s’agit d’un dossier unique", estime-t-il. "Nous n’avons jamais eu auparavant de situation dans laquelle un accusé a potentiellement la possibilité d’annuler sa propre inculpation, s’il gagne l’élection. Et alors, il n’y aura jamais de procès", prévient-il.

"C’est ce qui en fait un dossier très particulier qui justifie une décision vraiment rapide", conclut Randall Eliason.

S’il était de nouveau élu, Donald Trump pourrait, une fois investi en janvier 2025, ordonner l’arrêt des poursuites fédérales à son encontre.

Selim Saheb Ettaba, avec AFP