La Nouvelle-Calédonie, territoire français dans le Pacifique Sud, est en proie à des émeutes depuis lundi en raison d’une réforme du collège électoral. Cette dernière provoque l’ire des indépendantistes de l’île qui ont peur de se retrouver en minorité au sein du Congrès de Nouvelle-Calédonie.

Le contrôle de plusieurs quartiers en Nouvelle-Calédonie "n’est plus assuré", a reconnu vendredi le représentant de l’État dans l’archipel français du Pacifique Sud, même s’il a estimé la situation "plus calme" après quatre nuits d’embrasement contre la réforme électorale et un bilan de cinq morts.

"Des renforts vont arriver (…) pour contrôler les zones qui nous ont échappé ces derniers jours", a déclaré devant la presse le haut-commissaire de la République, Louis Le Franc.

"L’état d’urgence a permis, pour la première fois depuis lundi, de retrouver une situation plus calme et apaisée dans le grand Nouméa", la capitale de l’archipel, avait-il indiqué plus tôt vendredi dans un communiqué.

Après trois nuits d’émeutes, le mouvement de contestation a été "plus calme" dans la nuit de jeudi à vendredi, même si l’incendie d’une école et de deux entreprises est à déplorer, a-t-il précisé.

La grave crise qui secoue l’archipel depuis lundi avec de violentes émeutes a fait une cinquième victime jeudi, avec la mort d’un gendarme tué accidentellement par un collègue lors d’une mission de sécurisation.

Au total, cinq personnes sont décédées depuis le début des émeutes lundi sur le Caillou: deux hommes de 20 et 36 ans, une adolescente de 17 ans et les deux gendarmes.

64 gendarmes et policiers ont été blessés depuis le début de la semaine, selon un bilan datant de jeudi et plus de 206 personnes ont été interpellées.

L’armée a été déployée autour des ports et de l’aéroport du territoire et l’état d’urgence a été instauré dans cet archipel, colonisé par la France au XIXe siècle.

Près d’un millier de membres des forces de sécurité intérieure, notamment des policiers et des gendarmes, sont arrivés sur le Caillou dans la nuit de jeudi à vendredi, venant renforcer les 1.700 forces de l’ordre déjà présentes sur place.

Ces renforts devraient permettre de rétablir le contrôle sur trois zones de l’agglomération de Nouméa, peuplées majoritairement d’autochtones.

Le haut-commissaire a décrit ces quartiers comme "des zones où plusieurs centaines d’émeutiers n’attendent qu’une seule chose: le contact avec les forces de l’ordre pour maintenir leurs positions" et poursuivre "leurs exactions".

Les mesures d’interdiction de rassemblements, de transport d’armes et de vente d’alcool, ainsi qu’un couvre-feu nocturne ont été maintenues.

Le réseau social TikTok, prisé par les émeutiers, a été interdit sur l’archipel.

La télévision publique en Nouvelle-Calédonie a annoncé vendredi qu’elle renforçait la sécurité de ses journalistes, après un incident lors duquel une vingtaine d’hommes cagoulés s’en sont pris au matériel d’une équipe en reportage, l’obligeant à partir.

Réunion avec Macron annulée

Les émeutes ont éclaté lundi soir après une mobilisation indépendantiste contre une réforme constitutionnelle du collège électoral, rejetée par les représentants du peuple autochtone kanak.

Point de crispation des indépendantistes, le projet de réforme constitutionnelle élaboré par le gouvernement vise à élargir le corps électoral aux élections provinciales à tous les natifs calédoniens et aux résidents depuis au moins dix ans. Les partisans de l’indépendance jugent que ce dégel risque de "minoriser encore plus le peuple autochtone kanak".

Malgré une décroissance des violences observée dès mercredi, la situation "reste très tendue, avec des pillages, des émeutes, des incendies, des agressions qui sont évidemment insupportables et inqualifiables", avait estimé le Premier ministre, Gabriel Attal, jeudi à Paris.

Le chef du gouvernement a promis "les sanctions les plus lourdes contre les émeutiers et les pillards".

Il doit recevoir vendredi les comités de liaison parlementaires sur la Nouvelle-Calédonie pour un "échange" sur la crise.

Une visioconférence proposée par le président Emmanuel Macron aux élus calédoniens n’a pas pu se tenir jeudi, les "différents acteurs ne souhaitant pas dialoguer les uns avec les autres pour le moment", selon l’Élysée qui a assuré jeudi soir que ces discussions devraient intervenir vendredi.

Avec AFP