Le ministre ukrainien des Affaires étrangères Dmytro Kouleba est arrivé mardi en Chine, proche partenaire de la Russie, pour une visite inédite destinée à discuter des moyens de trouver une solution pacifique à la guerre entre Kiev et Moscou.

La Chine se présente comme une interlocutrice mesurée face à des Occidentaux qu’elle accuse de "jeter de l’huile sur le feu" en livrant des armes à l’Ukraine.

La visite de Dmytro Kouleba, qui doit durer jusqu’à vendredi, est sa première en Chine depuis l’invasion russe.

Elle survient après d’acerbes critiques de l’Otan contre l’aide économique chinoise à Moscou. Mais surtout une semaine après que le président ukrainien Volodymyr Zelensky eut ouvert, pour la première fois, la porte à des pourparlers avec la Russie.

Il s’est dit favorable à la présence de Moscou à un futur sommet de paix.

Un premier avait été organisé mi-juin en Suisse, avec plusieurs dizaines de pays représentés. Mais la Russie n’avait pas été conviée et la Chine avait donc décidé de ne pas y participer, estimant qu’il n’avait aucune chance d’aboutir à des avancées.

Cessez le feu rapide

Interrogée mardi, une porte-parole de la diplomatie chinoise, Mao Ning, a indiqué que les échanges porteront notamment sur "a coopération sino-ukrainienne et d’autres questions d’intérêt commun".

"La Chine est toujours convaincue qu’un cessez-le-feu rapide et la recherche d’une solution politique sont dans l’intérêt commun de toutes les parties", a-t-elle indiqué lors d’un point presse régulier.

La Chine, qui partage avec la Russie la volonté de constituer un contrepoids à l’influence américaine, n’a jamais condamné l’invasion russe et accuse l’Otan de négliger les préoccupations de sécurité de Moscou.

Mais le géant asiatique a aussi appelé l’an passé, dans un document sur la guerre, au respect de l’intégrité territoriale de tous les Etats — donc de l’Ukraine.

La Chine plaide régulièrement pour l’arrêt des combats. Une position critiquée par les Occidentaux, lesquels estiment qu’elle revient à permettre à la Russie de consolider ses gains territoriaux en Ukraine.

Sanctions occidentales

Pour Kiev, quel rôle peut jouer Pékin ?

Dmytro Kouleba pourrait vouloir tenter de "convaincre la Chine qu’elle devrait participer à un second sommet de la paix", indique à l’AFP Alexander Gabuev, directeur du Centre Carnegie Russie Eurasie, centre de réflexion basé à Berlin.

Et "Pékin va peut-être essayer d’obtenir quelque chose en échange" estime-t-il.

La Chine avait posé ses conditions pour sa participation: un sommet doit selon elle "permettre la participation égale de toutes les parties" et une "discussion juste de tous les plans de paix"- y compris donc de la position russe.

Cette visite devrait être scrutée par Américains et Européens. Car la Chine offre à la Russie, visée par d’importantes sanctions occidentales, un soutien économique crucial.

Les dirigeants des pays membres de l’Otan avaient d’ailleurs exprimé début juillet leurs "profondes préoccupations"vis-à-vis de cette aide.

Un enjeu de la visite de Dmytro Kouleba, selon Alexander Gabuev: Pékin pourrait "essayer de tirer parti de l’intérêt ukrainien pour un deuxième sommet"afin "d’essayer d’éviter" de nouvelles sanctions occidentales.

Par Oliver HOTHAM et Ludovic EHRET avec AFP