Des dizaines de manifestants ont pris d’assaut deux bases de l’armée israélienne dans le centre et le sud du pays lundi, exigeant la libération de neuf réservistes qui avaient été détenus dans le cadre d’une enquête sur des "abus substantiels présumés sur un détenu palestinien".

Plus tôt dans la matinée de lundi, l’armée israélienne avait annoncé l’interpellation de ces neuf soldats en poste dans le centre de détention de Sde Teiman, situé dans le désert du Néguev, dans le sud d’Israël.

Un porte-parole de l’armée avait confirmé à l’AFP que neuf soldats avaient été "interpellés pour être interrogés" dans le cadre de cette affaire.

Selon plusieurs médias israéliens, d’autres soldats en poste au sein de la base auraient utilisé du gaz poivré contre le personnel de la police militaire arrivé sur place lundi matin, pour arrêter les réservistes.

Après l’annonce de ces arrestations, des dizaines de manifestants, dont des membres d’extrême droite de la Knesset, le Parlement israélien, ont tenté à plusieurs reprises de faire irruption à Sde Teiman dans l’après-midi. Après quelques tentatives infructueuses, ils ont réussi à s’introduire dans l’enceinte de la base et y sont restés pendant plusieurs heures, avant d’être évacués par les forces de sécurité.

En parallèle, d’autres manifestants d’extrême droite ont pénétré lundi dans une seconde installation située au nord de Tel-Aviv, la base militaire de Beit Lid. C’est là que les neuf réservistes avaient été emmenés pour être interrogés.  La police israélienne a annoncé avoir délogé les manifestants quelques heures plus tard.

Ben Gvir dans le collimateur

Le chef d’état-major de l’armée israélienne, le général de corps d’armée Herzi Halevi, a immédiatement réagi en critiquant l’intrusion à Sde Tieman, considérant qu’il s’agissait d’un développement "extrêmement grave et contraire à la loi".

"Nous sommes en pleine guerre et des actes de ce type mettent en péril la sécurité de l’État", a-t-il ajouté.

Le ministre israélien de la Défense, Yoav Gallant, a de son côté déclaré que l’enquête sur les abus des réservistes devait être menée sans encombre. "Même dans les moments de colère, la loi s’applique à tous", a-t-il précisé.

Mardi matin, celui-ci a ensuite rendu publique une lettre destinée au Premier ministre Benjamin Netanyahou, lui demandant d’ouvrir une enquête sur le rôle joué par le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben Gvir, figure de l’extrême droite israélienne.

Ce dernier aurait ordonné à la police de ne pas empêcher les manifestants d’investir ces deux bases.

"Je vous demande d’agir avec fermeté contre les membres de la coalition qui ont pris part aux troubles et d’ordonner une enquête pour déterminer si le ministre de la Sécurité nationale a empêché ou retardé la réaction de la police aux incidents violents auxquels les membres de son parti ont pris part", a écrit M. Gallant.

Levée de boucliers au niveau politique

Au niveau de la sphère politique, l’ancien membre du cabinet de guerre et membre de l’opposition Benny Gantz a appelé à la retenue, mardi dans une déclaration, tout en critiquant M. Netanyahou, dont la condamnation des émeutes dans les bases a été lente.

"Monsieur le Premier ministre, une fois de plus, vous ne saviez pas et vous n’avez pas entendu. Netanyahou, le silence est une saleté. Le silence dans les moments de crise n’est pas un leadership et n’est pas responsable", a-t-il déclaré.

Le président israélien Isaac Herzog a quant à lui critiqué, dans la matinée de mardi, les émeutiers pour avoir perturbé le travail de l’armée israélienne "au cours de l’une des semaines les plus difficiles et les plus éprouvantes en termes de sécurité".

"Nous ne devons pas accabler nos combattants et nos commandants plus longtemps. Renforçons l’armée israélienne et ses commandants et défendons-nous contre tous les chants qui ne font que réjouir nos ennemis", a-t-il déclaré.

Selon les avocats représentant les neuf réservistes, ceux-ci ont été longuement interrogés par les enquêteurs militaires et sont restés en détention durant la nuit de lundi à mardi. Une audience est prévue mardi dans l’après-midi au tribunal militaire.

Par ailleurs, l’armée israélienne a annoncé, mardi, avoir mis en place un barrage routier sur la route menant à la base de Beit Lid. Elle a également érigé une clôture à l’entrée du tribunal militaire à l’endroit où les émeutiers ont pénétré sur le site la nuit précédente.

Des dizaines de membres des forces de sécurité ont été déployés autour de la base pour renforcer la sécurité.