Joe Biden, soutenu par la vice-présidente Kamala Harris, a annoncé à Austin, des réformes de la Cour suprême, y compris la limitation des mandats des juges et un code d’éthique. Cette initiative, visant à contrer les récentes décisions controversées et à restaurer la confiance publique, rencontre une opposition ferme des républicains, notamment en raison de ses implications sur l’équilibre des pouvoirs.

Le président américain Joe Biden a annoncé lundi des projets de réformes de la Cour suprême, considérée par beaucoup comme trop politisée, mais cette démarche dans l’urgence s’est tout de suite heurtée à l’opposition des républicains.

Dans des propositions soutenues par la vice-présidente et candidate démocrate à l’élection présidentielle, Kamala Harris, Joe Biden appelle notamment à limiter à 18 ans la durée du mandat des juges de la Cour suprême et également à mettre en place un code d’éthique.

Il a également demandé un amendement constitutionnel pour annuler la récente décision de la Cour suprême soutenant les revendications de Donald Trump en matière d’immunité présidentielle.

"Il n’y a pas de rois aux États-Unis. Personne ne doit être au-dessus des lois", a déclaré Joe Biden, lors d’un discours à Austin, au Texas, son premier déplacement depuis sa décision choc de ne pas se représenter pour le scrutin du 5 novembre.

Les républicains qui contrôlent la Chambre des représentants, l’une des chambres du Congrès qui doit approuver de telles réformes, ont tout de suite assuré que le projet était "mort-né".

Pour Mike Johnson, le président de la Chambre, cette proposition "ferait basculer l’équilibre des pouvoirs et éroderait non seulement l’État de droit, mais aussi la confiance du peuple américain dans notre système judiciaire".

"L’extrémisme sape la confiance du public dans les décisions de la Cour", lui a rétorqué M. Biden qui s’exprimait dans une bibliothèque en l’honneur de Lyndon Johnson, le dernier président américain en exercice à ne pas avoir brigué un second mandat en 1968.

Ce projet de réforme intervient après une série d’arrêts très contestés de la Cour, tels que l’abrogation du droit à l’avortement au niveau national, et à la suite d’une série de scandales impliquant des juges nommés à vie.

La Cour suprême est actuellement composée d’une majorité de conservateurs – 6 juges sur les 9. Chargée de trancher sur des questions qui vont de l’avortement à l’environnement, ses décisions ont un poids considérable dans la vie des Américains.

Et ce temple du droit a été profondément remanié par Donald Trump: sur les six juges conservateurs, la moitié d’entre eux ont été nommés sous le mandat du républicain.

 "Enjeu électoral"

Kamala Harris a déclaré que les "réformes populaires" défendues par le président Biden contribueraient à "rétablir la confiance", à "renforcer la démocratie" et à "faire en sorte que personne ne soit au-dessus de la loi", dans un communiqué.

Selon un récent sondage, près de deux tiers des Américains (63%) considèrent que les décisions de la Cour sont principalement motivées par des considérations politiques. Une majorité (54% contre 37% de l’avis opposé) désapprouve la façon dont elle s’acquitte de sa mission.

Mais pour le juriste Steven Schwinn, M. Biden a une chance "proche de zéro" de faire passer ce plan avant la fin de son mandat tant le Congrès est divisé.

Il s’agit pour lui de "sensibiliser le public" et de "faire de la Cour suprême un enjeu électoral", ajoute ce professeur de droit à l’université de l’Illinois à Chicago.

Plusieurs décisions récentes ont fait couler beaucoup d’encre. Notamment en 2022 quand la Cour a stupéfié le monde entier en annulant l’arrêt Roe v. Wade de 1973, qui accordait aux Américaines un droit fédéral à l’avortement. Au moins 20 États ont désormais introduit des interdictions totales ou partielles de l’avortement.

Cette année, la Cour a par ailleurs considérablement réduit le pouvoir des agences fédérales tout en se prononçant partiellement en faveur des demandes d’immunité du candidat républicain Trump.

M. Trump utilise maintenant cette décision pour contester notamment sa récente condamnation pénale à New York pour paiements dissimulés à une star de films X.

Dans le même temps, la Cour suprême a été secouée par des scandales éthiques impliquant des juges très conservateurs.

Le juge Clarence Thomas a récemment admis que deux séjours luxueux en 2019 ont été pris en charge par un donateur milliardaire républicain.

Le doyen de la Cour suprême, âgé de 76 ans, a également ignoré les appels à se récuser d’affaires liées à la présidentielle de 2020, puisque sa femme a participé à la campagne visant à maintenir M. Trump au pouvoir malgré sa défaite électorale.

Par Danny KEMP et Marion THIBAUT, AFP