Alors que Joe Biden, malgré le contexte de guerre en Ukraine, souhaite faire de sa priorité la limitation des prétentions chinoises en particulier dans le Pacifique, des émissaires américains en visite aux îles Salomon ont mis en garde vendredi contre toute " installation militaire " chinoise dans l’archipel. Ce dernier avait signé un vaste accord de sécurité avec Pékin et fait l’objet d’une lutte d’influence entre les ambitions chinoises et l’influence des États-Unis.

Inquiétudes occidentales

Les Salomon et Pékin ont annoncé en début de semaine la signature d’un pacte de sécurité aux contours flous qui a ravivé les craintes des États-Unis, mais aussi de l’Australie, voisine de l’archipel, face aux potentielles ambitions militaires chinoises dans le Pacifique.

C’est dans ce contexte tendu que la délégation américaine de haut niveau, conduite par les responsables chargés de l’Asie-Pacifique à la Maison Blanche et au département d’État, Kurt Campbell et Daniel Kritenbrink, a atterri vendredi à l’aéroport de la capitale, Honiara, a constaté un correspondant de l’AFP.

Reçus pendant 90 minutes par le Premier ministre Manasseh Sogavare, les diplomates n’ont pu que réitérer les avertissements américains, pris de court par l’officialisation, mardi, de la signature de l’accord controversé.

Ils ont prévenu que si Pékin devait aller vers " l’établissement d’une présence militaire permanente de facto ", d’une " installation militaire " ou de " capacités de projection de force " qui permettraient un déploiement chinois dans la région, cela causerait de " sérieuses inquiétudes " chez les États-Unis qui " (riposteraient) en conséquence ", a rapporté la Maison Blanche dans un communiqué.

Un archipel courtisé

Le mois dernier, la fuite d’une version préliminaire de l’accord a provoqué chez l’Australie et les États-Unis une onde de choc, car elle comprenait des propositions autorisant des déploiements chinois policiers et navals aux Salomon. Depuis, ils ont multiplié les efforts diplomatiques contre ce rapprochement, en vain.

Canberra et Washington s’inquiètent depuis longtemps de la possibilité que la Chine construise une base navale dans le Pacifique Sud lui permettant de projeter sa puissance maritime bien au-delà de ses frontières.

" En réponse aux inquiétudes soulevées, le Premier ministre Sogavare a réitéré ses assurances garantissant spécifiquement qu’il n’y aurait pas de base militaire, pas de présence de long-terme, et pas de capacités de projection de force ", a expliqué la présidence américaine. " Les États-Unis ont souligné qu’ils suivraient les développements de près. "

Mais les Américains ont aussi tenté de courtiser les îles en multipliant les gestes à leur égard. Signe que l’archipel est au cœur de toutes les attentions: au moment de l’arrivée de la délégation américaine, l’ambassadeur de Chine et Manasseh Sogavare inauguraient une piste d’athlétisme faisant partie d’un vaste complexe sportif financé par la Chine afin d’accueillir les Jeux du Pacifique 2023.

Émeutes anti-chinois

Les îles Salomon avaient été secouées fin 2021 par des émeutes meurtrières alimentées par le ressentiment d’une partie de la population contre l’influence chinoise grandissante. Des commerces détenus par des Chinois avaient été vandalisés et incendiés à Honiara. Pékin, qui avait envoyé instructeurs de police et matériel anti-émeute, cherchait depuis à renforcer son dispositif de protection dans l’archipel.

Le Premier ministre australien Scott Morrison a estimé vendredi que la Chine exerçait une " pression énorme " sur les dirigeants des nations insulaires. Pour sa part, le pouvoir communiste a fustigé des " propos irresponsables ". L’Australie avait été l’un des acteurs de la région à déployer l’an dernier des forces de maintien de la paix aux Îles Salomon, à la demande du gouvernement.

Avec AFP