L’agitation politique sur le continent européen est sans précédent, et n’est pas sans refléter une fragilité palpable. Il ne manquait à l’Europe que la guerre russe contre l’Ukraine pour dévoiler les différences dans les approches, voire les contradictions, à l’égard des défis croissants qu’elle traverse. Cette guerre engendrera des changements majeurs sur les plans politiques, économiques et sociaux.

L’issue de cette guerre dévastatrice qui a tué des milliers de personnes et déplacé des millions reste incertain. Néanmoins, des questions fondamentales liées à l’avenir de l’Europe, à son unité et à ses capacités de défense et de sécurité, sont posées. La sortie de la Grande-Bretagne de l’Union a été un coup dur dont les conséquences sont indéniables à plus d’un niveau, même si le Brexit n’a pas pour autant conduit à "l’effondrement" de l’unitarisme européen mis en place au milieu du siècle dernier.

Si l’Europe a surmonté, bon an mal an, le retrait des Britanniques, les discussions indispensables liées aux moyens de développer ses capacités de défense reviennent en force et soulèvent de nombreuses questions légitimes, à l’instar de cette question fondamentale : quelles sont les véritables raisons qui poussent un continent riche d’une population de près de 500 millions d’habitants à s’appuyer entièrement sur l’OTAN pour assurer sa sécurité, alors que l’OTAN, qui gravite dans l’orbite des Américains, se trouve forcément affecté par les décisions et les orientations politiques de Washington ?

L’idée de créer une armée européenne a été évoquée à plusieurs reprises, et c’est Paris qui a affiché le plus d’enthousiasme à cet égard, dans un but implicite visant à réduire la dépendance européenne vis-à-vis des États-Unis via l’OTAN, afin que l’Europe puisse définir ses priorités sécuritaires indépendamment des calculs stratégiques américains.

Certes, le camp occidental, si l’on peut le nommer ainsi, converge sur certains principes et orientations stratégiques et politiques. Cependant, cela ne veut pas pour autant dire que les grands intérêts américano-européens coïncident à divers tournants et étapes. La guerre aux frontières de l’Europe est un exemple frappant de cette divergence implicite malgré la coordination manifestée par les deux parties.

Washington, de par sa position de pointe dans le leadership mondial, ne peut considérer les questions brûlantes dans le monde sans le faire sous l’angle de ses intérêts stratégiques.  Cela pourrait potentiellement conduire à une rupture avec l’Europe ou avec d’autres alliés dans le monde. Ainsi, la "dépendance" sécuritaire et non sécuritaire de l’Europe vis-à-vis de Washington aurait des répercussions majeures au niveau de la politique internationale.

Toutefois, outre cette relation problématique entre les composantes du camp occidental, en particulier les États-Unis et l’Europe, il existe de profondes divergences entre les Européens eux-mêmes concernant la gestion de la guerre russe contre l’Ukraine. D’ailleurs, la question est plus profonde et va au-delà de la guerre contre l’Ukraine, malgré sa gravité et les énormes pertes qu’elle occasionne. Elle est fondamentalement liée à l’avenir des relations internationales, à celui de l’Europe et des relations entre les nations européennes.

L’Italie, par exemple, craint que la Banque centrale européenne n’augmente ses taux, vu que cela anéantirait sa capacité à assurer le service de sa dette publique élevée. L’Allemagne, qui a augmenté son budget militaire de manière inédite, considère que l’embargo pétrolier sur la Russie entraînera une augmentation significative des coûts de l’énergie, ce qui aura un impact évident sur son économie. La Hongrie tweete aux côtés de la Russie, et j’en passe.

Chaque pays européen a ses propres appréhensions. Et il ne fait aucun doute que l’après-guerre sur l’Ukraine ne sera pas comme l’avant-guerre.

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