Alors que le pays d’Asie est épinglé régulièrement pour ses atteintes aux libertés individuelles, Xi Jinping s’est affiché en défenseur des droits de l’homme de son pays, durant la visite de la cheffe de l’ONU dans le Xinjiang.

Le président chinois Xi Jinping a défendu mercredi le bilan de son pays en matière de droits de l’Homme, après de nouvelles révélations de presse sur la répression contre la minorité musulmane des Ouïghours au Xinjiang.

Le Xinjiang (nord-ouest), longtemps frappé par des attentats attribués à des séparatistes et des islamistes ouïghours, fait l’objet depuis quelques années d’une répression menée au nom de l’antiterrorisme.

Des études occidentales accusent la Chine d’y avoir interné au moins un million de Ouïghours et de membres d’autres minorités musulmanes dans des camps de rééducation, voire d’imposer du " travail forcé " et des " stérilisations forcées ", ce dont se défend Pékin.

Mardi, un consortium de 14 médias étrangers a publié des documents qu’il dit provenir du piratage d’ordinateurs de la police du Xinjiang, où Pékin est accusé de mener une répression féroce contre les musulmans ouïghours.

Ceux-ci jettent une lumière crue sur la situation des musulmans ouïghours. Parmi eux figurent des milliers de photographies présentées comme ayant été prises dans des " camps de détention " et montrant les visages de nombreux " détenus ", dont des femmes, des mineurs et des personnes âgées.

Ces révélations surviennent au moment où la cheffe de l’ONU pour les droits de l’Homme, Michelle Bachelet, entame une visite extrêmement attendue au Xinjiang.

Ce déplacement s’annonce ardu pour l’ex-présidente chilienne, qui pourrait ne pas bénéficier d’un accès libre et risque d’être utilisée par les autorités chinoises pour se dédouaner, soulignent des observateurs.

" Propre voie "

" Les questions liées aux droits de l’Homme ne doivent pas être politisées, instrumentalisées ou avoir deux poids deux mesures ", a averti mercredi Xi Jinping, au cours d’un entretien en visioconférence avec Mme Bachelet.

" Chaque pays a une situation différente " qui dépend de son histoire, de sa culture et de son développement économique, a relevé l’homme fort de Pékin.

Par conséquent, chaque pays doit suivre " sa propre voie en matière de droits de l’Homme, en fonction de ses conditions et des besoins de son peuple ", a estimé Xi Jinping, selon des propos rapportés par la télévision nationale CCTV.

" Il n’existe pas de +pays parfait+ en matière de droits de l’Homme ", a ajouté le président chinois.

Le compte-rendu de la télévision publique n’évoque à aucun moment le Xinjiang.

Le déplacement de Mme Bachelet dans cette région chinoise se fait pour l’heure dans la discrétion, la délégation onusienne étant tenue d’intégrer, au nom de la situation épidémique en Chine, une bulle sanitaire qui la tient à l’écart de la presse étrangère.

Aucun détail sur les lieux précis où ira Michelle Bachelet n’a été rendu public, ce qui interroge sur la latitude dont elle bénéficiera concrètement sur le terrain.

" Mensonge "

Présente mardi et mercredi au Xinjiang, la responsable de l’ONU pour les droits de l’Homme devait se rendre dans la capitale régionale Urumqi, théâtre dans le passé de plusieurs attentats visant des civils.

Mme Bachelet est également attendue à Kashgar, dans le sud du Xinjiang, où la population ouïghoure est majoritaire et la campagne sécuritaire réputée être particulièrement féroce.

Michelle Bachelet est la première responsable onusienne des droits de l’Homme à se rendre en Chine depuis 2005, après des années d’âpres négociations avec Pékin sur les termes de sa visite.

Selon ses services, l’ex-présidente chilienne discutera avec des membres de la société civile travaillant sur les droits de l’Homme.

Inquiets, Ouïghours de la diaspora et associations de défense des droits de l’Homme ont exhorté Mme Bachelet à ne pas se laisser entraîner dans une opération de communication orchestrée par Pékin.

La Chine est accusée de cautionner " au plus haut niveau ", selon Washington, des exactions au Xinjiang contre les Ouïghours.

" Nous sommes consternés par ces informations et ces images choquantes ", a déclaré le porte-parole du département d’Etat américain, Ned Price, à propos de la fuite de fichiers attribués à la police chinoise.

Washington accuse régulièrement Pékin d’être responsable d’un " génocide " au Xinjiang. La Chine dénonce le " mensonge du siècle " et présente les camps comme des " centres de formation professionnelle " destinés à combattre l’extrémisme religieux.

Avec AFP