La justice française a requis lundi en appel cinq ans de prison, dont un an ferme, à l’encontre de l’ancien Premier ministre François Fillon, dans l’affaire des emplois " fictifs ou surévalués " de son épouse qui avait miné sa campagne présidentielle en 2017.

A l’issue de près de quatre heures de réquisitoire à deux voix, les avocats généraux ont estimé que l’ex-Premier ministre sous la présidence de Nicolas Sarkozy (2007-2012) devait être reconnu coupable, demandant à ce que la peine, dont la partie ferme serait à purger sous bracelet électronique, soit assortie de 10 ans d’inéligibilité.

En première instance, il avait été condamné à cinq ans d’emprisonnement dont deux ferme, 375.000 euros d’amende et dix ans d’inéligibilité.

Le ministère public a estimé que " la fictivité " de l’emploi comme assistante parlementaire de Mme Fillon était " établie " et que François Fillon, " personnage éminent de la vie politique ", avait été " à l’initiative " d’une " entreprise de détournement de fonds publics ".

Entre 1998 et 2013, François Fillon avait employé son épouse Penelope comme assistante parlementaire, dans le cadre de trois contrats signés par lui et par celui qui était alors son suppléant, Marc Joulaud.

Des prestations rémunérées 613000 euros nets, " fictives ou surévaluées " selon l’accusation, pour qui les activités de Mme Fillon relevaient du " rôle social " d’une " conjointe d’homme politique ", mais pas d’une collaboratrice.

Le parquet a demandé lundi contre Penelope Fillon, qui a " adhéré pleinement " à ce " système d’enrichissement familial ", deux ans de prison avec sursis, 100000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité (contre trois ans de prison avec sursis, 375000 euros d’amende et deux ans d’inéligibilité, en première instance).

Cette affaire avait parasité la campagne présidentielle du candidat de droite en 2017, poussant la défense à dénoncer une ouverture d’enquête précipitée et téléguidée.

L’hebdomadaire satirique Le Canard enchaîné avait dévoilé le " Penelopegate " le 24 janvier 2017, entraînant l’ouverture d’une enquête. Les révélations s’étaient succédé et le candidat de la droite, chantre de l’intégrité, avait été mis examen à six semaines du premier tour.

" Il n’y a pas eu d’immixtion illégale de la justice dans l’élection présidentielle (ni) d’atteinte à la séparation des pouvoirs ", a répondu, lundi, dans son réquisitoire l’avocat général.

En dehors du statut d’ancien Premier ministre du principal prévenu, et du Parlement français comme victimes, il s’agissait d' "un dossier tout à fait classique de nos chambres financières, un dossier dans lequel des personnes se sont enrichies de façon illicite ".

Tout au long du procès, le couple a inlassablement répété que Penelope Fillon avait accompli un réel travail en tant que " collaboratrice de terrain " dans la circonscription de la Sarthe, département de l’ouest de la France où M. Fillon avait été élu député.

Selon l’accusation, Penelope Fillon a été rémunérée " indument " comme assistante parlementaire de son mari et du suppléant de ce dernier.

Ses tâches étaient " redondantes " avec celles d’autres collaborateurs et cet emploi était marqué par la " confidentialité ", puisqu’il était connu seulement du " premier cercle " du couple, a soutenu l’avocat général.

Les " mémos " en préparation des manifestations locales ? " Il n’en a été retrouvé aucune trace ". La relecture des discours, l’accueil d’administrés à domicile, la gestion du courrier ? Autant de tâches " impalpables ". Les " remontées d’informations " depuis le terrain ? Une activité " évanescente, pour ne pas dire vaporeuse ", a insisté le magistrat.

La défense des Fillon a ensuite demandé la relaxe.

" Ce n’est pas parce qu’on n’affiche pas en étendard ses qualités professionnelles que l’emploi est fictif ", a fait valoir Me Antonin Lévy.

Il a aussi brandi l’argument de la séparation des pouvoirs, le pouvoir judiciaire ne pouvant, selon lui, " porter une appréciation sur la manière dont le collaborateur travaille au côté du député ".

Dans ce dossier, les époux Fillon sont aussi mis en cause pour l’emploi de leurs deux aînés comme collaborateurs de leur père, sénateur entre 2005 et 2007 (46000 euros nets), et pour le contrat de " conseillère littéraire " de Penelope Fillon, en 2012 et 2013, à la Revue des deux mondes, propriété de Marc Ladreit de Lacharrière (135000 euros bruts).

Là aussi, ils se défendent d’avoir enfreint la loi.

Lundi, les magistrats ont requis trois ans de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité contre le suppléant de M. Fillon, Marc Joulaud.

AFP

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