L’Otan a promis mercredi de soutenir l’Ukraine aussi longtemps que nécessaire face à la " cruauté " de la Russie, lors du sommet de Madrid, tandis que le président russe a dénoncé les " ambitions impérialistes " de l’Alliance qui cherche à affirmer son " hégémonie ". Le vocabulaire et le ton affichés par déclarations interposées ont marqué mercredi l’extrême tension entre les membres de l’Alliance atlantique face à une Russie qui confirme la poursuite de son invasion de l’Ukraine malgré les sanctions et les critiques. Désormais, les Occidentaux doivent également faire face à un conflit qui s’installe dans la durée, tout en sachant que cette éventualité jouera en faveur du président Vladimir Poutine.
" L’Ukraine peut compter sur nous aussi longtemps qu’il le faudra ", a déclaré le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg, évoquant une " obligation morale et politique " pour l’Alliance atlantique, réunie jusqu’à jeudi à Madrid, où elle a validé le futur élargissement à la Suède et à la Finlande.
" L’épouvantable cruauté "
Dans une déclaration commune, les pays membres de l’Otan, qui ont déjà fourni des milliards de dollars d’armes à Kiev, ont précisé s’être mis d’accord sur un nouveau plan d’aide passant par la " livraison d’équipements militaires non létaux " et par un renforcement des défenses ukrainiennes contre les cyber-attaques.
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" L’épouvantable cruauté de la Russie provoque d’immenses souffrances humaines et des déplacements massifs ", ont-ils écrit, estimant que Moscou portait " l’entière responsabilité de cette catastrophe humanitaire ".
Des annonces saluées par le chef de la diplomatie ukrainienne, Dmytro Kouleba, qui s’est félicité de cette " position forte " et " lucide " sur la Russie.
" Ambitions impériales "
En réponse aux déclarations des dirigeants de l’Otan, le président russe Vladimir Poutine a dénoncé mercredi, lors d’une conférence de presse à Achkhabad, la capitale turkmène, les " ambitions impériales " de l’Alliance Otan qui cherche selon lui à affirmer son " hégémonie " via le conflit ukrainien.
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" L’Ukraine et le bien du peuple ukrainien, ce n’est pas l’objectif de l’Occident et de l’Otan, mais un moyen de défendre leurs propres intérêts ", a-t-il dit.
Nouvelle feuille de route
Le sommet de l’Otan a permis aux pays membres de l’Alliance d’adopter une nouvelle feuille de route stratégique qualifiant la Russie " de menace la plus significative et directe pour la sécurité des alliés ".
" Nous ne pouvons pas écarter la possibilité d’une attaque contre la souveraineté ou l’intégrité territoriale des alliés ", assure ce document, qui n’avait pas été révisé depuis 2010.
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Cette nouvelle feuille de route cible aussi pour la première fois la Chine qui représente, selon l’Otan, un " défi " pour sa " sécurité ".
Affichant leur unité, les pays de l’Otan ont validé un renforcement de leur présence militaire sur le flanc oriental de l’Alliance, qui va porter à plus de 300.000 militaires les effectifs de ses " forces à haut niveau de préparation ".
" C’est la réorganisation la plus importante de notre défense collective depuis la Guerre froide ", a souligné Jens Stoltenberg.
" Nous sommes au rendez-vous " et " nous prouvons que l’Otan est plus nécessaire que jamais ", a insisté le président américain Joe Biden, qui a annoncé pour sa part un renforcement de la présence militaire américaine dans toute l’Europe et notamment dans les Etats baltes.
" Un facteur déstabilisateur "
Le sommet de Madrid a aussi permis de lancer officiellement le processus d’adhésion de la Suède et la Finlande, qui ont décidé de rejoindre l’Otan en réaction à l’offensive russe en Ukraine, rompant avec une longue tradition de non-alignement.
Cette adhésion était jusqu’à présent bloquée par la Turquie qui accusait notamment Stockholm et Helsinki d’abriter des militants de l’organisation kurde PKK, qu’Ankara considère comme " terroriste ".
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Mais au terme de longues tractations, Ankara a donné mardi soir son accord à l’entrée dans l’Otan de ces deux pays nordiques, le président turc Recep Tayyip Erdogan ayant estimé avoir obtenu leur " pleine coopération " dans sa lutte contre le PKK.
Cet élargissement à venir de l’Otan aux deux pays nordiques a suscité la colère de Moscou.
C’est " un facteur profondément déstabilisateur pour les affaires internationales ", a dit le vice-ministre des Affaires étrangères Sergueï Riabkov, qui a dénoncé un mouvement " agressif " à l’égard de la Russie.
Dans un communiqué, la diplomatie russe a également menacé de représailles la Norvège, accusant ce pays membre de l’Otan de bloquer le transit de marchandises à destination des Russes installés sur un archipel arctique norvégien, le Svalbard.
Vladimir Poutine " espérait moins d’Otan sur son front occidental " mais " il s’est complètement trompé ": " il obtient plus d’Otan ", a lancé le Premier ministre britannique Boris Johnson après l’accord trouvé à Madrid.
Une " fréquence énorme de bombardements "
Sur le terrain, l’Ukraine a néanmoins continué de payer un lourd tribut à la guerre, avec de nouvelles attaques meurtrières contre des civils, notamment à Mikolaïv, où cinq personnes sont décédées dans une frappe sur un immeuble résidentiel, selon les autorités régionales.
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Ces bombardements sont survenus deux jours après une frappe qui a ravagé un centre commercial bondé à Krementchouk, à 330 kilomètres au sud-est de Kiev, faisant au moins 18 morts et une quarantaine de disparus, selon le gouvernement ukrainien.
M. Poutine a rejeté mercredi soir la responsabilité de l’armée russe dans cette frappe. " Notre armée ne frappe aucun site d’infrastructure civile ", a-t-il martelé.
A Lyssytchansk, dans l’est de l’Ukraine, la " fréquence " des bombardements russes est " énorme ", a estimé le gouverneur de la région de Lougansk, Serguiï Gaïdaï. " Nous assistons à un pic d’intensité dans les combats ", a poursuivi à la télévision ukrainienne.
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Par ailleurs, les autorités ukrainiennes ont annoncé avoir récupéré 144 soldats, dont 95 " défenseurs d’Azovstal " à Marioupol dans le cadre du " plus gros échange (de prisonniers avec Moscou) depuis le début de l’invasion russe ".
Rupture des relations avec la Syrie
Dans une vidéo mercredi soir, M. Zelensky a également annoncé qu’il mettait fin aux relations diplomatiques avec la Syrie, après que le régime de Damas a reconnu l’indépendance des républiques séparatistes prorusses de Donetsk et de Lougansk, soutenues par Moscou depuis 2014.
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Le ministre britannique de la Défense Ben Wallace a estimé pour sa part mercredi que la Russie avait " échoué sur tous ses objectifs majeurs " sur le plan militaire. La guerre a un " coût massif " pour Moscou, a-t-il assuré dans un entretien à la radio LBC, estimant à " 25.000 " le nombre de soldats russes tués depuis le début du conflit.
Un bilan attribué par Boris Johnson à la " toxicité masculine " de Vladimir Poutine. " Si Poutine était une femme, (…) je ne pense vraiment pas qu’il se serait embarqué dans cette guerre folle de macho ", a estimé le Premier ministre britannique sur la chaîne de télévision allemande ZDF.
Avec AFP