Au lendemain de la prise de Lyssytchansk, une ville clef du Donbass, et la prise de contrôle totale de la région de Lougansk par les Russes, le président russe Vladimir Poutine a ordonné lundi aux forces armées de poursuivre leur offensive dans l’est de l’Ukraine. Au cours d’un entretien, mis en scène dans les détails comme à l’accoutumée, avec son ministre de la Défense Sergueï Choïgou, le maître du Kremlin lui a donné l’ordre de " mener à bien la mission " des troupes russes en application des " plans déjà approuvés ".

Dimanche soir, l’état-major de l’armée ukrainienne avait annoncé le retrait des unités engagées à Lyssytchansk, le dernier bastion de Kiev dans la région de Lougansk, que Moscou dit désormais contrôler totalement.

Pour les forces ukrainiennes, l’urgence est désormais de contenir la progression russe vers l’ouest et deux villes majeures de la région voisine de Donetsk : Sloviansk et Kramatorsk.

Après la prise de Lyssytchansk, une pièce maîtresse du plan de conquête du Donbass, un bassin industriel en partie contrôlé par des séparatistes prorusses depuis 2014, " l’effort principal de l’ennemi […] vise à un débordement progressif " des militaires ukrainiens sur cet axe, a déclaré lundi l’état-major ukrainien.

Selon le gouverneur de la région de Donetsk, Pavlo Kirilenko, dix personnes, dont deux enfants, ont péri dimanche dans des frappes russes, à Sloviansk et dans ses environs.

La ligne de front se rapprochant de cette cité, les autorités ukrainiennes appellent sa population à la quitter.

Les rues de Sloviansk étaient presque désertes lundi matin, selon des journalistes de l’AFP sur place. Sur le marché du centre-ville ravagé par un incendie provoqué par une frappe russe, quelques vendeurs proposaient des produits de première nécessité tandis que d’autres déblayaient des débris calcinés.

Des vendeurs et des habitants faisaient part de leur inquiétude pour les jours et semaines à venir, tandis que l’on pouvait entendre les déflagrations dues aux bombardements.

" Je crois que ce qui nous attend va être encore pire, j’ai déjà pensé à partir ", a dit Andriï Gerassimenko, 38 ans, qui ramasse les débris du marché.

" Rien de bien ne va se passer, le mieux c’est de partir ", a renchéri Viktoria Koloty, une femme de 33 ans qui a confié avoir déjà fait partir ses enfants.

A Siversk, entre Lyssytchansk et Sloviansk, les militaires ukrainiens semblent vouloir tenir une ligne de défense entre cette ville et Bakhmout, plus au sud. Ses habitants interrogés par l’AFP évoquent des bombardements de plus en plus intenses ces derniers jours.

Les destructions à Sloviansk

" L’ennemi a intensifié ses bombardements sur nos positions dans la direction de Bakhmout ", a confirmé l’état-major de l’armée ukrainienne.

L’armée russe a de son côté affirmé avoir détruit " sept postes de commandement " ukrainiens au cours des dernières 24 heures, " dont celui de la 25e brigade aéroportée dans la région de Siversk ". Des affirmations impossibles à vérifier de source indépendante.

A Kharkiv, la deuxième ville d’Ukraine, dans le nord-est, trois civils sont morts dans des bombardements survenus lundi avant l’aube, selon les autorités locales.

A Boutcha, une cité-martyre de la banlieue de Kiev, même si certains se sont remis à planter des fleurs au pied des immeubles ou à s’affairer dans leur potager, la population n’ose pas encore penser à la reconstruction, quand l’issue de la guerre reste si incertaine. Ici, les stigmates des combats sont encore visibles partout : vitres brisées, impacts de balles, murs éventrés…

Une roquette à sous-munitions à Kramatorsk, le chef-lieu du Donbass, côté ukrainien.

" On va se coucher sans savoir si on se réveillera demain ", soupire Vera Semeniouk, 65 ans. " Tout le monde est revenu, commence à réparer les maisons, beaucoup posent de nouvelles fenêtres. Ce serait terrible si ça recommençait et qu’il fallait à nouveau tout quitter ".

Avec AFP