L’Église de l’Unification, ou " Secte Moon ", fait actuellement l’objet de toutes les attentions au Japon. Le meurtrier présumé de Shinzo Abe a affirmé avoir voulu se venger de cette organisation religieuse en ciblant l’ancien Premier ministre japonais, qu’il pensait en être membre. Fondée en 1954 en Corée du Sud, l’Église est principalement présente dans ce pays, aux États-Unis et au Japon, et compterait plusieurs centaines de milliers de fidèles. L’institution a acquis une réputation controversée après avoir été accusée d’escroquerie par de nombreux Japonais, et entretient des relations avec de nombreux hommes politiques, dont Donald Trump. Cependant, rien ne prouve jusqu’à présent une quelconque relation entre Shinzo Abe et la secte. 

La mère de l’homme accusé d’avoir assassiné vendredi Shinzo Abe est membre de l’Église de l’Unification, a confirmé lundi cette organisation également connue sous le nom de " secte Moon ", et dont le suspect souhaitait se venger en visant l’ancien Premier ministre japonais.

Voici quelques éléments sur ce mouvement religieux né en Corée du Sud qui a toujours cultivé des liens avec des responsables politiques, tout en se taillant un empire économique mondial.

Un fondateur controversé
Sun Myung Moon a fondé l’Église de l’Unification en 1954 à Séoul, afin que l’humanité " parvienne à un stade de pureté sans péché ".

Le très controversé Sun Myung Moon (1920-2012) est né dans une famille d’agriculteurs dans ce qui est aujourd’hui la Corée du Nord. Il assurait avoir eu à l’âge de 15 ans une vision de Jésus-Christ lui enjoignant de poursuivre sa mission afin que l’humanité parvienne à un stade de pureté " sans péché ".

Réfugié de Corée du Nord, rejeté par les Églises protestantes sud-coréennes le considérant comme un hérétique, Moon fonde en 1954 à Séoul sa propre Église, laquelle va très rapidement se mêler de politique en adoptant initialement une ligne farouchement anticommuniste, s’attirant ainsi la sympathie du régime militaire de Corée du Sud à l’époque.

Moon a aussi côtoyé des chefs d’État étrangers, comme Richard Nixon aux États-Unis, qu’il avait soutenu lors du scandale du Watergate. Par ailleurs, en France, dans les années 1980, son Église avait brièvement entretenu des liens avec le Front national.

L’organisation devient progressivement un empire économique présent dans de nombreux secteurs (construction, alimentaire, automobile, tourisme, éducation, médias…) qui fera de son fondateur un milliardaire.

Sun Myung Moon a effectué sa première tournée mondiale en 1965 et s’est installé aux États-Unis au début des années 1970. Condamné pour évasion fiscale par la justice américaine, il passera plus d’une année en prison dans le pays au début des années 1980.

Plusieurs dizaines de milliers de fidèles au Japon
L’Église de l’Unification est connue pour organiser des mariages de masse, qui peuvent compter plusieurs milliers de couples. (AFP)

Connue pour célébrer des mariages collectifs de masse, l’Église de l’Unification est aujourd’hui contrôlée par la veuve de son fondateur, Hak Ja Han, sa seconde épouse avec laquelle il a eu une dizaine d’enfants.

L’organisation avait affirmé en 2012 qu’elle comptait trois millions de fidèles dans le monde. Ce nombre serait toutefois largement exagéré, selon des experts. Son influence aurait nettement reculé depuis les années 1980, en raison des changements sociaux et politiques en Corée du Sud, de divers scandales et de scissions internes, avant et après la mort de son fondateur.

Au-delà de son pays d’origine, l’Église est principalement présente aux États-Unis – où elle se fait appeler dorénavant " Fédération des familles pour la paix et l’unification mondiales " – et au Japon, pays où elle compterait plusieurs dizaines de milliers de fidèles.

Aucun lien avec Shinzo Abe 
L’Église de l’Unification est principalement présente aux États-Unis, mais aussi au Japon, où elle compte plusieurs dizaines de milliers de fidèles.

L’assassin présumé de M. Abe, Tetsuya Yamagami, 41 ans, " en voulait à une certaine organisation " et avait décidé de tuer M. Abe parce qu’il pensait que l’ancien chef du gouvernement avait un lien avec celle-ci, avait déclaré vendredi la police japonaise. Des médias locaux avaient rapidement évoqué une organisation religieuse, sans la nommer, et affirmé que M. Yamagami en voulait à celle-ci parce qu’elle aurait obtenu des dons importants de sa mère, mettant leur propre famille en grande difficulté financière.

Tomihiro Tanaka, le président de la branche japonaise de l’Église de l’Unification, a confirmé lundi que la mère du suspect était membre de l’organisation depuis 1998 et qu’elle s’était retrouvée en difficulté financière vers 2002. " Nous ignorons les circonstances qui ont conduit cette famille à la banqueroute ", a-t-il toutefois assuré, affirmant que les dons pour son Église se faisaient de manière volontaire et que les montants étaient libres.

M. Tanaka a aussi souligné que Shinzo Abe n’avait " jamais " été l’un de ses membres ou conseillers.

Cependant, des organisations proches de l’Église de l’Unification invitent régulièrement des personnalités politiques de premier plan pour des conférences sur le thème de la paix dans le monde.

L’ancien président américain Donald Trump s’est ainsi exprimé en ligne pour l’un de ces colloques en 2021, et M. Abe avait aussi été critiqué par un groupe d’avocats japonais pour avoir envoyé un message vidéo lors d’un événement similaire.

Ces avocats, qui défendent des gens au Japon accusant la secte de les avoir ruinés, avaient aussi protesté quand M. Abe avait envoyé un message de félicitations lors d’une grande cérémonie de mariages collectifs organisés par l’Église en 2006.

Avec AFP