La coopération spatiale russo-américaine semble être le seul secteur dans lequel les deux pays s’entendent encore depuis le début de la guerre en Ukraine: la Russie et les États-Unis ont en effet déclaré reprendre leurs vols conjoints vers la Station spatiale internationale. Deux astronautes américains voleront à bord de fusées russes Soyouz lors de deux missions distinctes, tandis que deux cosmonautes russes voleraient pour leur part à bord de fusées SpaceX. Un échange qui a été permis par la validation finale de la Russie, montrant la volonté du pays de poursuivre la coopération spatiale malgré les tensions avec l’Occident. De même, le patron de Roscosmos, Dmitri Rogozine, connu pour ses déclarations belliqueuses à l’égard de l’Occident, a été démis de ses fonctions. 

Un vaisseau Soyouz ramène sur Terre deux cosmonautes russes et un astronaute américain qui se trouvaient sur la Station spatiale internationale, un rare exemple de coopération entre Washington et Moscou en pleines tensions autour de l’Ukraine. (AFP)

Les États-Unis et la Russie ont annoncé vendredi reprendre leurs vols conjoints vers la Station spatiale internationale (ISS), confirmant la poursuite de leur coopération dans le secteur spatial, l’un des derniers sur lesquels les deux pays s’entendent encore depuis le déclenchement de la guerre en Ukraine.

Deux astronautes américains voleront à bord de fusées russes Soyouz lors de deux missions distinctes, a déclaré la Nasa, indiquant que deux cosmonautes russes voleraient pour leur part à bord de fusées SpaceX, une première.

Un tel échange était prévu de longue date, mais attendait encore la validation finale de la Russie. Il avait semblé compromis après le début de la guerre en Ukraine, mais des responsables de la Nasa avaient répété ces dernières semaines espérer qu’il ait bien lieu. " Afin d’assurer la sécurité continue des opérations de la Station spatiale internationale, de protéger la vie des astronautes et d’assurer la présence continue d’Américains dans l’espace, la Nasa va reprendre les vols intégrés sur des vaisseaux spatiaux américains et russes Soyouz ", a déclaré l’agence américaine dans un communiqué.

L’astronaute américain Frank Rubio volera à bord d’une fusée Soyouz dont le décollage est prévu le 21 septembre depuis le Kazakhstan, en compagnie de deux cosmonautes russes. Et Anna Kikina, la seule femme cosmonaute en activité, fera partie de l’équipage Crew-5, qui comprend également deux Américains et un Japonais. Ils doivent décoller en septembre avec une fusée SpaceX depuis Cap Canaveral, en Floride.

L’agence spatiale russe Roscosmos a déclaré que l’accord était dans l' "intérêt " des deux pays. Il " vise à garantir qu’en cas de situation d’urgence liée à l’annulation ou au retard important du lancement d’un engin spatial russe ou américain, la présence d’au moins un cosmonaute de Roscosmos et d’un astronaute de la Nasa à bord de l’ISS soit assurée ", a écrit l’agence russe dans un communiqué.

Selon la Nasa, l’astronaute américaine Loral O’Hara volera également à bord d’un vaisseau russe, et le cosmonaute Andrei Fedyaev prendra lui place dans une fusée SpaceX en tant que membre de Crew-6, tous deux lors de missions prévues au printemps 2023.

L’industrie spatiale russe et l’Occident, entre tensions et coopération
Dmitry Rogozin, directeur de la Station spatiale russe Roscosmos, a été récemment démis de ses fonctions par le président Poutine. Il était connu pour ses déclarations hostiles à l’égard des sanctions occidentales, qui ont impacté en partie l’industrie aérospatiale russe.

L’annonce est intervenue quelques heures après que Vladimir Poutine a démis de ses fonctions le patron de Roscosmos, Dmitri Rogozine. Depuis l’offensive russe contre l’Ukraine, celui-ci s’est illustré par ses déclarations très belliqueuses à l’égard de l’Occident. Un porte-parole de Vladimir Poutine a déclaré que ce changement ne signifiait pas pour autant que le président russe était mécontent du travail de M. Rogozine. Selon un média indépendant, ce dernier pourrait être promu et chargé des territoires occupés en Ukraine.

Depuis le début de la guerre en Ukraine, Dmitri Rogozine n’a cessé de protester contre les sanctions drastiques imposées par les États-Unis à l’encontre de Moscou, touchant en partie l’industrie aérospatiale russe.

Cette semaine, l’Agence spatiale européenne (ESA) a de son côté annoncé mettre un terme définitif à sa coopération avec la Russie sur la mission conjointe ExoMars, qui était déjà suspendue depuis plusieurs mois.

Dénonçant un " sabotage ", Dmitri Rogozine avait demandé à l’équipage russe de l’ISS d’arrêter de travailler avec le bras robotique de l’ESA, dédié au segment russe de l’observatoire volant.

La Station spatiale, un modèle d’interdépendance mondiale

Après l’arrêt des navettes spatiales américaines en 2011, les États-Unis étaient contraints d’envoyer leurs astronautes vers l’ISS en achetant à Roscosmos des sièges à bord des fusées Soyouz.

Depuis la fin de ce monopole avec le premier vol de SpaceX vers l’ISS en 2020, les équipages volaient quasiment uniquement à bord des fusées de leurs pays respectifs.

Le dernier astronaute à avoir voyagé à bord d’une Soyouz est l’Américain Mark Vande Hei, qui avait décollé en avril 2021. Il était rentré presque un an plus tard, également ramené par Moscou, alors que la guerre en Ukraine avait déjà commencé. Après son retour sur Terre, il avait assuré que les cosmonautes russes restaient " des amis très chers ".

La Station spatiale internationale est unique: elle a " été conçue pour être interdépendante et repose sur les contributions de chacune des agences spatiales pour fonctionner ", a souligné vendredi la Nasa. " Aucune agence n’a la capacité de fonctionner indépendamment des autres. "

Avec AFP