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Des images d’un requin nageant dans les eaux de l’Automobile et Touring Club du Liban (ATCL) et largement partagées sur les réseaux sociaux mercredi soir ont semé la panique parmi la population libanaise. Bien que les riverains se soient inquiétés, les scientifiques se veulent rassurants.

Lorsqu’on évoque les requins, on pense immédiatement aux redoutables grands blancs qui attaquent les bras et les jambes, comme dans les films. Des idées reçues qui ont donné naissance à une énorme vague de " fake news " et " fear news " sur les réseaux sociaux.

En réalité, il n’en ait rien. Au large du Liban et dans la Méditerranée en général, on peut observer plusieurs espèces de requins, qui sont bien connues des pêcheurs. Une étude menée par le Centre de recherches marines du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS) recense environ onze espèces dans nos eaux. Ci-dessous les noms scientifiques et ceux vernaculaires correspondants:

Carcharhinus obscurus: requin requiem de sable, requin obscur ou requin sombre.
Centrophorus uyato: petit squale chagrin.
Dalatias licha: squale liche.
Galeus melastomus: pristiure à bouche noire.
Heptranchias perlo: requin perlon.
Hexanchus griseus: requin griset.
Isurus oxyrinchus: requin mako ou requin-taupe bleu.
Mustelus mustelus: émissole lisse.
Squalus blainville: aiguillat galludo.
Squatina aculeata: ange de mer.
Squatina oculata: ange de mer ocellé.

"Il n’y a aucune raison de s’affoler et de tirer la sonnette d’alarme", affirme à Ici Beyrouth un expert sous le couvert de l’anonymat. "La vaste famille des requins comprend de nombreuses espèces souvent bien plus menacées que menaçantes pour les humains, poursuit-il. Étant donné que les requins se reproduisent plus lentement et atteignent leur maturité plus tardivement que la plupart des autres poissons, ils sont plus vulnérables au risque d’extinction. La principale menace qui pèse sur eux est la pêche. Les pêcheurs les capturent accidentellement dans leurs filets ou intentionnellement pour consommer leur viande."

Plusieurs espèces de requins sont courantes en Méditerranée orientale. Ils se déplacent en profondeur à plus de 20 mètres, ce qui les met généralement hors de portée des pêcheurs. Ils ne présentent que très rarement un risque pour l’espèce humaine.

D’ailleurs, le CNRS publiera dans les prochains jours un communiqué de presse pour tirer la question au clair et rassurer la population.

Amis des écosystèmes

Les requins occupent une position supérieure dans la chaîne alimentaire et jouent un rôle essentiel dans le maintien de l’équilibre de la vie marine, tout comme les autres éléments de cette chaîne. En d’autres termes, si une espèce de requin venait à disparaître, cela aurait des conséquences sur l’ensemble de l’écosystème.

Pour mieux comprendre, prenons l’exemple mentionné dans l’étude citée ci-dessus, relative au déclin des grands requins dans l’Atlantique-Nord. Alors que certaines espèces, telles que les requins à pointes noires, diminuaient en raison de la surpêche le long des côtes américaines, certaines de leurs proies, comme les Rhinoptera, une espèce de raies, se sont multipliées. Ce qui a entraîné une baisse des coquilles de Californie du Nord, qui sont la principale source de nourriture de ces raies. Non seulement cela a eu un impact économique négatif sur les pêcheurs, mais l’absence de ces coquilles a favorisé la prolifération d’algues nuisibles à l’environnement marin.

Mieux connaître les prédateurs

Les espèces de requins observées au large du Liban présentent une diversité de caractéristiques. Leur taille varie généralement entre 50 centimètres et près de trois mètres. Parmi toutes les espèces observées au large du Liban, le requin mako ou requin-taupe bleu est considéré comme le plus agressif, bien que les interactions et les accidents soient très rares.

Ces prédateurs de la Méditerranée se nourrissent principalement de poissons, et parfois de crustacés. Les connaissances sur ces requins sont limitées au Liban, mais des recherches menées dans d’autres régions du monde ont révélé l’existence de liens sociaux entre les individus d’un même groupe. Cependant, les requins se démarquent des autres espèces de poissons par plusieurs caractéristiques distinctes. Leur croissance est plus lente, et ils atteignent leur maturité plus tardivement, malgré leur longue durée de vie. De plus, la période d’incubation de leurs œufs est plus longue que celle des autres poissons.

Un danger, certes, mais pour eux

En conclusion, il est crucial de reconnaître que les requins sont bien plus menacés par l’activité humaine que l’inverse. Les études approfondies sur leur présence dans le sud de la Méditerranée révèlent la nécessité de les protéger en interdisant leur pêche et en favorisant une approche de pêche durable. Les espèces réellement menacées doivent être identifiées afin de mettre en place des mesures de conservation adaptées. Les pêcheurs doivent être encouragés à relâcher dans l’eau les requins vivants, d’autant qu’ils représentent une importance cruciale pour l’équilibre de la vie marine.

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