Le changement climatique met en péril la lutte contre le paludisme, avec plus de 600.000 décès en 2022, selon l’OMS. Les variations climatiques influent sur la survie des moustiques vecteurs de la maladie. L’agence onusienne appelle à une riposte durable tout en prenant des mesures pour ralentir le réchauffement climatique.

Le changement climatique pèse sur la bataille contre le paludisme, qui peine à regagner le terrain perdu lors de la pandémie de Covid-19 et a fait plus de 600.000 morts l’année dernière, a mis en garde jeudi l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Les changements de température, d’humidité et de précipitations peuvent tous influencer le comportement et la survie des moustiques porteurs de la maladie, a souligné l’agence onusienne, dans son rapport annuel consacré à ce fléau.

"Il faut, plus que jamais, riposter au paludisme de façon pérenne et résiliente, et associer à cette action des mesures urgentes visant à ralentir le rythme du réchauffement climatique et à en atténuer les effets", a déclaré le chef de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, soulignant que l’action est d’autant plus urgente dans les régions les plus vulnérables.

Selon l’organisation, une température de 20°C à 27°C est optimale pour la reproduction et la survie des moustiques vecteurs.

"Si ce genre de climat est établi de manière continue sur un territoire, ce sont des risques qui augmentent", explique à l’AFP, le Dr Daniel Ngamije, directeur du programme paludisme à l’OMS.

"On n’en est pas encore là. Mais tout le monde est inquiet, dit-il. On tire la sonnette d’alarme pour que tout le monde se rende compte qu’il est temps d’arrêter cette augmentation des températures dans les années qui vont venir."

Les réfugiés climatiques, forcés de fuir dans des zones où sévit la maladie, pourraient aussi venir gonfler les rangs des malades s’ils ne sont pas immunisés. À l’inverse, en rendant certaines régions plus arides, le dérèglement climatique pourrait aider à éradiquer la maladie des zones où elle est actuellement endémique.

Là comme ailleurs, il faut des financements adéquats. "Il faut mobiliser assez de ressources financières pour combler le déficit de financement qui se portait à 3,7 milliards de dollars en 2022", rappelle le Dr Ngamije.

Il souligne qu’il faut aussi repenser l’engagement de ces ressources "de manière stratégique" pour un impact optimal au lieu de penser "à une stratégie ancienne où il fallait pratiquement intervenir avec tous les outils de prévention de la même manière et partout, sans faire de distinction".

Le directeur plaide aussi pour que l’on facilite l’introduction des nouveaux outils de lutte contre le paludisme au fur et à mesure qu’ils sont disponibles. "Les nouvelles moustiquaires imprégnées d’insecticide coûtent cher, mais il faut que globalement les gens réfléchissent à une stratégie de réduction de leurs prix, souligne le Dr Ngamije. Même chose pour les vaccins dont le prix unitaire devrait être, si possible, négocié."

Si l’OMS estime que la résistance partielle à l’artémisinine – utilisée pour traiter le paludisme – "est une préoccupation croissante", elle fonde de grands espoirs sur le déploiement à grande échelle en Afrique du RTS, le premier vaccin antipaludique au monde, à la suite d’un projet pilote couronné de succès.

L’organisation a également donné son approbation à un second vaccin, le R21, en octobre.

Il y en a eu 249 millions d’enregistrés en 2022, soit 5 millions de plus qu’en 2021 et 233 millions en 2019, avant la pandémie de Covid-19.

Ces cas supplémentaires sont essentiellement concentrés dans cinq pays: le Pakistan, l’Éthiopie, le Nigéria, l’Ouganda et la Papouasie-Nouvelle-Guinée.

Les dépenses totales contre le paludisme ont atteint 4,1 milliards de dollars en 2022.

Ce montant est "bien inférieur aux 7,8 milliards de dollars requis à l’échelle mondiale" pour qu’en 2030 le nombre de cas et la mortalité soient inférieurs de 90% au niveau de 2015.

Avec AFP