Manon Ouaiss, 22 ans, va disputer dans quelques jours (16 et 18 février), les épreuves du slalom et slalom géant des championnats du monde de ski alpin, qui se tiendront à Courchevel (France). Dans un entretien avec Ici Beyrouth, Ouaiss devoile quelques pistes pour améliorer le ski libanais et nous révèle en exclusivité sa décision d’arrêter sa carrière de skieuse après les Mondiaux, pour se consacrer pleinement à sa carrière professionnelle d’avocate.

Vous allez participer aux championnats du monde 2023 de ski alpin. Quand seront vos courses?

Le 16 et le 18 février.

Est-ce que vous allez continuer votre carrière de skieuse après les championnats du monde?

Malheureusement, je vais arrêter. La raison est que c’est un investissement immense de temps, d’émotions et de budget.

Vous souhaitez vous consacrer entièrement à votre carrière professionnelle d’avocate? 

Oui. En ce moment, je suis en 5e année de droit à la Sorbonne. Je ne peux plus concilier les ambitions sportives et professionnelles. Je préfère me consacrer à 100% à ma carrière professionnelle en droit, qui me semble être un meilleur investissement.

Vous allez participer aux championnats du Liban cette saison après les championnats du monde?

Il n’y a pas de certitude quant à la tenue des championnats du Liban en raison du climat cette saison. Les championnats du monde devraient donc être ma dernière course.

À quel âge avez-vous débuté la compétition et quand avez-vous commencé à avoir de bons résultats?

J’ai commencé la compétition à 6 ans avec les courses interclubs. Le club où j’ai débuté est le Faraya Sporting Club, qui est l’un des deux principaux avec le Club des Sports. J’ai fait mes premiers championnats du Liban à 11 ans, et j’ai été championne dès ma première participation. Puis de 11 à 18 ans, j’ai gagné une partie importante des compétitions de mes catégories d’âge successives.

À quel âge avez-vous commencé à dominer le circuit libanais chez les dames, en senior?

Ma première année junior, j’étais éligible pour les jeux Olympiques (JO) d’hiver de PyeongChang 2018. J’étais en lice pour la qualification, mais une blessure à la clavicule m’a empêchée de poursuivre les compétitions cette année-là et donc de me qualifier. J’ai ensuite été plusieurs fois championne du Liban.

Quel est votre palmarès au niveau asiatique?

J’ai été deuxième dans les championnats asiatiques U16 en 2017 et j’ai été championne d’Asie senior en 2022.

Qu’est-ce qui est à votre avis à améliorer dans la carrière des skieurs libanais?

Il faudrait que les skieurs libanais skient davantage pour avoir un maximum d’expérience. Il faut expérimenter tous les paramètres, sachant qu’ils sont très nombreux et importants à expérimenter pour progresser. Dans d’autres sports comme la natation, par exemple, les paramètres sont davantage stables à chaque fois. Au ski, plusieurs paramètres changent à chaque fois. La piste d’abord, qu’on découvre à chaque fois, raide ou pas, étroite ou pas, présence de verglas. La qualité de la neige change elle aussi à chaque fois: molle, dure… Dernier paramètre, le tracé change à chaque fois, qui peut être plus ou moins serré ou tournant selon les cas de figure. Au Liban, il n’y a pas assez de suivi physique et cet aspect est très important pour être performant sur les skis.

Quand avez-vous commencé à faire de la préparation physique sérieusement?

À partir de la catégorie U16, je me suis davantage préparée physiquement.

Que recommandez-vous à la fédération pour les futures générations de skieurs?

Un meilleur encadrement. Commencer la saison tôt, dès mi-novembre jusqu’à mi-avril. Le travail doit durer toute l’année pour les skieurs et pas uniquement au moment de la saison hivernale. Par exemple, dans mon cas, cette saison j’ai fait un stage en été dans l’hémisphère sud pour skier. La principale contrainte est le manque de financements destinés au sport de la part du secteur public. Des pays comme la Belgique ou la Grande-Bretagne produisent des champions sans avoir un climat et un territoire propices à la pratique du ski.

Les jeux Olympiques étaient la plus belle expérience de votre parcours de skieuse?

Oui. Déjà, le fait que cet événement n’a lieu qu’une fois tous les quatre ans lui donne une dimension très rare. Il y a une dynamique et une énergie particulière aux JO. Cela dépasse le cadre sportif; c’est dans le fait de réunir toutes les nations du monde dans tous les sports d’hiver autour de leur passion et de leurs valeurs communes au même endroit pendant deux semaines.

Quel souvenir vous gardez de votre titre asiatique en ski alpin?

Je m’étais bien préparée mentalement pour cet événement. J’étais bien concentrée sur mon objectif, et quand je l’ai atteint, j’ai été très émue. Ce titre est arrivé quelques semaines après ma participation aux JO. C’était un peu la cerise sur le gâteau. Je suis devenue Olympienne et dans la foulée championne d’Asie. C’est un titre prestigieux et j’en suis très contente.

Est-ce que vous pensez être la meilleure skieuse alpine de l’histoire du Liban?

Il y a eu Chirine Njeim (NDLR: Njeim a participé à 3 JO d’hiver et a fait une fois les JO d’été), mais je peux difficilement me comparer à elle car elle s’est rendue très jeune aux États-Unis pour faire un sport-études. Elle est impressionnante et c’est de loin la meilleure skieuse que le Liban ait connue.

Quel sera votre objectif sportif pour les championnats du monde?

Mon objectif sera d’être classée en milieu de tableau, dans le top 50.

[email protected]