Vient-on d’assister au 116ᵉ et tout dernier match de l’inégalable carrière de Rafael Nadal à Roland-Garros? L’Espagnol aux 14 triomphes sur la terre battue parisienne a été poussé vers la sortie dès le premier tour, lundi, par le N°4 mondial, Alexander Zverev.

"Mais tout peut changer aujourd’hui. Et le premier jour du reste de ta vie". Faut-il voir un présage dans la chanson d’Etienne Daho, lancée sur les enceintes du court Philippe-Chatrier quelques instants avant son entrée sur le stade de ses plus grands exploits, celui dont il avait fait sa forteresse depuis 2005?

Pour la première fois en 19 participations au Grand Chelem parisien en tout cas, "Rafa" en a été chassé d’entrée, 6-3, 7-6 (7/5), 6-3 en un peu plus de trois heures par Zverev, un des candidats au trophée cette année, sur la lancée de son titre au Masters 1000 de Rome.

Et rien ne garantit que l’Espagnol y reviendra.

Comme ce week-end en conférence de presse d’avant-tournoi, Nadal a répété qu’il y avait un "gros pourcentage" de chance qu’il s’agisse de son dernier Roland-Garros, mais il a ajouté qu’il ne voulait pas l’affirmer "à 100%".

"Maintenant, mon objectif principal est de jouer les JO (le tournoi olympique aura lieu à Roland-Garros, NDLR)", a-t-il donné rendez-vous.

Sous les yeux de Djokovic, Alcaraz et Swiatek

Lancé dans un énième retour début 2024, mais rapidement stoppé dans son élan en Australie, puis reparti au combat tant bien que mal au printemps quand la terre battue, sa surface chérie, a déployé sa couleur orangée sur les courts, l’Espagnol aux 22 sacres en Grand Chelem a été rattrapé par la réalité lundi après-midi, lui qui va fêter ses 38 ans le 3 juin. Et ce ne sera pas à Roland-Garros, pour une des très rares fois de ces vingt dernières années.

Ovation crescendo, et finalement les quelque 15.000 spectateurs du court Central debout, quand le speaker du stade a égrené les quatorze années où le gaucher majorquin a été couronné sur la terre battue parisienne; applaudissements à tout rompre à la moindre occasion, des "Rafa" époumonés sur tous les rythmes: le public parisien a fêté et poussé Nadal autant que possible.

Même Novak Djokovic, Carlos Alcaraz et Iga Swiatek, tous trois en plein Grand Chelem, avaient pris place en tribunes.

Face à un des joueurs les plus en forme du moment, tenue bleu ciel à l’opposé du ciel parisien, gris et pluvieux, qui a forcé à jouer toit fermé, "Rafa" s’est escrimé tant qu’il a pu, avec ses moyens limités du moment.

Il y a eu ce regain d’énergie dans la deuxième manche, qui lui a permis de servir pour égaliser à un set partout. En vain. Il y a eu ce break d’entrée dans la troisième, comblé immédiatement par Zverev.

La revanche de Zverev

Il y a eu du mieux par rapport au Nadal des dernières semaines, quelques fulgurances aussi, mais pas assez de régularité pour tenir tête au grand Allemand.

Même sur sa terre sacrée, la montagne Zverev a été infranchissable pour Nadal.

Deux ans après sa sérieuse blessure à la cheville, survenue en pleine demi-finale contre le champion espagnol Porte d’Auteuil, l’Allemand de 26 ans a pris sa revanche.

Au deuxième tour, il affrontera soit le jeune Français Giovanni Mpetshi Perricard (66ᵉ), fraîchement titré à Lyon, soit le Belge David Goffin (115ᵉ).

Nadal n’a plus gagné le moindre trophée depuis son dernier sacre à Roland-Garros, en 2022, au bout d’une quinzaine traversée dans des conditions invraisemblables, pied gauche anesthésié pour contenir la douleur provoquée par le mal chronique dont il souffre depuis l’âge de 18 ans (syndrome de Müller-Weiss).

Il a très peu joué depuis, tant son corps a craqué de toutes parts: moins de trente matches en deux ans.

Pour l’instant, Nadal n’est pas décidé à dire stop pour de bon. Jusqu’à quand? "Rester debout, mais à quel prix?", chante Etienne Daho.