Catherine Chabaud avait fermé ce chapitre de sa vie mais la députée européenne s’est finalement lancée dimanche dans sa première course en solitaire depuis plus de 20 ans, avec le " Cigare rouge ", qu’elle veut mener sur la Route du Rhum dans un air de revanche.

Au large de Cherbourg, Chabaud (Formatives network) a pris le départ de la Drheam Cup, qualificative pour la mythique transatlantique, dimanche à bord de ce monocoque hors norme de 18,28 mètres. Il avait été surnommé " Cigare rouge " par Jean-Luc van den Heede dès sa conception pour le Vendée Globe 1992/1993 du fait de son étroitesse et de sa couleur rouge.

Reconnaissable à sa coque rouge et à ses deux mâts, rouges aussi, qui en font sa singularité, il avait permis à Chabaud de devenir la première femme à boucler la course autour du monde en solitaire (Vendée Globe) en 1996/1997.

" Je n’ai pas fait de solitaire depuis mon dernier Vendée Globe 2000/2001. Après j’ai arrêté la course au large. Ça fait 20 ans que j’ai changé de métier ", a raconté à l’AFP avant le départ celle qui est devenue députée européenne (groupe Renew Europe) il y a 3 ans.

Mais alors pourquoi revenir ? Pour satisfaire " probablement un vrai besoin d’être en mer longtemps toute seule, de retrouver un peu d’intimité avec la mer. Et puis il y a l’opportunité de ce bateau ", explique-t-elle.

Défi à 60 ans

Avec pour ami commun Van den Heede, Chabaud et son compagnon Jean-Marie Patier se sont rencontrés " grâce à ce bateau ", qu’ils étaient venus l’un et l’autre accueillir à l’arrivée d’une course. " 17 ans et un gamin plus tard, on est toujours ensemble! ", souligne le couple.

Le " Cigare rouge ", lui, a été en passe d’être détruit avant que Patier ne le rachète à l’état d’épave, avec l’idée de faire la Route du Rhum, cette course transatlantique quadriennale en solitaire. Ce qu’il a fait en 2018 (4e place en catégorie Rhum Mono).

Chabaud, elle, joue les femmes de marins, jusqu’à l’année dernière.

" L’envie est venue à la fois parce que la mer me manque. Et, là on va déguster ! Mais je sais que j’ai un bon bateau! ", dit-elle en tapotant sur la coque.

" J’ai passé 4 mois et demi à bord mais c’est plus du tout le même bateau. Et j’ai 26 ans de plus. Mon défi est surtout physique dans cette affaire. C’est bête à dire mais je fête mes 60 ans à la fin de l’année, et c’est aussi dans mon défi personnel. Il faut que je me bouge un peu ", confie la navigatrice en montrant joyeusement le bleu qu’elle vient de se faire à l’avant-bras droit lors d’une manœuvre.

Revanche et appel pour l’océan

Le monocoque a vécu une cure de rajeunissement mais il reste obsolète pour être encore dans la classe Imoca (bateaux exclusifs du Vendée Globe). En revanche, grâce aux catégories Rhum Mono et Rhum Multi (des bateaux qui n’entrent pas ou plus dans des classes), la Route du Rhum permet à ces voiliers légendaires de participer encore à des courses.

Et ça tombe bien car Chabaud à " une petite revanche personnelle à prendre " avec la Route du Rhum. Pour sa seule participation en 1998, elle avait démâté à 800 milles de l’arrivée.

" Il y a un petit goût amer pour moi, je l’ai courue mais je ne l’ai pas bouclée. Et c’est terriblement frustrant. J’ai monté des dossiers pendant des années et quand finalement, j’ai réussi à la courir, elle a été inachevée ", explique-t-elle.

Sans oublier que cette élue et femme engagée entend mettre en lumière son combat pour la préservation de la mer et son appel pour que l’océan soit reconnu comme bien commun aux Nations Unies. " Je trouve que les choses n’avancent pas assez vite ", regrette-t-elle.