L'Allemagne songe à une prolongation du nucléaire
©Le Chancelier allemand Olaf Scholz devant la turbine du gazoduc Nord Stream 1 (AFP)
Face à la limitation des livraisons de gaz russe au profit de l'Allemagne, le Chancelier fédéral allemand Olaf Scholz a évoqué une possible prolongation de l'exploitation du nucléaire. En effet, le gazoduc Nordstream 1, qui relie la Russie à l'Allemagne, ne fournit depuis mi-juillet que 20% de sa capacité en gaz, en raison d'une turbine défectueuse. L'Allemagne avait décidé de sortir de l'énergie nucléaire cette année en fermant ses trois dernières centrales nucléaires. Le chancelier allemand a cependant considéré que la prolongation "peut quand même avoir du sens".

Olaf Scholz a ouvert mercredi la voie à une prolongation de la durée d'exploitation des trois dernières centrales nucléaires en activité en Allemagne, face aux craintes croissantes de crise énergétique liée au bras de fer gazier avec la Russie.

Les dernière centrales nucléaires "ne sont pertinentes que pour la production d'électricité et seulement pour une petite partie de celle-ci", mais "cela peut quand même avoir du sens" de ne pas les couper du réseau comme prévu, a affirmé le chancelier allemand.

La centrale nucléaire d'Isar en Allemagne

L'Allemagne a en principe décidé de sortir de l'énergie nucléaire à la fin de cette année.

La raréfaction des livraisons de gaz russe en Allemagne, dans le contexte de la guerre en Ukraine, a toutefois remis sur le tapis la question de maintenir les dernières centrales en activité plus longtemps que prévu.

Berlin doit trancher dans les prochaines semaines en s'appuyant sur une expertise en cours, la deuxième du genre. "Nous tirerons ensuite nos conclusions", a dit le chancelier en visite à Mülheim an der Ruhr.
Problème douanier

Il s'est rendu sur le site de l'industriel Siemens Energy, où une turbine à gaz, récemment réparée au Canada, est destinée à équiper le gazoduc Nord Stream 1 reliant la Russie à l'Allemagne.

Mais elle reste actuellement bloquée en Allemagne et Berlin et Moscou divergent sur les raisons.

Olaf Scholz a accusé mercredi la Russie d'être responsable du blocage de la livraison de cet équipement sans lequel le gazoduc ne peut pas, selon Moscou, fonctionner normalement. Le "tuyau" ne fournit depuis mi-juillet que 20% de sa capacité en gaz.



"Il n'y a aucune raison qui empêcherait la livraison d'avoir lieu" et Moscou doit juste "fournir les informations douanières nécessaires pour son transport vers la Russie", a-t-il martelé.

L'opérateur russe Gazprom accuse lui Siemens Energy de ne pas avoir envoyé les documents nécessaires pour permettre une remise en marche de la turbine, ce dont l'entreprise se défend.


"Cette situation tendue et absurde a été provoquée par les restrictions et les sanctions" occidentales, a dénoncé mercredi le porte-parole du Kremlin Dmitri Peskov.
Moyens de pression

Gazprom a reçu mercredi le soutien de l'ancien chancelier allemand Gerhard Schröder, très lié au Kremlin et aux groupes énergétiques russes, et qui a mis en cause Siemens.

Berlin soupçonne en fait Moscou dans cette affaire d'utiliser la turbine comme "prétexte" pour des pressions politiques sur les Occidentaux dans le cadre de la guerre Ukraine.

Lors d'une récente rencontre avec Gerhard Schröder, le président Vladimir Poutine a assuré qu’il était "technologiquement possible", faute de pouvoir utiliser pleinement Nord Stream 1, de procéder aux livraisons de gaz par le gazoduc Nord Stream 2, qui "est prêt à être utilisé à n’importe quel moment", a indiqué M. Peskov.

Sous pression de ses alliés, l'Allemagne avait fini par suspendre - avant sa mise en service - ce pipeline, très controversé car il devait accentuer la dépendance de l'Europe au gaz russe. Cette décision avait été prise deux jours avant le début de l'invasion russe de l'Ukraine.

Face à l'enlisement de la crise gazière, l'Allemagne, à l'instar de nombreux autres pays européens, cherche à compenser avec d'autres sources d'énergie.

Le gazoduc Nord Stream II (AFP)

Une remise en cause de l'arrêt du nucléaire en fin d'année, décidé en 2011 par Angela Merkel après la catastrophe de Fukushima, serait politiquement une mesure très forte.

Les trois centrales nucléaires encore en activité -en Bavière, Basse-Saxe et Bade-Wurtemberg- concourent pour 6% de la production nette d'électricité en Allemagne.

La question divise néanmoins la coalition gouvernementale, les Verts étant sceptiques, et les libéraux du FDP favorables.

M. Scholz a justifié sa prise de position par le fait que l'Allemagne devait se montrer solidaire" avec d'autres pays européens dont les propres centrales sont à l'arrêt, et aussi par un développement des énergies renouvelables en Allemagne plus lent que prévu.

"C'est particulièrement vrai en Bavière, qui a progressé lentement avec l'expansion de l'énergie éolienne", a-t-il lancé, dans une pique à l'adresse de cette région historiquement dirigée par les conservateurs.

Avec AFP
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