Dans le communiqué conjoint publié par le président français Emmanuel Macron et le prince héritier saoudien, Mohammad Ben Salman, après leur entretien samedi à Djeddah, chaque mot, chaque phrase témoigne de l’incapacité du Liban à recouvrer la place qu'il occupait dans la région.
Le Liban est incapable d’engager des réformes, de préserver ses frontières et de faire en sorte que ses forces militaires aient, seules, le monopole des armes. Il suffit de partir de ce constat pour réaliser à quel point la démission de Georges Cordahi ou son maintien au gouvernement importent peu. C’est blanc bonnet et bonnet blanc. Georges Cordahi n’est qu’un détail futile dans une affaire qui le dépasse, dans un pays dans la tourmente, ouvert à tous vents.
La faute à ce niveau incombe principalement au Premier ministre Nagib Mikati qui fournit certes des efforts colossaux pour sauver ce qui peut l’être encore du Liban, mais qui a quand même accepté d’avoir dans son équipe des ministres du niveau de celui de l’Information. C’est à se demander cependant s’il aurait pu agir autrement lorsqu’on sait que, pour des raisons qui lui sont propres, il s’est montré disposé à former un gouvernement à n"importe quel prix dans le cadre d’une entente avec la France...
Quoi qu’il en soit, l’enjeu principal aujourd’hui est la place du Liban dans la région. Est-il ou non un pays arabe ? Un ami du monde civilisé, notamment l’Europe, ou un Etat satellite gravitant dans l’orbite iranienne ? C’est ce genre de questions que la France aurait dû se poser avant de s’engager dans une médiation entre un Etat que le Hezbollah contrôle et manipule, et les pays du Golfe avec à leur tête l’Arabie saoudite.
Car le Liban est passé du statut d’Etat entretenant des relations solides avec les pays du Golfe, où plus d’un million de Libanais gagnent leur vie, à celui d'Etat hostile à ces pays. Au final, les propos de Georges Cordahi sur le Yémen ne sont que le reflet de la situation dans laquelle le pays se trouve, voire de l’ignorance libanaise. Ni plus ni moins. C’est la situation d’un Etat qui s’acharne à défendre des causes qu’il n’a pas du tout intérêt à défendre, alors qu’il est devenu une plateforme pour le trafic de drogue et autres vers les pays du Golfe.
Le président français et le prince héritier saoudien exigent pratiquement l’impossible. Riyad a bien fait de soumettre Paris à ce test. Il suffit d’évoquer le contrôle des frontières libanaises pour réaliser rapidement que Beyrouth est parfaitement incapable de l’exercer. Le Hezbollah a décidé en 2012, et peut-être même avant, de s’engager dans la guerre lancée par le régime syrien contre son peuple, et le gouvernement libanais n’a pu rien faire à ce niveau. Les frontières libano-syriennes sont ouvertes et se trouvent sous le contrôle du Hezbollah, c’est-à-dire de l’Iran.
Un état maladif
La situation du Liban s’assimile à un état maladif reflété par un animateur de télévision, dont l'esprit politique n'a jamais vraiment évolué et qui se permet de discourir sur la politique arabe. Il ne suffit pas d’être une vedette de la télévision à succès et de bénéficier d'une tonalité de voix acceptable pour se permettre des opinions politiques, notamment au sujet du Yémen dont les complications sont innombrables. L’une d’elles s’exprime par le fait que la partie nord du Yémen s’est transformée en base pour le lancement de roquettes et de drones iraniens et qu’elle se caractérise par une longue frontière avec l’Arabie saoudite. Comment un Libanais, n’importe quel Libanais, peut-il s’aventurer dans les dédales d’une crise de ce genre afin de pouvoir obtenir un satisfecit du Hezbollah et prouver son allégeance au régime minoritaire syrien qui livre une guerre contre son peuple?
Ce que les dernières semaines ont surtout montré, c’est que le Liban agonise. Et le sort de ce pays n’a l’air de préoccuper personne, pas même le président de la République Michel Aoun, qui semble ne se soucier que d'une chose: se montrer conciliant avec le Hezbollah, dans l’espoir de voir son gendre, Gebran Bassil, lui succéder à Baabda en 2022.
Les dernières semaines ont aussi montré que la politique française au Liban est inefficace. Il n'est pas demandé à Paris de s’engager dans une confrontation avec le Hezbollah, mais il ne faut pas non plus qu’il se soumette à l’Iran au Liban. Et c’est ce que la France n’a eu de cesse de faire depuis l’explosion du port de Beyrouth, le 4 août 2020 : une soumission totale à l’Iran. Il est tout simplement apparu que la France ne reconnaît plus le Liban et ne veut plus savoir ce qu’est le Hezbollah ou prendre connaissance du comportement de l’Iran à l’intérieur et en dehors de ses frontières, notamment au Yémen. La France ne sait pas ce que signifie la formation d’un gouvernement libanais au sein duquel le Hezbollah détient la majorité. L’un des signes les plus frappants de la volonté de Téhéran de ne pas lâcher prise au Liban est l’empressement du chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir-Abdollahian, de se rendre à Beyrouth tout de suite après la formation du gouvernement de Nagib Mikati, en septembre dernier.
Amir-Abdollahian est venu pour parler de la disposition de son pays à construire des centrales électriques au Liban et à ressusciter le port de Beyrouth. Il est venu dire que c’est l’Iran qui a le mot de la fin dans ce pays, au moment où la France a les yeux rivés sur l’électricité et le port de Beyrouth.
La démission de Georges Cordahi ne changera donc rien à rien. Les pays du Golfe le savent parfaitement. Ils savent où se situe aujourd’hui le Liban et ce que le Hezbollah entreprend au niveau de toute la région, jusqu’au Yémen. La question est de savoir si la France sait en revanche que le fait d’être au service de l’Iran au Liban relève d’une politique sans horizon. Au mieux, cette politique déboucherait sur une consécration de la mainmise de la « République islamique » d’Iran sur ce petit pays - et sur Beyrouth plus précisément. Les belles paroles ne suffisent pas. Que peut réaliser la France au Liban, en dehors de ses belles paroles à propos d’un pays où tout a changé ? Une chose est sûre : elle est incapable de transformer ses propos en actes, c’est-à-dire d’œuvrer pour mettre en oeuvre ce que réclament les pays du Golfe, qui se sont tenus en permanence aux côtés d’un Liban dont le président refuse de reconnaître les agissements du Hezbollah. Ce que le Hezbollah entreprend au profit de l’Iran est un crime à l’encontre du Liban et des relations qu’il entretient avec les pays du Golfe.
Nous sommes en droit aujourd'hui de nous interroger sur le poids de la France auprès de l'Iran et son influence sur ce pays, quand on sait surtout que ce qui importe à Téhéran c'est de conclure un marché avec les Etats-Unis. La position de la France lui importe peu. Les intérêts du Liban aussi.
Le Liban est incapable d’engager des réformes, de préserver ses frontières et de faire en sorte que ses forces militaires aient, seules, le monopole des armes. Il suffit de partir de ce constat pour réaliser à quel point la démission de Georges Cordahi ou son maintien au gouvernement importent peu. C’est blanc bonnet et bonnet blanc. Georges Cordahi n’est qu’un détail futile dans une affaire qui le dépasse, dans un pays dans la tourmente, ouvert à tous vents.
La faute à ce niveau incombe principalement au Premier ministre Nagib Mikati qui fournit certes des efforts colossaux pour sauver ce qui peut l’être encore du Liban, mais qui a quand même accepté d’avoir dans son équipe des ministres du niveau de celui de l’Information. C’est à se demander cependant s’il aurait pu agir autrement lorsqu’on sait que, pour des raisons qui lui sont propres, il s’est montré disposé à former un gouvernement à n"importe quel prix dans le cadre d’une entente avec la France...
Quoi qu’il en soit, l’enjeu principal aujourd’hui est la place du Liban dans la région. Est-il ou non un pays arabe ? Un ami du monde civilisé, notamment l’Europe, ou un Etat satellite gravitant dans l’orbite iranienne ? C’est ce genre de questions que la France aurait dû se poser avant de s’engager dans une médiation entre un Etat que le Hezbollah contrôle et manipule, et les pays du Golfe avec à leur tête l’Arabie saoudite.
Car le Liban est passé du statut d’Etat entretenant des relations solides avec les pays du Golfe, où plus d’un million de Libanais gagnent leur vie, à celui d'Etat hostile à ces pays. Au final, les propos de Georges Cordahi sur le Yémen ne sont que le reflet de la situation dans laquelle le pays se trouve, voire de l’ignorance libanaise. Ni plus ni moins. C’est la situation d’un Etat qui s’acharne à défendre des causes qu’il n’a pas du tout intérêt à défendre, alors qu’il est devenu une plateforme pour le trafic de drogue et autres vers les pays du Golfe.
Le président français et le prince héritier saoudien exigent pratiquement l’impossible. Riyad a bien fait de soumettre Paris à ce test. Il suffit d’évoquer le contrôle des frontières libanaises pour réaliser rapidement que Beyrouth est parfaitement incapable de l’exercer. Le Hezbollah a décidé en 2012, et peut-être même avant, de s’engager dans la guerre lancée par le régime syrien contre son peuple, et le gouvernement libanais n’a pu rien faire à ce niveau. Les frontières libano-syriennes sont ouvertes et se trouvent sous le contrôle du Hezbollah, c’est-à-dire de l’Iran.
Un état maladif
La situation du Liban s’assimile à un état maladif reflété par un animateur de télévision, dont l'esprit politique n'a jamais vraiment évolué et qui se permet de discourir sur la politique arabe. Il ne suffit pas d’être une vedette de la télévision à succès et de bénéficier d'une tonalité de voix acceptable pour se permettre des opinions politiques, notamment au sujet du Yémen dont les complications sont innombrables. L’une d’elles s’exprime par le fait que la partie nord du Yémen s’est transformée en base pour le lancement de roquettes et de drones iraniens et qu’elle se caractérise par une longue frontière avec l’Arabie saoudite. Comment un Libanais, n’importe quel Libanais, peut-il s’aventurer dans les dédales d’une crise de ce genre afin de pouvoir obtenir un satisfecit du Hezbollah et prouver son allégeance au régime minoritaire syrien qui livre une guerre contre son peuple?
Ce que les dernières semaines ont surtout montré, c’est que le Liban agonise. Et le sort de ce pays n’a l’air de préoccuper personne, pas même le président de la République Michel Aoun, qui semble ne se soucier que d'une chose: se montrer conciliant avec le Hezbollah, dans l’espoir de voir son gendre, Gebran Bassil, lui succéder à Baabda en 2022.
Les dernières semaines ont aussi montré que la politique française au Liban est inefficace. Il n'est pas demandé à Paris de s’engager dans une confrontation avec le Hezbollah, mais il ne faut pas non plus qu’il se soumette à l’Iran au Liban. Et c’est ce que la France n’a eu de cesse de faire depuis l’explosion du port de Beyrouth, le 4 août 2020 : une soumission totale à l’Iran. Il est tout simplement apparu que la France ne reconnaît plus le Liban et ne veut plus savoir ce qu’est le Hezbollah ou prendre connaissance du comportement de l’Iran à l’intérieur et en dehors de ses frontières, notamment au Yémen. La France ne sait pas ce que signifie la formation d’un gouvernement libanais au sein duquel le Hezbollah détient la majorité. L’un des signes les plus frappants de la volonté de Téhéran de ne pas lâcher prise au Liban est l’empressement du chef de la diplomatie iranienne, Hossein Amir-Abdollahian, de se rendre à Beyrouth tout de suite après la formation du gouvernement de Nagib Mikati, en septembre dernier.
Amir-Abdollahian est venu pour parler de la disposition de son pays à construire des centrales électriques au Liban et à ressusciter le port de Beyrouth. Il est venu dire que c’est l’Iran qui a le mot de la fin dans ce pays, au moment où la France a les yeux rivés sur l’électricité et le port de Beyrouth.
La démission de Georges Cordahi ne changera donc rien à rien. Les pays du Golfe le savent parfaitement. Ils savent où se situe aujourd’hui le Liban et ce que le Hezbollah entreprend au niveau de toute la région, jusqu’au Yémen. La question est de savoir si la France sait en revanche que le fait d’être au service de l’Iran au Liban relève d’une politique sans horizon. Au mieux, cette politique déboucherait sur une consécration de la mainmise de la « République islamique » d’Iran sur ce petit pays - et sur Beyrouth plus précisément. Les belles paroles ne suffisent pas. Que peut réaliser la France au Liban, en dehors de ses belles paroles à propos d’un pays où tout a changé ? Une chose est sûre : elle est incapable de transformer ses propos en actes, c’est-à-dire d’œuvrer pour mettre en oeuvre ce que réclament les pays du Golfe, qui se sont tenus en permanence aux côtés d’un Liban dont le président refuse de reconnaître les agissements du Hezbollah. Ce que le Hezbollah entreprend au profit de l’Iran est un crime à l’encontre du Liban et des relations qu’il entretient avec les pays du Golfe.
Nous sommes en droit aujourd'hui de nous interroger sur le poids de la France auprès de l'Iran et son influence sur ce pays, quand on sait surtout que ce qui importe à Téhéran c'est de conclure un marché avec les Etats-Unis. La position de la France lui importe peu. Les intérêts du Liban aussi.
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