Les magistrats libanais se disent prêts à suspendre pour deux mois leur mouvement de grève en signe de bonne volonté, et descendent littéralement la classe politique et ses électeurs.
La grève observée par la magistrature depuis le mois dernier est incontestablement l’expression non pas des difficultés socio-économiques rencontrées au quotidien par les juges, mais une véritable fronde dirigée contre la classe au pouvoir. Certes, les juges ont suspendu leurs activités pour protester contre une dévaluation terrible de leurs salaires, qui sont tombés à moins de 100 dollars par mois, avec l’envolée du dollar, mais leur ras-le-bol est surtout dirigé contre une classe au pouvoir indifférente, incompétente et soucieuse de ses seuls intérêts. Elle est aussi dirigée contre une base populaire qui, au fil des années, a permis à cette classe dirigeante de se reproduire et d’étendre ses tentacules à l’ensemble de l’État libanais qu’elle a fini par étrangler.
Le ton du communiqué publié samedi par les juges pour annoncer une volonté franche de faire un pas en direction des autorités à condition que celles-ci les retrouvent à mi-chemin et qu’elles tiennent compte de leur revendication est des plus violents, sans être diffamatoire. Il dresse un tableau tragique d’une situation qui s’applique non seulement au corps de la magistrature, mais pratiquement à tous les secteurs d’activités professionnelles au Liban. Leur initiative est motivée par leur souci de ne pas bloquer le secteur de la justice et de sanctionner ainsi une population qu’ils ont quand même secouée, en soulignant la responsabilité des électeurs dans le maintien au pouvoir d’une équipe politique responsable de la déliquescence de l’État libanais.
D’emblée, ils ont affirmé dans le texte qu’ils sont « les premiers lésés par la grève qu’ils ont décrétée à leur corps défendant, parce qu’elle les arrache de leur lieu naturel, qui est sur le point de s’effondrer, à savoir le Palais de justice ». Ils se sont en outre dits « perdus entre deux : rendre justice d’une part à ceux qui ont besoin d’eux et qui essayent de ne pas quitter le pays, tout en évitant que les dossiers judiciaires s’amoncellent et, d’autre part, l’avenir de leurs enfants, eux aussi victimes d’une injustice sans nom ».
« Nous n’avons perçu en août que ces semblants de salaires dont la valeur varie entre 95 dollars et 235 dollars, suivant le taux de change du marché noir, et avec 19 jours de retard », ont martelé les juges, en rappelant que c’est en désespoir de cause qu’ils avaient fini par décréter une grève « en raison de l’indifférence totale des deux autorités exécutive et législative durant ce qui a été faussement appelée une crise ». « En fait il s’agit de l’échec » du pouvoir, ont-ils asséné, avant d’exposer les difficultés auxquelles ils ont été exposés pour gérer leur quotidien durant les trois dernières années. « Il nous arrivait de payer de notre poche le prix des fournitures de base, privant nos familles de cet argent, pendant que les deux autres pouvoirs étaient occupés à… perdre le temps », ont-ils poursuivi.
Tirant à boulets rouges sur l’Exécutif et le Législatif, ils ont affirmé : « Leurs instruments ont énormément dénigré la magistrature récemment, même si celle-ci est entachée de quelques anomalies que tout me monde connaît », en allusion à l’action de certains juges qui ont accepté d’être des outils du pouvoir politique, exécutant leurs directives au lieu de se mettre au service de la justice.
« Nul n’empêche de nettoyer la justice de toutes ses anomalies. Sauf ceux qui, connus de tous, empêchent toutes formes de redditions de comptes et barrent la voie au vote d’une loi qui libérerait cette justice de leur emprise », ont accusé les magistrats, avant de commenter : « Nous ne parlons pas d’individus mais d’un système dont le maintien semble voulu par plusieurs, comme le montrent les résultats des élections (législatives) à chaque fois qu’elles sont organisées ».
La loi sur l’indépendance de la justice
« Les juges contraints de se mettre en grève insistent sur le vote d’une loi sur l’indépendance de la justice, authentique et non pas vidée de son contenu, avec un texte qui n’a de l’indépendance que le nom », ont-ils fait valoir en mettant en garde dans le même temps, contre le projet de loi sur le contrôle des capitaux, soumis à la Chambre, dans la mesure où son application « porterait le coup de grâce à tout espoir des déposants de récupérer leur argent » bloqué dans les banques.
Ils ont dans le même temps averti que si jamais ce texte est voté dans sa formule actuelle, « ils vont être obligés malgré eux de l’appliquer, aussi injuste soit-il, par respect pour la Constitution et pour le principe de séparation des pouvoirs ». « À ce moment-là, qu’on ne blâme que ceux qui ont voté » pour la même classe politique, ont-ils de nouveau asséné.
Tout en annonçant qu’« ils ne renonceront pas à leur revendication ponctuelle, en rapport avec un salaire qui corresponde au taux réel du dollar, avec un effet rétroactif sur trois ans », ils ont affirmé être disposés à « suspendre pour deux mois leur mouvement de protestation si leurs salaires sont versés momentanément au taux du jour de Sayrafa ». La grève sera ainsi suspendue momentanément, le jour où ils seront payés suivant cette condition, ont-ils assuré.
Les magistrats ont remercié « tous ceux qui essaient de régler » leur dossier, mais ils leur ont demandé de « ne pas perdre leur temps avec moins de ce qui est requis ». « La coupe est pleine et plus personne ne se laissera duper par le refrain de « la mission » ou du « sacrifice » du juge, depuis que la justice elle-même a été sacrifiée », ont conclu les magistrats.
La grève observée par la magistrature depuis le mois dernier est incontestablement l’expression non pas des difficultés socio-économiques rencontrées au quotidien par les juges, mais une véritable fronde dirigée contre la classe au pouvoir. Certes, les juges ont suspendu leurs activités pour protester contre une dévaluation terrible de leurs salaires, qui sont tombés à moins de 100 dollars par mois, avec l’envolée du dollar, mais leur ras-le-bol est surtout dirigé contre une classe au pouvoir indifférente, incompétente et soucieuse de ses seuls intérêts. Elle est aussi dirigée contre une base populaire qui, au fil des années, a permis à cette classe dirigeante de se reproduire et d’étendre ses tentacules à l’ensemble de l’État libanais qu’elle a fini par étrangler.
Le ton du communiqué publié samedi par les juges pour annoncer une volonté franche de faire un pas en direction des autorités à condition que celles-ci les retrouvent à mi-chemin et qu’elles tiennent compte de leur revendication est des plus violents, sans être diffamatoire. Il dresse un tableau tragique d’une situation qui s’applique non seulement au corps de la magistrature, mais pratiquement à tous les secteurs d’activités professionnelles au Liban. Leur initiative est motivée par leur souci de ne pas bloquer le secteur de la justice et de sanctionner ainsi une population qu’ils ont quand même secouée, en soulignant la responsabilité des électeurs dans le maintien au pouvoir d’une équipe politique responsable de la déliquescence de l’État libanais.
D’emblée, ils ont affirmé dans le texte qu’ils sont « les premiers lésés par la grève qu’ils ont décrétée à leur corps défendant, parce qu’elle les arrache de leur lieu naturel, qui est sur le point de s’effondrer, à savoir le Palais de justice ». Ils se sont en outre dits « perdus entre deux : rendre justice d’une part à ceux qui ont besoin d’eux et qui essayent de ne pas quitter le pays, tout en évitant que les dossiers judiciaires s’amoncellent et, d’autre part, l’avenir de leurs enfants, eux aussi victimes d’une injustice sans nom ».
« Nous n’avons perçu en août que ces semblants de salaires dont la valeur varie entre 95 dollars et 235 dollars, suivant le taux de change du marché noir, et avec 19 jours de retard », ont martelé les juges, en rappelant que c’est en désespoir de cause qu’ils avaient fini par décréter une grève « en raison de l’indifférence totale des deux autorités exécutive et législative durant ce qui a été faussement appelée une crise ». « En fait il s’agit de l’échec » du pouvoir, ont-ils asséné, avant d’exposer les difficultés auxquelles ils ont été exposés pour gérer leur quotidien durant les trois dernières années. « Il nous arrivait de payer de notre poche le prix des fournitures de base, privant nos familles de cet argent, pendant que les deux autres pouvoirs étaient occupés à… perdre le temps », ont-ils poursuivi.
Tirant à boulets rouges sur l’Exécutif et le Législatif, ils ont affirmé : « Leurs instruments ont énormément dénigré la magistrature récemment, même si celle-ci est entachée de quelques anomalies que tout me monde connaît », en allusion à l’action de certains juges qui ont accepté d’être des outils du pouvoir politique, exécutant leurs directives au lieu de se mettre au service de la justice.
« Nul n’empêche de nettoyer la justice de toutes ses anomalies. Sauf ceux qui, connus de tous, empêchent toutes formes de redditions de comptes et barrent la voie au vote d’une loi qui libérerait cette justice de leur emprise », ont accusé les magistrats, avant de commenter : « Nous ne parlons pas d’individus mais d’un système dont le maintien semble voulu par plusieurs, comme le montrent les résultats des élections (législatives) à chaque fois qu’elles sont organisées ».
La loi sur l’indépendance de la justice
« Les juges contraints de se mettre en grève insistent sur le vote d’une loi sur l’indépendance de la justice, authentique et non pas vidée de son contenu, avec un texte qui n’a de l’indépendance que le nom », ont-ils fait valoir en mettant en garde dans le même temps, contre le projet de loi sur le contrôle des capitaux, soumis à la Chambre, dans la mesure où son application « porterait le coup de grâce à tout espoir des déposants de récupérer leur argent » bloqué dans les banques.
Ils ont dans le même temps averti que si jamais ce texte est voté dans sa formule actuelle, « ils vont être obligés malgré eux de l’appliquer, aussi injuste soit-il, par respect pour la Constitution et pour le principe de séparation des pouvoirs ». « À ce moment-là, qu’on ne blâme que ceux qui ont voté » pour la même classe politique, ont-ils de nouveau asséné.
Tout en annonçant qu’« ils ne renonceront pas à leur revendication ponctuelle, en rapport avec un salaire qui corresponde au taux réel du dollar, avec un effet rétroactif sur trois ans », ils ont affirmé être disposés à « suspendre pour deux mois leur mouvement de protestation si leurs salaires sont versés momentanément au taux du jour de Sayrafa ». La grève sera ainsi suspendue momentanément, le jour où ils seront payés suivant cette condition, ont-ils assuré.
Les magistrats ont remercié « tous ceux qui essaient de régler » leur dossier, mais ils leur ont demandé de « ne pas perdre leur temps avec moins de ce qui est requis ». « La coupe est pleine et plus personne ne se laissera duper par le refrain de « la mission » ou du « sacrifice » du juge, depuis que la justice elle-même a été sacrifiée », ont conclu les magistrats.
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