Boris Johnson, rêveur de la gloire de Winston Churchill ou encore de l’icône qu’est Margaret Thatcher, se résout à un destin humiliant, écarté par son propre camp de l’exécutif britannique, voire de la scène politique dans sa globalité. N’est-ce pas un destin tragique pour le penseur du Brexit ayant connu des victoires éclatantes mais ayant chuté si vertigineusement ? La mort lente du phénomène Johnson renverse l’équilibre politique britannique et ouvre la voie du redressement à un parti conservateur chaotique, ébranlé par des scandales répétitifs et à la réputation internationale détériorée, du fait d’un Brexit très contesté.
Dès son élection en décembre 2019, Boris Johnson bénéficiait incontestablement d’une influence considérable à travers la Grande Bretagne. Que ce soit son positionnement eurosceptique, ou sa victoire écrasante lors des législatives, M. Johnson parvient à s’affirmer en tant que figure politique incontournable et extrêmement influente. Il est nommé Premier ministre et lance l’un des chantiers les plus rocambolesques entrepris au Royaume-Uni : Get Brexit Done. Se voulant le successeur direct du thatchérisme, sa conception conservatrice est cependant trompeuse, ne semblant pas s’inscrire dans la même lignée que son inspiration. Pour rappel, malgré le désir de Margaret Thatcher d’amoindrir les contributions britanniques à la CEE, elle ne voyait l’avenir du Royaume-Uni qu’en Europe.
Malgré tout, c’est sur les promesses d’un État interventionniste, davantage indépendant et démocratique, que le 31 janvier 2020 le Royaume-Uni se retire de l’Union Européenne. L’un des dossiers les plus brûlants de l’histoire de la Grande Bretagne peut alors être clôturé, ou presque... Ce retrait jugé par certains unilatéral continue, même trois ans plus tard, à révéler ses faiblesses. Au niveau de la conjoncture économique, elle ne cesse d’empirer de jour en jour. L’inflation annuelle a atteint un niveau historique, au plus haut depuis 40 ans, dépassant le seuil symbolique des deux chiffres soit 10,1% en juillet. De même, les prévisions de la Banque d’Angleterre ne sont pas moins alarmantes : l’inflation atteindrait 18% d’ici début 2023.
Certainement affectés par la déstabilisation économique suite au Brexit et la flambée des prix au niveau mondial, causée par l’invasion russe en Ukraine, les tarifs énergétiques sont notamment affectés. L’EDF, fournisseur de gaz aux particuliers britanniques, annonce une augmentation plafonnée à 54% en avril et 80% pour octobre. En juillet, un ménage payait annuellement en moyenne 1971£ contre 3600£ d’ici octobre, environ 5500£ en janvier et 7700£ en avril. Cette inefficacité économique, accompagnée de l’inaction du gouvernement, favorise fortement le discrédit de Boris Johnson.
Parallèlement, la situation en Irlande du Nord s’inscrit dans le prolongement d’une longue liste de séquelles provoquées par le retrait de l’UE. Boris Johnson, cerveau du Brexit, a largement échoué dans la gestion de ce dossier hautement sensible et a divisé politiquement et territorialement la population britannique, malgré qu’il ait tenté, tant bien que mal, de remédier à cette crise. Pour rappel, sous l’autorité de Londres, l’Irlande du Nord fut le théâtre de violences meurtrières entre protestants unionistes, partisans du rattachement nord-irlandais au Royaume-Uni, et catholiques, prônant une réunification des deux Irlande.
C’est dans ce contexte qu’un accord nommé « accord du Vendredi-Saint » fut signé par le Premier ministre Tony Blair en 1998, qui prévoit l’ouverture des frontières et la libre-circulation entre les deux territoires. Le Brexit pose cependant problème : l’Irlande, membre de l’UE, ne peut continuer à établir un libre-échange avec un pays non-membre, l’Irlande du Nord et accessoirement avec le reste du Royaume-Uni. M. Johnson, ayant à maintes reprises promis durant sa campagne électorale que les cargaisons échangées entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni ne feraient pas l’objet de contrôles douaniers, accepte la proposition de l’UE qui va totalement dans le même sens. Depuis, l’Irlande du Nord fait face à des pénuries de besoins de première nécessité et les livraisons provenant d’Angleterre sont considérablement retardées. Les contestations se font alors de plus en plus nombreuses, la population criant au scandale et critiquant la décision du gouvernement bréxiteur, de ce fait considérablement affaibli.
Le mandat de Boris Johnson fut tout de même marqué par d’indéniables réussites. Ce Premier ministre, au profil plutôt atypique, accusé par son propre camp de mensonges à répétition et acculé à la démission, fut quand même capable de redonner un nouveau visage au Royaume-Uni, habitué dernièrement à la succession de chefs de gouvernement plus anodins les uns que les autres. Cette nouvelle âme conservatrice britannique, qui diffère drastiquement de la classe traditionnelle, se distingue par sa position et son soutien indéfectible au peuple ukrainien dans l’invasion lancée par la Russie de Vladimir Poutine.
L’aide considérable apportée à l’Ukraine s’élèverait à 2,7 milliards d’euros. C’est surtout son position de précurseur qui a marqué les esprits et a démarqué Boris Johnson des autres dirigeants occidentaux. En effet, ce fut l’un des premiers chefs d’État à rendre visite à son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky, une manœuvre qui renforça son image ébréchée par de nombreux scandales et échecs.
Par ailleurs, la campagne de vaccination lancée par le Premier ministre au tout début de la propagation du Covid-19 connut une réussite fulgurante de par son efficacité et sa rapidité impressionnante. Cela a permis au gouvernement d’anticiper la levée des restrictions sanitaires et de ralentir la circulation du virus pour une meilleure reprise économique.
Touché par d’innombrables scandales médiatiques, ce sont notamment les affaires Pincher et Partygate qui discréditeront et affaibliront davantage la position de Boris Johnson. Entre mai 2020 et avril 2021, au moment où les Britanniques étaient cloitrés chez eux et que 150 000 personnes étaient pleurées par leurs proches décédés du fait du Covid-19, des rassemblements festifs étaient régulièrement organisés à Downing Street. Ce scandale, connu sous le nom de « Partygate », provoqua la colère de la population et le retournement de l’opinion publique contre Boris Johnson. C’est surtout la nomination de Chris Pincher Whip, à un poste gouvernemental, qui accéléra le déclin du Premier ministre. Accusé en 2019 d’attouchements sexuels, Downing Street a reconnu le 5 juillet, après l’avoir nié à multiples reprises, que M. Johnson était au courant de ces accusations avant la nomination de M. Pincher au gouvernement en février. Ce scandale de trop entraîna les premières démissions au sein du gouvernement qui lui ont été fatales.
L’ascension de Boris Johnson suivie de sa chute devra être un rappel à ses successeurs, qu’il y a toujours des limites à ne jamais franchir dans une véritable démocratie. En tout état de cause, tous les observateurs s’accordent à dire que la page Johnson est belle et bien tournée. Pour l’heure, tous les regards sont braqués sur la bataille de succession qui touche à sa fin. Deux candidats sont en lice: la ministre des Affaires étrangères sortante Liz Truss et le chancelier de l’Échiquier sortant Rishi Sunak. Ce qui est sûr c’est que le nouveau leader britannique devra se distinguer de son prédécesseur et redonner ne serait-ce qu’une petite lueur d’espoir à un Royaume-Uni grandement en difficulté. Rendez-vous est donné pour le 5 septembre prochain pour connaître l’identité du successeur au poste de Premier ministre.
Dès son élection en décembre 2019, Boris Johnson bénéficiait incontestablement d’une influence considérable à travers la Grande Bretagne. Que ce soit son positionnement eurosceptique, ou sa victoire écrasante lors des législatives, M. Johnson parvient à s’affirmer en tant que figure politique incontournable et extrêmement influente. Il est nommé Premier ministre et lance l’un des chantiers les plus rocambolesques entrepris au Royaume-Uni : Get Brexit Done. Se voulant le successeur direct du thatchérisme, sa conception conservatrice est cependant trompeuse, ne semblant pas s’inscrire dans la même lignée que son inspiration. Pour rappel, malgré le désir de Margaret Thatcher d’amoindrir les contributions britanniques à la CEE, elle ne voyait l’avenir du Royaume-Uni qu’en Europe.
Malgré tout, c’est sur les promesses d’un État interventionniste, davantage indépendant et démocratique, que le 31 janvier 2020 le Royaume-Uni se retire de l’Union Européenne. L’un des dossiers les plus brûlants de l’histoire de la Grande Bretagne peut alors être clôturé, ou presque... Ce retrait jugé par certains unilatéral continue, même trois ans plus tard, à révéler ses faiblesses. Au niveau de la conjoncture économique, elle ne cesse d’empirer de jour en jour. L’inflation annuelle a atteint un niveau historique, au plus haut depuis 40 ans, dépassant le seuil symbolique des deux chiffres soit 10,1% en juillet. De même, les prévisions de la Banque d’Angleterre ne sont pas moins alarmantes : l’inflation atteindrait 18% d’ici début 2023.
Certainement affectés par la déstabilisation économique suite au Brexit et la flambée des prix au niveau mondial, causée par l’invasion russe en Ukraine, les tarifs énergétiques sont notamment affectés. L’EDF, fournisseur de gaz aux particuliers britanniques, annonce une augmentation plafonnée à 54% en avril et 80% pour octobre. En juillet, un ménage payait annuellement en moyenne 1971£ contre 3600£ d’ici octobre, environ 5500£ en janvier et 7700£ en avril. Cette inefficacité économique, accompagnée de l’inaction du gouvernement, favorise fortement le discrédit de Boris Johnson.
Le cas de l’Irlande
Parallèlement, la situation en Irlande du Nord s’inscrit dans le prolongement d’une longue liste de séquelles provoquées par le retrait de l’UE. Boris Johnson, cerveau du Brexit, a largement échoué dans la gestion de ce dossier hautement sensible et a divisé politiquement et territorialement la population britannique, malgré qu’il ait tenté, tant bien que mal, de remédier à cette crise. Pour rappel, sous l’autorité de Londres, l’Irlande du Nord fut le théâtre de violences meurtrières entre protestants unionistes, partisans du rattachement nord-irlandais au Royaume-Uni, et catholiques, prônant une réunification des deux Irlande.
C’est dans ce contexte qu’un accord nommé « accord du Vendredi-Saint » fut signé par le Premier ministre Tony Blair en 1998, qui prévoit l’ouverture des frontières et la libre-circulation entre les deux territoires. Le Brexit pose cependant problème : l’Irlande, membre de l’UE, ne peut continuer à établir un libre-échange avec un pays non-membre, l’Irlande du Nord et accessoirement avec le reste du Royaume-Uni. M. Johnson, ayant à maintes reprises promis durant sa campagne électorale que les cargaisons échangées entre l’Irlande du Nord et le reste du Royaume-Uni ne feraient pas l’objet de contrôles douaniers, accepte la proposition de l’UE qui va totalement dans le même sens. Depuis, l’Irlande du Nord fait face à des pénuries de besoins de première nécessité et les livraisons provenant d’Angleterre sont considérablement retardées. Les contestations se font alors de plus en plus nombreuses, la population criant au scandale et critiquant la décision du gouvernement bréxiteur, de ce fait considérablement affaibli.
L’appui au peuple ukrainien
Le mandat de Boris Johnson fut tout de même marqué par d’indéniables réussites. Ce Premier ministre, au profil plutôt atypique, accusé par son propre camp de mensonges à répétition et acculé à la démission, fut quand même capable de redonner un nouveau visage au Royaume-Uni, habitué dernièrement à la succession de chefs de gouvernement plus anodins les uns que les autres. Cette nouvelle âme conservatrice britannique, qui diffère drastiquement de la classe traditionnelle, se distingue par sa position et son soutien indéfectible au peuple ukrainien dans l’invasion lancée par la Russie de Vladimir Poutine.
L’aide considérable apportée à l’Ukraine s’élèverait à 2,7 milliards d’euros. C’est surtout son position de précurseur qui a marqué les esprits et a démarqué Boris Johnson des autres dirigeants occidentaux. En effet, ce fut l’un des premiers chefs d’État à rendre visite à son homologue ukrainien, Volodymyr Zelensky, une manœuvre qui renforça son image ébréchée par de nombreux scandales et échecs.
Par ailleurs, la campagne de vaccination lancée par le Premier ministre au tout début de la propagation du Covid-19 connut une réussite fulgurante de par son efficacité et sa rapidité impressionnante. Cela a permis au gouvernement d’anticiper la levée des restrictions sanitaires et de ralentir la circulation du virus pour une meilleure reprise économique.
Le Partygate
Touché par d’innombrables scandales médiatiques, ce sont notamment les affaires Pincher et Partygate qui discréditeront et affaibliront davantage la position de Boris Johnson. Entre mai 2020 et avril 2021, au moment où les Britanniques étaient cloitrés chez eux et que 150 000 personnes étaient pleurées par leurs proches décédés du fait du Covid-19, des rassemblements festifs étaient régulièrement organisés à Downing Street. Ce scandale, connu sous le nom de « Partygate », provoqua la colère de la population et le retournement de l’opinion publique contre Boris Johnson. C’est surtout la nomination de Chris Pincher Whip, à un poste gouvernemental, qui accéléra le déclin du Premier ministre. Accusé en 2019 d’attouchements sexuels, Downing Street a reconnu le 5 juillet, après l’avoir nié à multiples reprises, que M. Johnson était au courant de ces accusations avant la nomination de M. Pincher au gouvernement en février. Ce scandale de trop entraîna les premières démissions au sein du gouvernement qui lui ont été fatales.
L’ascension de Boris Johnson suivie de sa chute devra être un rappel à ses successeurs, qu’il y a toujours des limites à ne jamais franchir dans une véritable démocratie. En tout état de cause, tous les observateurs s’accordent à dire que la page Johnson est belle et bien tournée. Pour l’heure, tous les regards sont braqués sur la bataille de succession qui touche à sa fin. Deux candidats sont en lice: la ministre des Affaires étrangères sortante Liz Truss et le chancelier de l’Échiquier sortant Rishi Sunak. Ce qui est sûr c’est que le nouveau leader britannique devra se distinguer de son prédécesseur et redonner ne serait-ce qu’une petite lueur d’espoir à un Royaume-Uni grandement en difficulté. Rendez-vous est donné pour le 5 septembre prochain pour connaître l’identité du successeur au poste de Premier ministre.
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