Venise : « Les enfants des autres » avec Efira en majesté
Comment trouver sa place face aux « enfants des autres » dans une famille recomposée ? Très peu abordée au cinéma, la question est au centre d’un film de la Française Rebecca Zlotowski, avec Virginie Efira en majesté, en compétition à Venise.

Très bien reçu et en lice pour le Lion d’Or, le film (qui sort le 29 septembre en France) raconte l’histoire de Rachel (Virginie Efira), une prof de français autour de la quarantaine, sans enfants, qui tombe amoureux d’Ali (Roschdy Zem), papa d’une petite fille et fraîchement divorcé. Originalité du film, il se concentre sur la belle-mère de cette famille recomposée : comment aimer un enfant qui ne sera jamais vraiment le sien ? Comment trouver sa place dans cette nouvelle famille ? Quels liens perdureront en cas de rupture ?

« Quand on divorce dans la vie, on peut voir Kramer contre Kramer, ça t’aide », raconte Rebecca Zlotowski, en référence à ce classique de la fin des années 1970, avec Dustin Hoffman et Meryl Streep. « Mais quand tu es belle-mère, tu n’as pas de film pour t’aider », quand ces personnages dans les contes ou les Disney sont « souvent dans la méchanceté ou la rivalité ».

« L’origine du film, c’est ce manque de représentation d’une expérience très triviale, banale et familière », poursuit-elle, « un personnage qui touche énormément de monde, d’une belle-mère ou d’un beau-père qui ont aimé un enfant et le voient sortir à un moment de l’équation ».

La réalisatrice de 42 ans (Belle Épine, Une fille facile) confie avoir plutôt pensé à l’origine adapter le roman de Romain Gary sur l’impuissance masculine (Au-delà de cette limite votre ticket n’est plus valable) avant de changer de braquet, pour raconter l’histoire d’une femme qui redoute aussi la baisse de sa fertilité. Pas un hasard : « Le rapport à la maternité contrariée, la fin de la fertilité, c’est une forme d’impuissance... Au moment où l’on parle tant de la puissance des femmes, il faut regarder aussi leur impuissance », souligne la réalisatrice.

Aux côtés de Virginie Efira, Roschdy Zem campe un père moderne, loin des standards virilistes, qui s’occupe de sa fillette, cuisine, lui lit des histoires...

« Il m’a fallu quatre films pour me déconstruire un peu personnellement et comprendre qu’un sujet féminin n’était pas un sujet mineur », reconnaît Rebecca Zlotowski, pourtant engagée sur ces questions devenues centrales pour l’industrie du cinéma.

« J’ai fait un film dans une centrale nucléaire (Grand Central), sur un circuit de moto (Belle Épine), un président et des attentats (la série Les Sauvages, avec Roschdy Zem, déjà), avec plein de spectaculaire et de situations où il fallait envoyer du lourd. J’avais une relation quasi phallique avec mes sujets, alors que ce sujet (de la maternité) j’avais peur de l’affronter, j’avais une part de moi qui considérait encore que c’était gonzesse ».

Le film est aussi une ode à Virginie Efira (Police, Adieu les Cons, Benedetta), dont la carrière dans le cinéma d’auteur s’accélère et qui sera également à l’affiche mercredi de Revoir Paris, sur les attentats de novembre 2015.

L’actrice confie avoir été attirée par un personnage qui a fait plus que jamais vibrer des cordes intimes : il n’est « jamais représenté alors que c’est dans la vie de chacun », tout comme « ce truc typiquement féminin du rapport à la maternité, du temps qu’on a ». Avec ce rôle, pour lesquels elle a notamment pensé aux personnages féminins chez Claude Sautet, « j’ai eu l’impression de pouvoir faire des bonds dans le passé » intime, explique-t-elle.

Sans s’identifier totalement, Virginie Efira s’est reconnue à certains égards dans le personnage de Rachel : « un léger effacement, un manque de confiance en soi qui fait qu’on accepte les comportements de tout le monde en se disant chacun a ses raisons, le sourire comme politesse, comme pudeur... C’est des zones que j’ai fréquentées », souligne l’actrice.

AFP
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