Privatisation, la mal-aimée
La privatisation, grande oubliée des plans de redressement. C’est ce qui ressort des différentes propositions étatiques en circulation, alors que les plans du secteur privé lui confèrent un rôle certain, quoique limité.

D’aucuns arguent qu’il n’est pas possible de l’appliquer maintenant, car dans l’état où se trouvent les services publics, cela revient à brader les actifs de l’État. Voilà une vision réductrice de l’affaire: un investisseur n’achète jamais un actif pour son état actuel, mais pour son potentiel à venir.

En plus, on n’est pas obligé de vendre si les offres ne sont pas bonnes. Il y a autant de formes de privatisation que de projets privatisés dans le monde. On peut en mentionner quelques titres: BOT, DBOT, gestion privée, déléguée, vente, affermage, concession, corporotisation, vente d’actions, cotation à la bourse… jusqu’à la titrisation. Des formes qui ont fait leur preuve dans tant de pays, alors que le recours au secteur privé est devenu la norme dans le monde entier. Mais comme on est plus intelligent que tous les autres…

Dans l’histoire mouvementée de la privatisation, on se contente ici de citer une loi-cadre adoptée en 2000, puis des lois spécifiques pour l’électricité et les télécoms en 2002, puis encore une loi-cadre générale sur le ‘partenariat public-privé’ (PPP) en 2017. Bien sûr, on en est resté aux palabres, rien n’a jamais été appliqué. Et Ziad Hayek, ancien président du Haut conseil du PPP, et expert mondial dans ce domaine, a dû abandonner après avoir développé un ulcère, suite à l’échec de ses tentatives désespérées de mener à bien sa mission.

On revient cependant aux argumentations souvent ressassées, dont, par exemple, «on n’a pas le droit de dilapider des biens qui appartiennent aux générations futures». Alors que ces mêmes générations, représentées par les enfants d’aujourd’hui, en souffrent le plus, car ils ont et auront du mal à poursuivre une bonne éducation.


En réalité, inutile de continuer à mentir aux gens, il n’y a pas d’autres sources significatives de financement si on ne veut pas mettre la main sur l’essentiel des dépôts. La Banque centrale et les banques sont exsangues. Et l’État est en faillite financière, humaine, et morale: pas d’argent pour investir; pas de ressources humaines compétentes pour gérer; et pas un minimum de moralité pour ne pas tout piller. En plus, on aura avec le secteur privé une injection d’argent frais dont le pays a tant besoin.

Pourtant, des voix s’élèvent encore de tous bords déclamant que tel ou tel service doit rester dans le – ou revenir au - giron de l’État’, au lieu d’être «phagocyté par les requins de la finance».

Pour ceux-là, voici un petit constat de la situation. La fourniture d’électricité est déjà privatisée à 90%, à travers les générateurs de quartier. L’internet la suit, avec les câbles privés qui remplacent de plus en plus le service défaillant d’Ogero. Pour l’eau, c’est pareil, les camions-citernes, puits artésiens privés, et distributeurs d’eau potable fournissent le gros des besoins. Et ainsi de suite. Tous les autres services vont suivre, n’ayons aucun doute là-dessus.

Donc, résumons. Au lieu de suivre les normes internationales dans un recours ordonné au privé pour acquérir, développer, investir dans, et/ou gérer les services publics, on les laisse pourrir, agoniser, et trépasser, remplacés forcément par les privés. Des privés qui fonctionnent maintenant, excusez le terme, dans un bordel inouï.

Car, comme on le sait, la nature a horreur du vide. Mais aussi, comme on ne le sait pas, ne rien faire ne conduit pas forcément à rien.
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