Vers un changement de régime en Iran?
Les manifestations qui s'étendent en Iran après la mort d'une jeune femme aux mains de la police des mœurs sont "peut-être le début d'un grand changement", estime le directeur de l'ONG Iran Human Rights (IHR), Mahmood Amiry Moghaddam.

Âgée de 22 ans, Mahsa Amini est morte le 16 septembre, trois jours après avoir été arrêtée pour "port de vêtements inappropriés" à Téhéran par la police des mœurs, une unité chargée de faire respecter le code vestimentaire strict de la République islamique d'Iran pour les femmes.

Sa mort a été suivie par des manifestations qui se propagent dans plusieurs villes de la République islamique malgré la répression policière qui a fait au moins huit morts --peut-être dix, selon IHR-- jusqu'à présent.

Les Kurdes du Liban protestent après le décès de Mahsa Amini en Iran (AFP)

 
Q. A quoi assiste-t-on aujourd'hui en Iran? Est-ce le début d'une révolution?

R. "Ce que nous voyons, ce sont des manifestations nationales après le meurtre de Mahsa Amini par la police des mœurs. Cela a rendu les gens très en colère (...) Nous suivons la situation des droits humains et les manifestations en Iran depuis quinze ans et je n'ai jamais vu des gens si en colère. Il semble qu'ils n'aient plus peur. Je pense que le meurtre de Mahsa a probablement été la dernière goutte qui a conduit à ce débordement. Cela est donc peut-être le début d'un grand changement (...)".

"Ce qui nous inquiète, c'est ce que vont faire les autorités (...) A moins que la communauté internationale n'apporte son soutien clair aux revendications du peuple iranien qui réclame une vie normale, je crains que de nombreuses personnes ne soient tuées".
Q. Que savez-vous des circonstances de la mort de Mahsa Amini?

R. "Ce que nous savons avec certitude, et ce que les autorités ont également admis, c'est que Mahsa a été arrêtée par la police des mœurs. Selon les informations fournies par la famille, elle était en parfaite santé quand ils l'ont arrêtée. Et quelques heures plus tard, elle a été transférée à l'hôpital dans le coma. Donc, quoi qu'il arrive, c'est une responsabilité des autorités iraniennes et de la police des mœurs".


"Le foulard doit être un choix"! A Téhéran, des femmes protestent (AFP)

 

"Les indices montrent qu'elle a été soumise à des violences très dures, et cela uniquement parce que les autorités disent qu'elle n'avait pas la tête couverte. Les autorités (...) veulent s'immiscer dans les aspects les plus privés des gens, quels vêtements ils portent, ce qu'ils mangent et ce qu'ils disent. Donc je pense que les Iraniens en ont marre (...)".

"Le hijab est devenu un symbole de la République islamique (...) Hier, nous avons vu beaucoup d'images de filles qui enlèvent leur hijab et le brûlent. Ce n'est pas parce qu'elles ont un problème avec un morceau de tissu, mais parce que cela symbolise la répression qu'elles subissent depuis 43 ans, et c'est de cela qu'elles veulent se débarrasser".
Q. Comment voyez-vous la situation se dénouer?

R. "Aucun dictateur ne peut se maintenir indéfiniment. Ils ne durent pas éternellement, l'Histoire l'a montré. La question n'est donc pas de savoir si, mais quand et comment (ce régime prendra fin). En ce moment où tant de gens descendent dans la rue, ce qu'ils font malgré leur colère, c'est brûler leur propre foulard et crier 'à bas le dictateur' en utilisant des moyens pacifiques (...)".

"Je pense que la communauté internationale, l'Occident, devrait vraiment les soutenir. Nous ne savons pas ce qui se passera dans quelques mois ou un an. Si les autorités réussissent à réprimer violemment ces manifestants, je ne sais pas ce qu'ils feront la prochaine fois qu'ils sortiront de chez. Je pense donc que ce n'est pas seulement la bonne chose à faire, mais aussi la plus sage: pousser pour plus de changements de fond, afficher son soutien du peuple iranien et promouvoir une transition pacifique".

Avec AFP
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