Le chantier de Notre-Dame avance : les artistes finalistes pour les vitraux contemporains ont été entendus, tandis qu'une nouvelle châsse-reliquaire, résolument moderne, a été dévoilée pour abriter la précieuse Couronne d'épines du Christ.
Près de quatre ans après l'incendie dévastateur qui a ravagé Notre-Dame de Paris le 15 avril 2019, le chantier de restauration bat son plein. Deux événements marquants viennent ponctuer cette semaine charnière : l'audition des artistes finalistes pour la conception des nouveaux vitraux contemporains et la présentation de la nouvelle châsse-reliquaire destinée à accueillir la Sainte Couronne d'épines.
Mercredi 6 novembre, les huit artistes, associés chacun à un atelier verrier, ont été entendus par un comité artistique de 20 membres afin de détailler leur projet pour les cinq baies du bas-côté sud de la cathédrale. Jean-Michel Alberola, Daniel Buren, Yan Pei-Ming, Gérard Traquandi, Claire Tabouret, Philippe Parreno, Christine Safa et Flavie Vincent-Petit avaient été sélectionnés parmi 110 candidatures à la suite d'un appel lancé en avril.
Leur mission: concevoir des vitraux contemporains en remplacement des "grisailles" réalisées au XIXe siècle par Viollet-Le-Duc, tout en respectant un style "figuratif" et en maintenant une "lumière neutre". Le thème retenu est celui de la Pentecôte. Le ou les binômes lauréats, qui seront prochainement désignés, devront présenter un prototype pour la réouverture de Notre-Dame, prévue les 7 et 8 décembre. Les nouveaux vitraux devraient être installés à l'horizon 2026.
Ce projet, soutenu par l'archevêque de Paris Mgr Laurent Ulrich mais qui a reçu un avis défavorable consultatif de la Commission nationale du patrimoine et de l'architecture, ne fait pas l'unanimité. Une pétition lancée par Didier Rykner, patron de la Tribune de l'Art, a recueilli près de 235.000 signatures. L'association Sites & Monuments entend même saisir la justice, arguant qu'une charte internationale interdit en principe de remplacer des œuvres existantes par de nouvelles créations. Un débat qui n'est pas sans rappeler les polémiques suscitées en leur temps par la pyramide du Louvre ou les colonnes de Buren au Palais-Royal.
Pendant ce temps, un autre joyau du trésor de Notre-Dame se prépare à réintégrer la cathédrale : la précieuse Couronne d'épines, que la tradition chrétienne identifie comme celle qui fut posée sur la tête du Christ avant sa crucifixion. Sauvée in extremis de l'incendie par les pompiers qui durent briser son écrin de verre, elle sera prochainement exposée dans une nouvelle châsse-reliquaire aux allures résolument contemporaines.
Œuvre du designer Sylvain Dubuisson réalisée par les Ateliers Saint-Jacques & Fonderie de Coubertin, ce "mur-reliquaire" en bois de cèdre se présente sous la forme d'un grand retable de 3,60 par 2,60 mètres, serti d'épines de bronze symbolisant la souffrance du Christ. En son centre, une demi-sphère d'un bleu profond enchâssée dans une auréole de verre accueillera la Sainte Couronne.
"L'inspiration, c'était de faire un grand retable en bois de cèdre dans lequel est incrustée une auréole en cabochon de verre, au milieu de laquelle est présentée la relique de la couronne", explique Sylvain Dubuisson. Un écrin majestueux qui "raconte, à travers sa majesté et son ampleur le fait que nous sommes devant un objet important" et "capte l'attention, mais non pas pour elle-même, pour nous centrer sur la présence de cette couronne d'épines", précise Guillaume Normand, vice-recteur de la cathédrale.
Installée dans l'axe de la nef, cette châsse ne sera "pas visible depuis l'extérieur, mais comme quelque chose qui est à découvrir au moment de la déambulation à l'intérieur de la cathédrale". Son arrivée est prévue fin novembre, avant d'être bénie par l'archevêque lors de la semaine inaugurale qui suivra la réouverture tant attendue de l'édifice.
Vitraux ou reliquaire, ces créations contemporaines cherchent à s'inscrire dans le temps long de ce joyau gothique dont le chantier titanesque touche à sa fin. Un pari audacieux pour ce monument historique visité chaque année par des millions de personnes du monde entier, qui rouvrira ses portes le 8 décembre 2024, plus de 5 ans après avoir failli partir en fumée. Notre-Dame entame ainsi sa renaissance, entre restauration à l'identique et création contemporaine, pour continuer à se réinventer, comme elle l'a toujours fait au fil des siècles.
Avec AFP
Commentaires