Cible stratégique de l'armée russe, le port ukrainien d'Odessa a finalement été relativement épargné jusqu'à présent, Moscou ne réussissant pas à l'occuper. Mais la Russie n'a pas dit son dernier mot, elle terrorise désormais la population avec à des drones iraniens.
L'Opéra de grande renommée d'Odessa.
Réveillée en sursaut par un vrombissement venu du ciel, Marina Kondratieva court cacher ses enfants dans la cave. À Odessa, les drones iraniens nouvellement utilisés par la Russie contre l'Ukraine font resurgir les peurs, même si leur efficacité est limitée.
"Maintenant, je comprends que tout peut changer en cinq minutes", raconte cette habitante d'un quartier aisé de la ville, dont la terrasse donne sur la mer Noire.
Retour au calme récemment
Depuis son retour de Chypre, où elle et ses deux bambins âgés de cinq et six ans s'étaient réfugiés trois mois chez sa belle-famille, Marina, une petite trentaine d'années, s'était reprise à espérer.
Le drone iranien Shahed. (Wikimedia Commons)
Odessa, la capitale du Sud-Ouest et son principal port, dont Moscou avait fait un objectif prioritaire aux prémices de la guerre, sans parvenir à s'en approcher, semblait à l'abri des appétits russes.
Les sacs de sable et autres check-points enlaidissant la vieille ville ont largement été retirés. Les bombardements sont devenus moins fréquents. La contre-offensive des troupes de Kiev dans le Nord-Est, plus poussive dans le sud, a redonné l'espoir.
Mais samedi à six heures du matin, un "bourdonnement autour de la maison" a replongé Marina au cœur du conflit. Une vidéo filmée par son mari, transmise à l'AFP, montre un drone poursuivant son vol, imperturbable, malgré des tirs nourris.
Des drones partout
Ces engins jouent un rôle important depuis le début de l'invasion russe le 24 février, pour les opérations de reconnaissance, les tirs de missiles ou les largages de bombes.
L'ingéniosité des civils, qui ont transformé de quasi-jouets en armes de guerre, aide grandement l'Ukraine, dont la population voue par ailleurs un culte aux Bayraktar TB2, drones turcs ayant multiplié les frappes contre les Russes.
Kiev a aussi obtenu des engins kamikazes américains, les Switchblade, dont les caméras embarquées ont réjoui la population cet été alors qu'elles les montraient s'écraser sur un ennemi pris au dépourvu.
L'armée russe a de son côté perdu quantité de drones depuis le début de la guerre. Son industrie, frappée par les sanctions internationales, peine à en fabriquer.
"Martyr-136"
Moscou s'est donc tourné vers l'Iran pour importer et déployer en Ukraine ses Mohajer-6, un engin d'observation et d'attaque, et ses Shahed-136 ("Martyr-136"), de petits drones kamikazes à très longue portée (2.500 km), "vraisemblablement impliqués dans des attaques au Moyen-Orient", notamment contre un pétrolier dans le golfe d'Oman l'été dernier, selon Londres.
Mohajer-6.
En réaction, l'Ukraine a réduit "significativement" la présence diplomatique de l'Iran, et retiré son accréditation à l'ambassadeur.
Depuis le 13 septembre, quand Kiev a abattu son premier drone iranien, environ "deux douzaines" d'entre eux ont été aperçus dans le sud ukrainien, pour moitié neutralisés, assure à l'AFP Natalia Goumeniouk, une porte-parole militaire.
Les Shahed "sont très difficiles à détecter, car ils volent très bas. Mais ils font beaucoup de bruit, comme une tronçonneuse ou un scooter", ce qui fait qu'on les entend de loin, décrit-elle à l'AFP. Leur efficacité étant également "très basse", ils mettent surtout une "pression psychologique sur la population".
"Les industries de défense iraniennes ont tendance à privilégier le côté bon marché au contrôle qualité, de sorte que leurs systèmes présentent généralement un taux de défaillance assez élevé", confirme Jeremy Binnie, un analyste au centre de recherche britannique Janes.
Peu d'impact
Les cibles des Shahed sont en outre verrouillées par GPS, et leur charge explosive "relativement faible", observe-t-il, ce qui nécessite des coordonnées très précises et donc du renseignement militaire fiable derrière les lignes ukrainiennes, ce sur quoi les Russes pêchent jusqu'ici, dit l'analyste.
Et Jeremy Binnie de conclure: "Pour l'instant, les drones iraniens n'auront pas un impact majeur sur la guerre."
Il en va différemment sur le moral de la population ukrainienne.
Le drone iranien Samad. (Wikimedia Commons)
À 57 ans, Irina Korochenkaïa a emménagé à Odessa pour retrouver un semblant de tranquillité. Originaire de Mykolaïv, à deux heures de route, où les frappes russes sont quotidiennes, elle raconte avoir été "projetée contre un garage" par le souffle d'une bombe en avril.
Dimanche au lever du jour, elle a d'abord entendu une alarme anti-aérienne, puis deux explosions, avant d'apercevoir un drone depuis son balcon, au-dessus d'un immeuble de 23 étages, suivi d'une "nouvelle explosion" et d'un "gros nuage de fumée", se remémore-t-elle.
Et cette ex cadre, désormais au chômage, de demander: "Qu'arrivera-t-il ensuite ? Odessa restera-t-elle sûre ?"
Avec AFP
L'Opéra de grande renommée d'Odessa.
Réveillée en sursaut par un vrombissement venu du ciel, Marina Kondratieva court cacher ses enfants dans la cave. À Odessa, les drones iraniens nouvellement utilisés par la Russie contre l'Ukraine font resurgir les peurs, même si leur efficacité est limitée.
"Maintenant, je comprends que tout peut changer en cinq minutes", raconte cette habitante d'un quartier aisé de la ville, dont la terrasse donne sur la mer Noire.
Retour au calme récemment
Depuis son retour de Chypre, où elle et ses deux bambins âgés de cinq et six ans s'étaient réfugiés trois mois chez sa belle-famille, Marina, une petite trentaine d'années, s'était reprise à espérer.
Le drone iranien Shahed. (Wikimedia Commons)
Odessa, la capitale du Sud-Ouest et son principal port, dont Moscou avait fait un objectif prioritaire aux prémices de la guerre, sans parvenir à s'en approcher, semblait à l'abri des appétits russes.
Les sacs de sable et autres check-points enlaidissant la vieille ville ont largement été retirés. Les bombardements sont devenus moins fréquents. La contre-offensive des troupes de Kiev dans le Nord-Est, plus poussive dans le sud, a redonné l'espoir.
Mais samedi à six heures du matin, un "bourdonnement autour de la maison" a replongé Marina au cœur du conflit. Une vidéo filmée par son mari, transmise à l'AFP, montre un drone poursuivant son vol, imperturbable, malgré des tirs nourris.
Des drones partout
Ces engins jouent un rôle important depuis le début de l'invasion russe le 24 février, pour les opérations de reconnaissance, les tirs de missiles ou les largages de bombes.
L'ingéniosité des civils, qui ont transformé de quasi-jouets en armes de guerre, aide grandement l'Ukraine, dont la population voue par ailleurs un culte aux Bayraktar TB2, drones turcs ayant multiplié les frappes contre les Russes.
Kiev a aussi obtenu des engins kamikazes américains, les Switchblade, dont les caméras embarquées ont réjoui la population cet été alors qu'elles les montraient s'écraser sur un ennemi pris au dépourvu.
L'armée russe a de son côté perdu quantité de drones depuis le début de la guerre. Son industrie, frappée par les sanctions internationales, peine à en fabriquer.
"Martyr-136"
Moscou s'est donc tourné vers l'Iran pour importer et déployer en Ukraine ses Mohajer-6, un engin d'observation et d'attaque, et ses Shahed-136 ("Martyr-136"), de petits drones kamikazes à très longue portée (2.500 km), "vraisemblablement impliqués dans des attaques au Moyen-Orient", notamment contre un pétrolier dans le golfe d'Oman l'été dernier, selon Londres.
Mohajer-6.
En réaction, l'Ukraine a réduit "significativement" la présence diplomatique de l'Iran, et retiré son accréditation à l'ambassadeur.
Depuis le 13 septembre, quand Kiev a abattu son premier drone iranien, environ "deux douzaines" d'entre eux ont été aperçus dans le sud ukrainien, pour moitié neutralisés, assure à l'AFP Natalia Goumeniouk, une porte-parole militaire.
Les Shahed "sont très difficiles à détecter, car ils volent très bas. Mais ils font beaucoup de bruit, comme une tronçonneuse ou un scooter", ce qui fait qu'on les entend de loin, décrit-elle à l'AFP. Leur efficacité étant également "très basse", ils mettent surtout une "pression psychologique sur la population".
"Les industries de défense iraniennes ont tendance à privilégier le côté bon marché au contrôle qualité, de sorte que leurs systèmes présentent généralement un taux de défaillance assez élevé", confirme Jeremy Binnie, un analyste au centre de recherche britannique Janes.
Peu d'impact
Les cibles des Shahed sont en outre verrouillées par GPS, et leur charge explosive "relativement faible", observe-t-il, ce qui nécessite des coordonnées très précises et donc du renseignement militaire fiable derrière les lignes ukrainiennes, ce sur quoi les Russes pêchent jusqu'ici, dit l'analyste.
Et Jeremy Binnie de conclure: "Pour l'instant, les drones iraniens n'auront pas un impact majeur sur la guerre."
Il en va différemment sur le moral de la population ukrainienne.
Le drone iranien Samad. (Wikimedia Commons)
À 57 ans, Irina Korochenkaïa a emménagé à Odessa pour retrouver un semblant de tranquillité. Originaire de Mykolaïv, à deux heures de route, où les frappes russes sont quotidiennes, elle raconte avoir été "projetée contre un garage" par le souffle d'une bombe en avril.
Dimanche au lever du jour, elle a d'abord entendu une alarme anti-aérienne, puis deux explosions, avant d'apercevoir un drone depuis son balcon, au-dessus d'un immeuble de 23 étages, suivi d'une "nouvelle explosion" et d'un "gros nuage de fumée", se remémore-t-elle.
Et cette ex cadre, désormais au chômage, de demander: "Qu'arrivera-t-il ensuite ? Odessa restera-t-elle sûre ?"
Avec AFP
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