Dans l'est de l'Ukraine, l'étau se resserre autour des derniers civils
Un champ de fleurs orne le devant d'une maison détruite à Andriivka, dans l'oblast de Donetsk, photographié le 13 novembre 2024 ©AFP

Le long de la route menant à Kourakhové, dans l'est de l'Ukraine, des maisons abandonnées s'alignent, des carcasses détruites par les bombes, bordées de poivrons qui moisissent sur pied et de carrés de fleurs jonchés de débris.

La région et ses villages sont aujourd'hui pris en sandwich par les forces russes qui avancent au nord, au sud et à l'est, forçant la population à fuir encore et encore.

L'armée russe continue de progresser dans cette zone, qui abrite d'importants gisements de lithium et se situe au sud de Pokrovsk, une ville industrielle et un nœud logistique majeur pour les forces ukrainiennes.

C'est dans cette région que la Russie a réalisé sa plus grande avancée depuis début octobre, selon une analyse de l'AFP effectuée lundi à partir de données de l'Institut pour l'étude de la guerre (ISW), un centre de réflexion américain.

"Sauvez votre vie"

Dans la localité voisine d'Andriïvka, les étals de la supérette sont aussi clairsemés que la clientèle, la majorité des civils étant partis.

"Ce sont les derniers pains, prenez-les", dit l'épicier à une cliente.

Malgré les bombes russes qui "explosent tous les jours", Anatoliï reste sur place pour tenir la dernière épicerie de la région et aider les personnes âgées et handicapées des villages environnants qui n'ont pas encore évacué : "Ceux qui n'ont nulle part où aller, ceux qui n'ont pas d'argent, pas de parents".

Mais lorsque l'électricité sera coupée, cet épicier de 37 ans rejoindra sa femme et son jeune enfant, déjà partis, qui en "ont assez vu en trois ans de guerre", depuis l'invasion russe de l'Ukraine en février 2022.

La route de la région est parcourue de minibus siglés "évacuation", tandis que les messages appelant à fuir se multiplient sur les téléphones : "Chers habitants de la région de Donetsk ! Sauvez votre vie et celle de vos proches ! Évacuez !", peut-on lire.

Fédir Gjyvine, 69 ans, n'envisage pas encore de partir. Il s'entoure de bocaux de légumes pour passer l'hiver et les stocke dans son petit abri où il se réfugie quotidiennement lors des frappes russes.

Et si le chauffage venait à manquer ? "Alors on descendra chercher du charbon dans la mine", rétorque Fédir sur un ton défiant, affirmant qu'il souhaite "se battre pour son pays".

Il concède cependant qu'il partira si les forces russes s'approchent encore, pour rejoindre sa fille qui vit à 400 kilomètres plus à l'ouest. "Mais j'ai le temps", assure-t-il.

Un temps qui s'amenuise rapidement, Moscou ayant déjà annoncé avoir capturé la localité de Voznessenka, à une quinzaine de kilomètres d'Andriïvka.

"On veut la paix"

En amont, une des retenues du lac artificiel de Kourakhové a été endommagée par un tir russe, selon le gouverneur régional, laissant craindre des inondations.

Mais si la rivière est sortie de son lit par endroits, elle n'a pour l'instant touché aucune habitation, a constaté l'AFP.

Dans la localité de Datchné, toute proche du lac et de la ligne de front, les façades des maisons se noircissent de suie, l'horizon se zébrant de fumées et les explosions de l'artillerie résonnant sans discontinuer.

Olga est sortie de chez elle pour constater un nouveau cratère laissé par un énième obus russe qui s'est abattu sur son village.

Debout dans la rue déserte, elle attend la paix "en 24 heures", promise par le président américain nouvellement élu Donald Trump, qui a évoqué un accord avec la Russie en cas de victoire à la présidentielle.

"On veut juste la paix", se désole l'institutrice de 59 ans dont l'école est maintenant un tas de ruines, témoignant de la violence des attaques aériennes, "même s'il faut traiter avec le diable".

Quinze kilomètres à l'ouest se trouve la frontière entre la région de Donetsk et celle de Dnipropetrovsk, vers laquelle l'armée russe continue d'avancer.

Dans cette direction, les lignes de défense nouvellement construites sont visibles sur des kilomètres, chaque bosquet devenant une zone de défense et chaque champ se griffant de nouvelles tranchées, où poussent barbelés et blocs de béton défensifs. Cela réveille chez les habitants la crainte d'une avancée russe plus profonde encore.

(Avec AFP)

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