Le président de la Chambre, Nabih Berry, et le Premier ministre sortant, Najib Mikati, ont reçu de l'ambassadrice américaine Lisa Johnson une proposition de cessez-le-feu articulée en 13 points. M. Berry a transmis ce document au Hezbollah pour l'examiner et formuler ses remarques, annonçant que la réponse libanaise sera communiquée sous peu sous la forme d’un document écrit comportant des amendements, car “la clause relative à un comité de supervision de l’application de la résolution 1701 est inacceptable, d’autant plus que des mécanismes clairs existent déjà et doivent être activés”. Du côté du Sérail, cette proposition est perçue comme “une occasion à saisir pour instaurer un cessez-le-feu. Il ne faut ni présumer de son échec, ni garantir son succès, mais attendre la réponse du Hezbollah, principal concerné par le dossier”. Pour sa part, le Hezbollah indique qu’il “n’approuvera cet accord qu’après y avoir apporté des modifications, notamment en ce qui concerne la souveraineté libanaise et les dispositions visant à démanteler ses infrastructures militaires, qu’elles soient en surface ou souterraines”.
Selon des sources bien informées, la réponse libanaise visera à contrecarrer les conditions imposées par Israël, ainsi que les embûches intégrées par Netanyahu dans le texte, lesquelles reposent sur son avantage militaire actuel et sur l'arrivée de son allié Donald Trump à la Maison-Blanche.
Lors de sa troisième visite à Beyrouth, l’émissaire américain, Amos Hochstein, a présenté une proposition de cessez-le-feu qu'il a discutée avec Berry, tout en promettant de recueillir une réponse d’Israël qui continue de privilégier la réalité du terrain aux pourparlers diplomatiques. En substance, ce plan prévoit un cessez-le-feu, la dissociation des fronts libanais et gazaoui, le retrait progressif des armes du Hezbollah au-delà du Litani, le lancement des négociations sur la démarcation des frontières terrestres, le déploiement de l’armée dans le Sud et la mise en œuvre de la résolution 1701.
Cependant, les récents développements sur le terrain et la victoire de Donald Trump ont incité Netanyahou à remplacer la proposition de Hochstein par une version amendée incluant un nouveau mécanisme de supervision de la résolution 1701, assorti de garanties internationales pour le démantèlement de toutes les infrastructures militaires du Hezbollah, aussi bien en surface que souterraines. Cette version révisée prévoit également un rôle accru de supervision pour l’armée libanaise et la Finul sur les points de passage maritimes, terrestres et aériens. Israël exige en outre la formation d’un comité international comprenant les États-Unis, la France, la Grande-Bretagne, l’Allemagne et la Jordanie, chargé de surveiller la mise en œuvre intégrale de la résolution 1701. Un haut responsable israélien a par ailleurs révélé une initiative conjointe occidentale et russe visant à empêcher le Hezbollah de se réarmer via la Syrie, sous la médiation de Moscou.
Dans un timing stratégique, le principal conseiller de Khamenei, Ali Larijani, est arrivé au Liban pour clarifier les positions du président du Parlement, Mohammad Bagher Ghalibaf, et du ministre des Affaires étrangères, Abbas Araghchi, afin d’apaiser les tensions engendrées par leurs récentes déclarations. Lors de sa rencontre avec Larijani, le Premier ministre Najib Mikati a réitéré sa position en déclarant: “Il est crucial de soutenir la position de l’État pour l’application de la résolution 1701, de renforcer l’unité nationale et d’éviter toute prise de position susceptible de créer des tensions entre les différentes factions libanaises au profit d’un camp contre un autre”. De son côté, Walid Joumblatt a, pour la deuxième fois, décliné toute rencontre avec des responsables iraniens, en signe de protestation contre les prises de position de Ghalibaf et Araghchi. Larijani a tenté de délivrer un message à la fois aux acteurs internes et à la communauté internationale, affirmant que l’Iran soutient toute décision du gouvernement libanais pour la mise en œuvre de la résolution 1701. Au cours de ses échanges avec des alliés du camp dit de la “résistance”, il a rassuré le Hezbollah quant au maintien du soutien iranien, apaisant ainsi les appréhensions qui émergeaient au sein de sa base, inquiète du manque apparent de soutien explicite de Téhéran face aux affrontements avec Israël. Selon un député de l’opposition, cette attitude a suscité des interrogations, laissant penser que l’Iran pourrait instrumentaliser le dossier libanais pour améliorer ses conditions de négociation internationales.
En parallèle, Netanyahou a dépêché un émissaire à Washington pour rencontrer l'équipe du président Trump afin de l’informer de son projet pour un “Nouveau Moyen-Orient”. Selon Netanyahou, la feuille de route pour y parvenir passe par l’élimination des bras armés de l’Iran.
Parallèlement, l'administration Trump se retrouve confrontée à deux défis majeurs: d'une part, le refus de Netanyahou d’accepter la solution des deux États, et, d'autre part, le rejet par l'Arabie saoudite de toute normalisation des relations avec Israël sans reconnaissance préalable d’un État palestinien indépendant. Netanyahou a récemment obtenu du Knesset une résolution rejetant la création d’un État palestinien, tout en envisageant la reconnaissance d'un État palestinien à l'est du Jourdain. Il vise en outre l'annexion de la Cisjordanie et de Gaza à Israël. Ce désaccord profond constitue un véritable casse-tête pour l'administration Trump qui devra trancher pour réaliser la paix globale et équitable promise par le président lors de sa campagne et pour concrétiser les accords d'Abraham engagés durant son premier mandat.
Selon un diplomate occidental, aucune solution pérenne au Moyen-Orient ne sera possible sans un accord tripartite entre les États-Unis, Israël et l'Iran, qui pourrait évoluer en un format quadripartite avec la normalisation et la consolidation de la paix. De ce fait, Netanyahou, d’après des sources diplomatiques, se réserve le droit de mener une frappe contre l'Iran si cela s’avère nécessaire pour atteindre ses objectifs.
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