Les grands pays européens sont prêts à assumer l'aide financière et militaire à Kiev si Washington réduit la sienne, a déclaré mardi le ministre polonais des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, à l'issue d'une réunion diplomatique à Varsovie.
L'Ukraine, l'avenir des relations transatlantiques après l'élection américaine et la défense européenne étaient au menu d'une rencontre à Varsovie des ministres des Affaires étrangères français, allemand, italien, espagnol et britannique, au millième jour de l'agression russe contre l'Ukraine.
"Je note avec satisfaction que les principaux pays de l'Union européenne sont prêts à assumer la charge du soutien militaire et financier à l'Ukraine dans le contexte d'une éventuelle réduction de l'engagement des États-Unis", a déclaré M. Sikorski qui a également souligné la nécessité de renforcer l'UE en matière de défense.
Selon lui, c'est la première fois que les cinq plus grands pays de l'Union européenne se soient prononcés à Varsovie "en faveur d'euro-obligations de défense. C'est quelque chose de sérieux", s'est félicité M. Sikorski lors d'une conférence de presse commune.
Son homologue italien Antonio Tajani s'est également réjoui de l'annonce.
"Aujourd'hui, on a élaboré une stratégie. C'est la stratégie de soutenir la défense européenne, d'avoir des eurobonds (…) Il faut aller de l'avant", a-t-il dit.
Le chef de la diplomatie française Jean-Noël Barrot a évoqué dans ce contexte la mobilisation de "tous les leviers à notre disposition, y compris la capacité financière et économique de l'Union européenne, pour notre sécurité, pour le développement de la base industrielle et technologique de défense européenne".
En juin, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen avait chiffré à 500 milliards d'euros les besoins de l'industrie de défense pour les dix prochaines années face à la menace russe.
Parmi les options discutées déjà à l'époque était celle d'un emprunt européen, comme l'UE l'avait fait pour financer son plan de relance pour l'après-Covid.
Plusieurs États membres, dont la France ou l'Estonie, y étaient favorables, mais d'autres comme l'Allemagne ou les Pays-Bas s'y sont opposés.
"Sauver l'Europe maintenant"
Mardi, la ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, a souligné que l'Europe devra continuer à s'armer "tant que la Russie (…) poursuivra ses objectifs impériaux".
"C'est maintenant qu'il faut sauver l'Europe", a-t-elle insisté, sans se rapporter directement à la question des obligations paneuropéennes.
Mme Baerbock a également souligné le rôle de l'Otan qui est, selon elle, "la colonne vertébrale" de la défense commune, de la liberté, voire même de la Charte des Nations unies qui parle de l'interdiction du recours à la force.
Tant la ministre allemande que son homologue italien Antonio Tajani ont d'un côté insisté sur la nécessité de "travailler ensemble" avec les États-Unis, mais de l'autre côté sur celle de "renforcer le pilier européen de l'Otan".
Selon M. Tajani, cela va "renforcer aussi l'amitié et les relations transatlantiques".
Dans une déclaration commune signée lors de la réunion, les participants ont dénoncé "le révisionnisme" russe et ses violations du droit international.
Ils se sont engagés à investir dans leurs "capacités militaires essentielles", notamment la défense aérienne, les frappes de précision en profondeur, les drones et la logistique intégrée, ainsi que dans les infrastructures essentielles et la cyberdéfense.
La rencontre, à laquelle a participé aussi la future cheffe de la diplomatie européenne, l'Estonienne Kaja Kallas, et, via une visio-conférence, les chefs de diplomatie espagnol José Manuel Albares et britannique David Lammy, s'est tenue au lendemain d'une réunion des ministres des Affaires étrangères de l'UE à Bruxelles.
Le ministre des Affaires étrangères ukrainien, Andriï Sybiga, a également été invité à Varsovie, mais il assiste à Kiev à des événements liés au millième jour de l'agression russe.
Avec AFP
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