La fusée Vega C, cruciale pour l'autonomie de l'Europe dans l'accès à l'espace, est parvenue à mettre en orbite un satellite jeudi après son décollage depuis Kourou, en Guyane française, deux ans après l'échec de son premier lancement commercial.
Après un retard de 48 heures, Vega C s'est élancée sans encombre jeudi à 18H20 (21H20 GMT), a constaté un correspondant de l'AFP, comptant à son bord le satellite Sentinel-1C du programme d'observation Copernicus de l'UE.
Une heure et 43 minutes après le décollage, le satellite, qui doit fournir des données et des services d'observation de la planète de façon permanente pour comprendre l'impact de l'évolution du climat, a été mis en orbite à quelque 700 km d'altitude, sous les applaudissements nourris du centre de contrôle Jupiter.
Ce retour en vol de la fusée conçue par l'entreprise aérospatiale italienne Avio marque la fin de deux années compliquées après l'échec en décembre 2022 du premier vol commercial du lanceur sous maîtrise d'œuvre italienne. Cet échec avait causé la perte de deux satellites Airbus et porté un coup d'arrêt au programme Vega C.
"Les deux dernières années ont été vraiment difficiles pour l'industrie spatiale européenne. Des satellites ont dû être envoyés depuis les Etats-Unis. J'étais dans cette salle Jupiter en décembre 2022 et on a retrouvé le sourire ce soir", a déclaré à l'AFP Marino Fragnito, directeur commercial chez Avio.
Le directeur général de l'ESA, Josef Aschbacher, venu superviser ce lancement, s'est dit "très soulagé de ce retour en vol. Nous étions cependant très confiants après deux essais à feu concluants. Mais un lancement reste un lancement", a-t-il souligné à l'AFP
"Autonomie d'accès à l'espace"
Après le succès du vol inaugural d'Ariane 6 en juillet, ce tir réussi matérialise la mise en service de la nouvelle génération de lanceurs européens et surtout l'aptitude de l'Europe à retrouver une capacité stratégique d'accès à l'espace.
Vega C et Ariane 6 sont aujourd'hui les deux lanceurs souverains et complémentaires disponibles pour les puissances publiques européennes. Vega C permet d'envoyer des petits satellites en orbite basse, alors qu'Ariane 6 est conçue pour déployer des satellites plus gros en orbite basse et des moins gros dans des orbites plus élevées ou des constellations de satellites.
"2024 est l'année de retour de notre autonomie d'accès à l'espace. Les deux fusées Ariane 6 et Vega C sont opérationnelles et nous allons retrouver un haut niveau d'activité au Centre spatial guyanais en 2025 et au-delà", a déclaré à l'AFP Stéphane Israël, directeur général d'Arianespace.
La priorité sera d'assurer la montée en cadence des lancements de Vega-C à un rythme de 4 à 5 par an, a insisté M. Israël.
Arianespace commercialise la fusée italienne pour encore quatre lancements avant de passer la main à Avio: l'industriel italien a pris cet été, à sa demande, le contrôle de la commercialisation des fusées qu'il produit, pour, à terme, être le seul à exploiter la fusée Vega-C et sa future version, Vega-E, en cours de développement.
"Le monde est en train de changer. Il y a de plus en plus d'initiatives commerciales dans le secteur des lanceurs en Europe. Il y a un intérêt commercial d'Avio de se positionner sur un marché compétitif", a justifié auprès de l'AFP Marino Fragnito, directeur commercial chez Avio.
Quatre lancements en 2025
La décision de reprendre les missions de la fusée légère a été prise après des essais concluants du moteur Zefiro-40, qui équipe le deuxième étage du lanceur et dont une défaillance avait été à l'origine de l'échec de 2022. Ce moteur a depuis été redessiné.
Le surcoût lié à la remise en vol de Vega C devrait s'élever à entre 25 et 30 millions d'euros, compris dans le financement de l'ESA voté l'an passé par les Etats membres, selon le directeur du Transport spatial de l'Agence, Toni Tolker-Nielsen.
Selon lui, quatre lancements de Vega C sont prévus l'année prochaine et 5 en 2026.
Ce vol était particulièrement scruté car le prédécesseur de Vega C, Vega, n'est plus en service après son dernier lancement en septembre.
"C'est crucial parce que l'autonomie stratégique européenne repose sur deux pieds: un grand qui est celui de l'Ariane 6, lanceur lourd, et Vega C qui est un lanceur un peu plus petit mais qui complète bien la capacité européenne d'accès à l'espace", avait résumé Philippe Baptiste, PDG du Cnes (Centre national d'études spatiales) dans un entretien à l'AFP avant le tir.
La deuxième mission d'Ariane 6, avec un satellite d'observation militaire, initialement envisagée fin 2024, aura lieu à partir de mi-février, un report que les acteurs du spatial cherchent à dédramatiser.
Guillaume Reuge, avec AFP
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