Charlie Hebdo: la satire reste un rempart face à la tragédie
L'dition spéciale du journal satirique français Charlie Hebdo à l'occasion du 10e anniversaire de l'attentat contre Charlie Hebdo, dans un kiosque à journaux à Paris, le 6 janvier 2025. ©Martin Lelievre / AFP

Dix ans après l'attentat terroriste du 7 janvier 2015, Charlie Hebdo, fidèle à ses valeurs de liberté d'expression, publie un numéro spécial affirmant que l'humour reste sa résistance face aux menaces. Dans un contexte géopolitique tendu, le journal continue de défendre le droit à la caricature et à critiquer l'obscurantisme, tout en célébrant la force du rire comme un acte de résistance.

Le 7 janvier 2015, une attaque terroriste dévastatrice frappait Charlie Hebdo, tuant douze personnes, dont huit membres de la rédaction. Dix ans après ce tragique événement, l'hebdomadaire satirique, qui a survécu à l'effroyable massacre, continue de défendre les valeurs de la liberté d'expression avec la même énergie. Dans un numéro spécial à paraître ce mardi, le journal réaffirme que l'humour est sa résistance.

“Increvable” face aux menaces

Dans une édition “historique” de 32 pages, Charlie Hebdo se déclare “increvable”, avec en “une” une caricature symbolique: un lecteur, assis sur un fusil d'assaut, dévore avec délectation ce numéro spécial. Le message est clair: malgré les menaces, les attaques, et la tragédie, le rire demeure une arme incontournable.

“Si on a envie de rire, c'est qu'on a envie de vivre”, souligne Riss, directeur du journal, dans l'édito qui accompagne ce numéro. “Le rire, l'ironie, la caricature sont des manifestations d'optimisme”, écrit-il, expliquant que la satire reste un rempart face à la tragédie, quelle qu'elle soit.

Riss revient sur les dix dernières années marquées par une situation géopolitique de plus en plus tendue. Pour lui, les valeurs de Charlie Hebdo – humour, liberté d'expression, laïcité, féminisme, écologie – sont aujourd'hui plus que jamais remises en question, parfois même attaquées par des forces obscurantistes qui menacent les fondements mêmes de la démocratie.

“Je suis Charlie”

L'attentat de 2015 a fait douze morts, dont cinq dessinateurs emblématiques du journal: Cabu, Charb, Honoré, Tignous et Wolinski. La psychanalyste Elsa Cayat, l'économiste Bernard Maris et le correcteur Mustapha Ourrad faisaient également partie des victimes. Après cet acte terroriste, la France et le monde entier se sont unis sous le slogan "Je suis Charlie", marquant un soutien massif à la liberté d'expression.

Des millions de personnes étaient descendues dans les rues lors des manifestations du 11 janvier 2015, auxquelles avaient participé de nombreux chefs d'État étrangers.

Dix ans après, Charlie Hebdo reste fidèle à ses principes. L'attaque de 2015 n'a pas éteint sa flamme; au contraire, elle a galvanisé sa lutte pour la liberté de caricaturer et de dénoncer toutes les formes d'obscurantisme, religieux soit-il ou politique. Dans son numéro spécial, le journal publie une série de caricatures sur le thème #RiredeDieu, une initiative lancée fin 2024 à travers un concours international de dessins.

Droit fondamental

Parmi les 350 propositions reçues, près de 40 sont retenues, traitant de manière audacieuse des sujets religieux et de leurs impacts sur la liberté individuelle. Ce numéro spécial est également l'occasion de rappeler les résultats d'une étude de l'Ifop pour la Fondation Jean-Jaurès, réalisée en juin 2024, selon laquelle 76% des Français considèrent que “la liberté d'expression est un droit fondamental” et que “la liberté de caricature en fait partie”, et 62% soutiennent le “droit de critiquer de manière outrageante une croyance, un symbole ou un dogme religieux”.

À l'occasion des commémorations du 7 janvier 2025, une cérémonie se tiendra à Paris, en présence du président Emmanuel Macron, de ministres et de la maire de Paris, Anne Hidalgo. Elle commencera dans le XIe arrondissement, où se trouvaient les locaux de Charlie Hebdo en 2015, et se poursuivra jusqu’au boulevard Richard Lenoir, où le policier Ahmed Merabet a été tué. L'hommage se conclura par un recueillement aux victimes de l'Hypercasher, tuées lors d'une prise d'otages deux jours après l'attentat contre le journal.

Une minute de danse

Depuis l'attentat de Charlie Hebdo en 2015, la chorégraphe Nadia Vadori-Gauthier a lancé une initiative: Une minute de danse par jour. Un “acte de résistance poétique”, dit-elle, devenu une œuvre continue, avec plus de 3.600 vidéos publiées. “Le 7 janvier 2015, passée la stupeur du choc, je me suis demandée ce que je pouvais initier pour faire de la vie”, a affirmé Mme Vadori-Gauthier à l'AFP. La performance, qui a évolué au fil des événements, inclut des interventions dans des lieux variés et des participations collectives, comme lors du confinement, où elle a reçu des milliers de vidéos. Le projet se termine le 14 janvier, avec la publication d'un livre retraçant ces dix années d'aventure artistique et personnelle.

Si la mémoire du 7 janvier 2015 est encore vive, Charlie Hebdo continue de faire vivre, contre vents et marées, l'esprit de résistance et de liberté qui le définit depuis ses débuts.

Avec AFP

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