Déminage au Liban: à quand la fin des opérations et le retour des déplacés dans leurs villages?
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Hanté par des milliers de mines et d’engins explosifs, le Liban fait face à un défi majeur: le déminage d’un territoire marqué par des décennies de conflits belliqueux, le dernier en date étant celui qui a opposé le Hezbollah à Israël. Déclenchée au lendemain de l’offensive du 7 octobre 2023 perpétrée par le Hamas contre l’État hébreu, la guerre qui s’est étendue au Liban sous le couvert de “l’unité des fronts” a ravivé cette problématique. Aujourd’hui, ce sont de nouvelles zones qui sont contaminées par des mines terrestres et des munitions non explosées. Ce fléau humanitaire touche principalement les régions frontalières et les zones rurales que des milliers de Libanais ont dû fuir pour échapper aux hostilités.

L’échelle du problème: combien de terrains sont minés?

Le nombre exact de terrains minés au Liban est aujourd’hui difficile à déterminer, en raison des opérations militaires menées notamment le long de la frontière libanaise. “Fin 2023, nous étions parvenus à nettoyer 84% des territoires contaminés”, affirme-t-on de source proche du dossier, avant d’indiquer qu’à cette date, “les équipes de déminage avaient pour mission de procéder au déminage d’approximativement 16 millions de mètres carrés (sur un total de 26,68 millions de mètres carrés, début 2023) qui étaient encore à risque”. Et de signaler que des études de terrain sont en cours pour procéder à une réévaluation de la situation et à une élaboration d’un nouveau plan. Néanmoins, “les travaux de nettoyage sont en cours et se font parallèlement aux manœuvres de prospection”, déclare-t-on de même source.

Certains experts estiment, par ailleurs, qu’environ 25% du territoire libanais reste affecté par des mines terrestres et des munitions non explosées, particulièrement dans le sud du pays, le long de la frontière avec Israël, ainsi que dans la vallée de la Békaa. Les zones les plus touchées sont celles proches de la Ligne bleue, mais aussi les régions rurales du sud et de l’est du pays.

Les acteurs du déminage au Liban

Le déminage au Liban est une opération complexe qui implique plusieurs parties prenantes, parmi lesquelles des institutions relevant de l’État, des organisations non gouvernementales (ONG) et des forces de maintien de la paix.

Au Liban, c’est le Centre libanais d'action contre les mines (Clam) qui est responsable de la coordination des efforts de déminage. Cette structure rend compte au ministère de la Défense et travaille en étroite collaboration avec des ONG et des acteurs internationaux pour assurer la sécurité et la reconstruction des zones contaminées.

Plusieurs ONG jouent, par ailleurs, un rôle crucial dans les opérations de déminage. Parmi les plus importantes, on retrouve MAG (Mines Advisory Group), un organisme international spécialisé dans la détection, le déminage et l’éducation à la sécurité, HALO Trust, une organisation également très présente au Liban qui a mené des opérations de déminage sur des sites particulièrement affectés par les conflits passés et présents et Handicap International, qui mène depuis 2007 des activités relatives aux mines au Liban.

De son côté, la Force intérimaire des Nations unies au Liban (Finul) intervient également dans les opérations de déminage, en particulier le long de la Ligne bleue. Bien que son mandat principal soit la surveillance de la cessation des hostilités, la Finul aide également à neutraliser les mines et les engins explosifs.

Le processus de déminage

Le déminage au Liban se fait par étapes strictement protocolées. Un processus typique passe d’abord par l’identification des zones contaminées. Des relevés géospatiaux et des inspections de terrain sont alors menés pour localiser les zones à risque. Des informations sont également collectées auprès des communautés locales et des autorités pour identifier les superficies suspectes. Une fois une zone identifiée, les experts effectuent une évaluation des risques. Cela comprend l’analyse des types de mines présentes et des techniques nécessaires pour les neutraliser en toute sécurité. Les équipes de déminage utilisent des détecteurs de métaux, des chiens détecteurs de mines, ainsi que des méthodes manuelles et mécaniques pour les localiser et les désamorcer. La neutralisation se fait à l’aide d’explosifs ou par une destruction contrôlée. Après l’élimination des mines, des contrôles et vérifications supplémentaires sont effectués pour s’assurer qu’il n’y a plus de risques résiduels. Des techniques de nettoyage sont ensuite appliquées pour rendre la zone à nouveau accessible et sûre pour les habitants. “Une partie essentielle du déminage consiste à informer les populations locales sur les dangers des mines, raison pour laquelle des programmes d’éducation à la sécurité sont mis en place pour prévenir les accidents”, souligne-t-on de source sécuritaire.

Durée des opérations de déminage

Les opérations de déminage peuvent durer de quelques mois à plusieurs années, en fonction de la taille de la zone à déminer et de la complexité des terrains. Après des conflits majeurs comme celui de 2024, le processus est encore plus lent, car de nouvelles zones contaminées doivent être nettoyées. De plus, les zones urbaines ou rurales difficiles d’accès compliquent souvent les opérations. En raison de la lenteur de ces interventions et du coût élevé du matériel nécessaire, le Liban aurait besoin, selon la source susmentionnée, d’environ un an, pour nettoyer complètement ces terres de toutes les mines et engins non explosés. “Tout dépend aussi du financement requis pour ce faire”, précise-t-on de même source, avant d’ajouter: “Pour le moment, beaucoup d’instances ont promis de consacrer des sommes pour le déminage, mais nous n’avons, jusqu’à présent rien reçu.”

Intimement liée aux opérations de déminage, la question du retour chez eux des déplacés libanais est au cœur de vastes inquiétudes. De nombreux habitants des régions frontalières ont dû fuir leurs villages pendant la guerre de 2024, notamment dans le sud du pays, à proximité de la frontière israélienne. Aujourd’hui, outre les hostilités qui persistent, c’est également la crainte des mines et des munitions non explosées qui empêche leur retour rapide. Un problème complexe, pour lequel il va falloir attendre, d’une part l’application pleine et entière de l’accord de cessez-le-feu et d’autre part, la fin des opérations de déminage… prévues pour l’an prochain.

 

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